Droit administratif

Le droit administratif peut être défini comme le droit qui encadre les activités de l’administration. S’il fut essentiellement d’origine jurisprudentielle au départ, il est, de nos jours, fortement nourri par d’autres types de normes (Constitution et droit international, notamment). La nature particulière des missions administratives, que sont le service public et la police administrative, explique, cependant, que la puissance publique bénéficie de pouvoirs exorbitants, dont on trouve des ramifications tant au niveau de l’acte administratif unilatéral que du contrat administratif. Pour autant, l'administration demeure soumise au contrôle du juge administratif et peut voir sa responsabilité engagée.

La disparition volontaire des actes administratifs unilatéraux (CE, ass., 26/10/2001, Ternon ; Code des relations du public avec l’administration)

La disparition des actes administratifs unilatéraux est longtemps demeurée le parent pauvre du droit administratif. Les conditions de l’entrée en vigueur, les modalités procédurales d’adoption des actes, le contrôle des exigences de forme et de fond ont bien plus mobilisé l’attention du juge et de la doctrine. Cette situation peut être expliquée par le fait que l’essentiel des recours devant le juge de l’excès de pouvoir tendent à faire annuler un acte qui vient d’être adopté. À l’inverse, une fois l’acte entré en vigueur, sa disparition poserait, a priori, moins de problèmes. 

Le critère du « régime exorbitant » du contrat administratif a survécu ! (CE, 01/07/2010, Société Bioenerg)

En l’absence, à l’origine, de droit écrit, la notion de contrat administratif a été bâtie par voie prétorienne, jurisprudence après jurisprudence jusqu’à constituer un édifice relativement stable et cohérent. Les évolutions de ces jurisprudences sont demeurées contenues. Plus le droit écrit s’est étoffé, plus les hypothèses de qualification par les critères dégagés par le Conseil d’État sont devenues, en droit comme en fait, subsidiaires. À tel point, du reste, que l’on a pu, un temps, pensé éteints certains critères. L’arrêt CE, 1er juillet 2010, Société Bioenerg, req. n°333275 tend à, au contraire, à démontrer la grande résilience de ces critères.

Les différents recours contentieux devant le juge administratif (fiche thématique)

Plusieurs classifications peuvent être relevées lorsqu’il s’agit de présenter les différents types de recours contentieux possibles devant le juge administratif. Ainsi, Léon Duguit distinguait la juridiction objective de la juridiction subjective. La première hypothèse correspond à la situation où la question posée au juge est une question de droit objectif, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit de déterminer la régularité d’un acte. A l’opposé, le contentieux subjectif est celui où le requérant invoque une atteinte portée à une situation juridique et à des droits individuels. Plus près de nous, c’est le professeur Chapus qui a distingué le contentieux des recours et le contentieux des poursuites. La classification qui sera, cependant, retenue ici est celle d’Edouard Laferrière qui a distingué le contentieux de pleine juridiction, celui de l’annulation, celui de l’interprétation et de l’appréciation de la légalité et enfin le contentieux de la répression.

La légalité de l’action économique des personnes publiques agissant au profit de leurs semblables (CE ,ass., 30/12/2014, Société Armor SNC)

L’action des personnes publiques dans l’économie a toujours suscité, de la part des juristes, des questions dont les réponses ont fait l’objet d’une évolution accompagnant ou déstabilisant celle du droit administratif général. Par son arrêt du 30 décembre 2014, l’Assemblée du Conseil d’Etat a apporté à l’édifice que l’on pensait presque achevé en 2006, avec l’arrêt CE, Ass, 31 mai 2006, Ordre des avocats au Barreau de Paris, req. n° 275531 (ci-après OABP), un nouvel ornement dont il n’est pas certain qu’il en suive à la lettre le style.

Clap de fin pour la saga des crèches de Noël (CE, ass., 9/11/2016, Fédération de la libre pensée de Vendée ; CE, ass., 9/11/2016, Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne)

Le cycle électoral de 2017 a montré combien les questions liées à l’application de la laïcité occupent une place importante dans le débat public. Assez éloigné des polémiques estivales, c’est sur l’installation des crèches de Noël dans les édifices publics que l’assemblée du contentieux du Conseil d’État vient de prendre position, par deux arrêts du 9 novembre 2016.     

Vers un contrôle du droit souple en matière de régulation économique (CE, ass., 21/03/2016, Société Fairvesta International GMBH)

La nature de l’acte juridique, en général, et de l’acte administratif unilatéral (AAU) en particulier, est une question complexe. Elle est complexe, car paradoxale. D’un côté, la nature de l’acte administratif unilatéral semble frappée par l’évidence de sa dénomination. D’un autre côté, en revanche, une étude plus approfondie démontre que chacun des termes qui la compose est équivoque. La combinaison de ce qu’ils recouvrent précisément ajoute à la difficulté. L’arrêt annoté CE, 21 mars 2016, Fairvesta, propose une nouvelle approche de la notion de droit souple, plus conforme au pragmatisme et aux nécessités de l’administration active.

