Introduction
Les traitements et salaires constituent, sans aucun doute, le revenu catégoriel taxable à l’impôt sur le revenu le plus répandu du fait du nombre de personnes concernées et de la masse de la matière imposable. Appréhender cette catégorie de revenus suppose d’en préciser la définition, ainsi que le mode de calcul.
Sur le premier point, les traitements et salaires peuvent être définis comme les sommes perçues dans le cadre d’une activité professionnelle exercée par une personne physique qui est liée à un employeur par un contrat de travail ou qui est placée, vis-à-vis de celui-ci, dans un état de subordination. Cette définition embrasse une grande diversité de revenus : rémunération principale, rémunérations accessoires, revenus de remplacement, … Des rémunérations relevant de cette définition font, cependant, l’objet, par dérogation, d’une exonération.
Sur le second point, le revenu net catégoriel en matière de traitements et salaires s’obtient en suivant un processus à trois temps : addition de l’ensemble des revenus relevant de la catégorie, déduction des cotisations sociales obligatoires et déduction des frais professionnels.
Il convient, donc, de définir, dans une première partie, les traitements et salaires (I) et de déterminer, dans une seconde partie, leur mode de calcul (II).
I - Définition des traitements et salaires
Les traitements et salaires correspondent aux sommes perçues dans le cadre d’une activité professionnelle exercée par une personne physique qui est liée à un employeur par un contrat de travail ou qui est placée, vis-à-vis de celui-ci, dans un état de subordination : il s’agit des sommes perçues tant par les salariés de droit privé que par les fonctionnaires ou, plus généralement, les agents publics.
Certaines rémunérations sont imposables (A), d’autres sont, par exception, exonérées (B). Les allocations pour frais d’emploi font, elles, l’objet d’un traitement spécifique (C).
A – Les revenus imposables
A côté des sommes relevant par nature des traitements et salaires (1), il existe des rémunérations qui leurs sont assimilées (2).
1 – Les traitements et salaires par nature
Il s’agit de :
a / La rémunération principale des personnes en activité : salaires, traitements, indemnités.
b / Diverses rémunérations accessoires : primes d’ancienneté, de vacances ou de rendement, indemnités de congés payés ou de congés de naissance.
c / Les avantages en nature en tant que ce type de rémunération constitue une non-dépense (voir II – A).
d/ Les sommes perçues en fin d’activité (licenciement, départ volontaire, retraite ou préretraite) : ces indemnités sont, en principe, imposables, mais certaines bénéficient d'une exonération totale ou partielle et peuvent, pour la partie imposable, être taxées selon le système du quotient.
2 – Les revenus assimilés aux traitements et salaires
L’on peut noter :
a / Les revenus de remplacement : indemnités journalières pour cause de maladie, de maternité ou de paternité, les allocations chômage et de préretraite.
b / Des rémunérations spécifiques : rémunération d’une famille agréée pour l’accueil à domicile d’une personne âgée ou handicapée adulte, rémunérations versées aux aidants familiaux, indemnités versées aux élus, …
B – Les revenus exonérés
Certains revenus peuvent faire l’objet d’une exonération totale ou partielle. A titre d’exemple, l’on peut citer :
a / Certaines prestations sociales : il en va, ainsi, des prestations familiales légales (allocations familiales, allocation logement, allocation de rentrée scolaire), de l’allocation aux adultes handicapés, du revenu de solidarité active (RSA), ….
b / Les bourses d’études accordées en fonction de critères sociaux.
c / La partie du salaire d’un jeune en contrat d’apprentissage ne dépassant pas 20 815 € pour les revenus perçus en 2023.
d / Sur option, la fraction des salaires perçus par les jeunes âgés de 25 ans au plus au 1° janvier de l’année d’imposition en rémunération d’une activité exercée pendant leurs études secondaires ou supérieures ou pendant leurs congés scolaires ou universitaires dans la limite annuelle de 3 fois le montant mensuel du SMIC, soit 5 204 € pour les revenus perçus en 2023.
