Comme l’a affirmé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dès 1964 dans l’arrêt Costa C/ Enel, l’UE constitue un ordre juridique propre intégré au système juridique des États membres. Les sujets de cet ordre juridique sont les États membres et leurs citoyens. À travers les compétences données à l’UE par les traités européens, les États membres ont consenti à des limitations de leur souveraineté. Les deux principes fondamentaux de l’ordre juridique de l’UE sont la primauté du droit de l’Union sur les droits nationaux et l’effet direct de ce droit au sein de l’ordre juridique interne des États membres.
« Nous avons une stratégie. On appelle ça, choisis une direction générale et mets-la en œuvre ! ». Cette citation de Jack Welsh s’applique bien à la politique étrangère de l’Union. Toutefois, l’application d’une politique unifiée est parfois complexe, dans un monde où les tensions se multiplient, où la place de l’Europe tend à se marginaliser et avec une Union européenne où la montée des nationalismes se fait de plus en plus forte. Pourtant, ainsi que le souligne Robert Cooper, « pour un paquebot comme l’Union européenne, avec 28 capitaines potentiels, il est important de partager le même sens de l’orientation ».
« Il faut conclure de cet état de choses que la communauté constitue un nouvel ordre juridique de droit international, au profit duquel les États ont limité, bien que dans des domaines restreints, leurs droits souverains, et dont les sujets sont non seulement les États membres mais également leurs ressortissants ». Cette citation issue de l’arrêt NV Algemene Transport- en Expeditie Onderneming van Gend & Loos contre Administration fiscale néerlandaise, dit Van Gend en Loos, du 5 février 1963 montre bien les fondements de l’effet direct du droit de l’Union : les ressortissants des États membres sont directement sujets de droit européens, sans nécessiter que l’État dont ils sont citoyens transpose ce droit dans son ordre juridique national.
Ainsi qu’il sera vu au cours de la présente dissertation, les droits fondamentaux ont une place majeure dans l’ordre juridique de l’Union. Il s’agit d’un des éléments fondamentaux du maintien de l’Union et un corpus de droits que l’Union a dû intégrer pour conserver son autonomie et la primauté de son droit ; un élément tout à fait majeur à la fois de l’intégration européenne et de ses relations avec l’extérieur. Ainsi que le souligne fort justement Karine Caunes dans son article La protection des droits fondamentaux dans l’Union européenne, Retour vers le futur de l’avis 2/13 de la Cour de justice, de l’adhésion de l’UE à la CEDH et de l’Union européenne elle-même, « Quant à la dimension intra-européenne : l’intégrité des ordres juridiques des Etats membres est-elle soluble dans l’intégration européenne ? Quant à la dimension externe : l’intégrité de l’ordre juridique de l’Union européenne est-elle soluble dans son intégration sur le plan international ? ».
« Pendant une grande partie de son existence, le Parlement européen aurait pu être qualifié à juste titre de "salon de discussion multilingue". Mais ce n’est plus le cas : le Parlement européen est désormais l’une des législatures les plus puissantes au monde, tant en termes de pouvoirs de contrôle législatif qu’exécutif ». Cette citation du Professeur David Farrell prononcée en 2007 trouve toute son importance dans le contexte dans lequel elle s’inscrit. Le traité de Lisbonne, signé la même année, marque, par l’instauration de la procédure législative ordinaire, un tournant dans l’exercice par le Parlement du pouvoir législatif, désormais placé sur un pied d’égalité avec le Conseil.
La chambre mixte de la Cour de cassation rend un arrêt dit « Jacques Vabre » le 24 mai 1975 ayant trait à la primauté du droit de l’Union Européenne. En l’espèce, la société des cafés Jacques Vabre a importé du café d’un autre pays membre de la communauté européenne, les Pays-Bas, en vue d’une commercialisation sous forme de café soluble en France. La société Weigel, commissionnaire en douane, a versé le dédouanement à l’administration des douanes pour chacune des importations de 1967 à 1971 conformément à la loi de 1966 relative aux taxes douanières. Les deux sociétés ont assigné l’administration des douanes pour obtenir la restitution des droits de douane versés, ceux-ci étant supérieurs à l’imposition des mêmes cafés fabriqués et consommés en France, ce qui est discriminatoire au regard de l’article 95 du traité de Rome du 25 mars 1957.