Une tentative de définition de la « clause exorbitante » (TC, 13/10/2014, Société AXA IARD)

Le droit des contrats administratifs a accompagné, poussé voire façonné des pans entiers du droit administratif. Notion essentiellement prétorienne, le contrat administratif suit les mouvements d’adaptation du droit administratif aux temps et aux mœurs de la société. En outre, le droit des contrats tisse des liens solides et nombreux avec les autres matières du droit public, de sorte que le raisonnement du juge peut apparaître structuré « en tiroirs ». Ainsi, le juge peut être amené à rendre une solution bien plus riche que la question qui en est à l’origine le laissait supposer. L’arrêt TC, 13 octobre 2014, Société AXA IARD, req. n°C3963 est caractéristique de cette dynamique du droit.

Le contrôle des décisions de résiliation des conventions d’occupation du domaine public (CE, 25/01/2017, Commune de Port-Vendres)

Certaines affaires mobilisent longtemps le juge administratif. Bien souvent elles soulèvent des problèmes de droit qui n’avaient, auparavant, trouvé aucune solution. Dans le domaine du droit administratif des biens, celle opposant la commune de Port-Vendres à l’association départementale des pupilles de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales et concernant l’occupation par cette dernière d’un bien appartenant à la première en fait partie. L’épilogue de la saga est amené par l’arrêt CE, 25 janvier 2017, Commune de Port-Vendres, req. n° 395314.

La responsabilité de l’État du fait du contrôle sur les médicaments : le cas du Médiator (CE, sect., 9/11/2016, Mme K, Mme G, Mme B c/ Ministre des affaires sociales ; 3 espèces)

Le rôle de la société civile dans les découvertes des dysfonctionnements des personnes publiques n’est désormais plus à prouver. Le scandale sanitaire du Mediator, ce médicament qui s’est révélé excessivement dangereux alors que sa mise sur le marché avait été autorisée par l’État constitue un cas d’école de l’alerte lancée par des citoyens informés. Les arrêts CE, Sect., 9 novembre 2016, Mme K, Mme G, Mme B c/Ministre des affaires sociales, req. n°s 3939304, 393902 et 393926 constituent l’une des phases juridiques de ce dossier, dans son versant de droit public.

Le régime de la responsabilité de l’administration dans le cadre des perquisitions de l’état d’urgence (CE, ass., avis, 6/07/2016, Napol)

La France, qui n’a jamais vécu de longue période sans attentat, a connu depuis novembre 2015 une vague d’attaques nouvelles et sans précédent qui ont nécessité de recourir à une législation d’exception. L’état d’urgence, prévu et organisé par la loi du 3 avril 1955, autorise notamment l’administration à réaliser des perquisitions administratives sur ordre du préfet. La dynamique qui a prévalu dans la lutte contre le terrorisme a pu s’étendre à des personnes qui ne peuvent être qualifiés de terroristes. La juridiction administrative a donc été saisie d’un grand nombre de requêtes à l’encontre d’actes pris sous cette législation. Par son avis contentieux du 6 juillet 2016, le Conseil d’État revient sur le régime de contrôle et de sanction à leur appliquer.

La voie de fait acculée (TC, 17/06/2013, M. Bergoend c/ société ERDF Annecy Léman)

La voie de fait est une de ces théories dont on ne situe plus exactement l’origine. Dans un contexte de légitimation de l’office du juge administratif dans la protection des libertés fondamentales, notamment du fait des évolutions de l’état d’urgence et du dessaisissement du juge judiciaire, la théorie de la voie de fait, que l’on a appelé un temps « la folle du logis » fait office de point de tension de la guerre picrocholine que se livrent le juge judiciaire et le juge administratif. La décision du Tribunal des conflits du 17 juin 2013, M. Bergoend c/ société ERDF Annecy Léman, n°3911 tranche pourtant en faveur de ce dernier.

Quand le vice n’est pas assez vicieux, l’acte demeure (CE, ass., 23/12/2011, Danthony)

Le contrôle de la légalité administrative justifie l’existence de la juridiction administrative. Depuis la création du Conseil du Roi à l’intégration européenne et au constitutionnalisme des droits de l’Homme, rendus possibles par l’établissement de la justice déléguée en 1872, l’office du juge administratif s’est largement renouvelé pour s’adapter aux évolutions de la société.  L’arrêt CE, Ass., 23 décembre 2011, Danthony, req. n°335033 en est l’illustration parfaite.