C - Les allocations pour frais d'emploi
Les allocations pour frais d’emploi (AFE) correspondent à des remboursements par l’employeur au profit du salarié de frais professionnels inhérents à l’emploi et exposés dans l’intérêt de l’entreprise (frais de déplacement, de représentation, de correspondance, …). Leur régime d’imposition varie selon que le salarié applique la déduction forfaitaire ou opte pour les frais réels.
a / Dans le cas des frais réels, les AFE sont toujours imposables.
b / Les AFE ne sont exonérées qu’en cas de choix de la déduction forfaitaire de 10 % et sous réserve du respect de certaines conditions :
- les dépenses doivent être inhérentes à l’emploi,
- les dépenses doivent correspondre à des dépenses réelles, c’est-à-dire être justifiées dans leur réalité et leur montant,
- les AFE doivent être utilisées conformément à leur objet,
- les AFE doivent, enfin, couvrir des dépenses spéciales, c’est-à-dire des dépenses autres que celles couvertes par la déduction de 10 %.
II - Calcul des traitements et salaires
Afin d’obtenir le revenu net catégoriel en matière de traitements et salaires, trois grandes étapes doivent être respectées :
- il convient, d’abord, de calculer le revenu brut qui est la somme de tous les traitements et salaires et rémunérations assimilées : rémunération principale, rémunération accessoire, avantages en nature, revenus de remplacement, …
- il faut, ensuite, déduire les cotisations sociales versées aux régimes obligatoires (Sécurité sociale, retraite, assurance chômage, …) et la fraction déductible de la CSG,
- le contribuable doit, enfin, déduire ses frais professionnels.
L’évaluation de certains de ces éléments peut être de nature à soulever des difficultés : il en va ainsi des avantages en nature (A) et des frais professionnels (B).
A – L'évaluation des avantages en nature
Un contribuable bénéficie d’avantages en nature lorsque, par exemple, son employeur le loge, le nourrit ou met à sa disposition une voiture pour ses besoins personnels de manière gratuite (sans retenue sur salaire) ou en appliquant une retenue inférieure à la valeur réelle de l’avantage. Ces avantages constituent une rémunération imposable au même titre que la rémunération principale dans la mesure où ils constituent une non-dépense.
L’on peut citer : la nourriture (1), le logement (2), le véhicule (3) et les outils de communication (4). Ces avantages sont évalués en appliquant les règles existant en matière de Sécurité sociale : le plus souvent, l’évaluation peut s’effectuer forfaitairement ou selon les dépenses réellement engagées. Cependant, les avantages autres que ceux ici analysés sont retenus pour leur valeur réelle.
1 – La nourriture
Lorsque l’employeur fournit la nourriture à ses salariés, l’avantage en nature est, dans la plupart des cas, évalué forfaitairement à 5,20 € par repas en 2023. Une évaluation spécifique est, cependant, prévue pour les personnels des hôtels, cafés ou restaurants : l’avantage est, ici, estimé à 4,01 € par repas.
2 – Le logement
En matière de logement, l’employeur a le choix entre deux méthodes d’évaluation.
a / L’avantage peut, d’abord, être évalué forfaitairement à partir d’un barème qui comprend également certains avantages accessoires (eau, gaz, électricité, chauffage et garage). L’employeur doit diviser la rémunération brute mensuelle du salarié par le plafond mensuel de la sécurité sociale et reporter le résultat dans le barème pour déterminer la valeur mensuelle de l’avantage.
b / La seconde méthode est dite réelle et se base sur la valeur locative servant de base à la taxe d’habitation, augmentée de la valeur réelle des avantages accessoires.
Remarques : pour les salariés ne pouvant accomplir leur activité sans être logés dans les locaux où ils exercent leur fonction (agents publics logés par “nécessité absolue de service”, personnel de sécurité et de gardiennage, ...), la valeur de l’avantage de logement subit un abattement pour sujétions de 30 % sur la valeur locative cadastrale du logement ou sur l’évaluation forfaitaire.
3 – Le véhicule
L’utilisation par un salarié à titre privé d’un véhicule de fonction constitue un avantage en nature imposable. Deux méthodes d’évaluation existent ici aussi.
a / Dans le cadre de la méthode forfaitaire, l’avantage correspond à un pourcentage du coût d’achat TTC du véhicule fonction de l’âge de celui-ci s’il appartient à l’entreprise ou à un pourcentage de son coût global de location s’il est loué. S’y ajoutent les frais de carburant s’ils sont pris en charge par l’employeur (évalués sur la base des dépenses réelles ou forfaitairement).
b / Dans le cadre d’une évaluation selon les dépenses réelles, l’avantage en nature comprend l’amortissement (un pourcentage du coût d’achat TTC de la voiture variable selon son âge) si le véhicule appartient à l’entreprise ou le coût de location si celui-ci est loué, ainsi que les frais d’assurance et les frais d’entretien. Celui-ci doit être retenu dans la limite du rapport existant entre le kilométrage effectué à titre privé et le nombre total de kilomètres parcourus dans l’année. Le cas échéant, il convient d’ajouter les frais réels de carburant pris en charge par l’employeur.
4 – Les outils de communication
L’utilisation à titre privé par un salarié d’outils issus des nouvelles technologies de l’information et de la communication (téléphone mobile, micro-ordinateur, ...) mis à sa disposition par l’employeur est évaluée sur la base des dépenses réellement engagées ou, sur option de l’employeur, sur la base d’un forfait égal à 10 % du coût d’achat de ces outils ou du coût de leur abonnement.
B – L'évaluation des frais professionnels
Les frais professionnels correspondent aux frais engagés pour l’acquisition du revenu. En la matière, le contribuable a le choix entre deux méthodes d’évaluation : soit la déduction forfaitaire de 10 % (1), soit la déduction des frais réels (2). Il lui revient d’estimer ses frais selon ces deux méthodes afin de choisir la plus avantageuse.
1 – La déduction forfaitaire de 10 %
La déduction forfaitaire de 10 % est applicable à tous les revenus imposés selon les règles des traitement et salaires, sauf lorsque le contribuable décide d’opter pour la déduction des frais réels. Elle couvre les dépenses professionnelles courantes auxquelles la plupart les salariés doivent faire face pour être en mesure d’occuper leur emploi ou d’exercer leurs fonctions, dont notamment : les frais de déplacement du domicile au lieu de travail, Ies frais de restauration sur le lieu du travail, Ies frais de documentation personnelle et de mise à jour des connaissances nécessitées par l’activité professionnelle.
Cette déduction ne peut être inférieure à 495 € et supérieure à 14 171 € pour les revenus de 2023.
2 – La déduction des frais réels
Le contribuable peut décider d’opter pour la déduction des frais réels. Dans cette hypothèse, il devra lister chacun des frais invoqués et justifier de leur réalité et de leur montant. Aucun plafond n’est applicable. Ils peuvent concerner les mêmes dépenses que celles couvertes par la déduction de 10 %, mais aussi des dépenses autres.
Pour qu’ils soient déductibles, trois conditions doivent être remplies :
- les frais doivent être nécessités par l’exercice de l’activité salariée et être effectués en vue de l’acquisition ou de la conservation du revenu,
- ils doivent être payés au cours de l’année d’imposition,
- ils doivent, enfin, être appuyés de justificatifs (factures, quittances, attestations, …).
Parmi ces frais, l’on trouve :
a / Les frais supplémentaires de nourriture : ces frais sont déductibles si l’activité professionnelle justifie de ne pas prendre ses repas au domicile en raison de l’éloignement de ce dernier ou des horaires de travail ; si le contribuable ne dispose pas d’un mode de restauration collective sur le lieu de travail ou à proximité, le montant des frais supplémentaires de repas est égal soit à la différence entre le prix du repas payé et la valeur du repas pris au foyer (estimée à 5,20 € en 2023) s’il dispose des justificatifs, soit à la somme forfaitaire de 5,20 € par repas en 2023 s’il n’a pas de justificatifs ; à l’inverse, si le contribuable bénéficie d’un mode de restauration collective sur le lieu de travail ou à proximité, il peut déduire une somme égale à la différence entre le prix du repas payé “à la cantine” et la valeur du repas pris au foyer (5,20 € en 2023) s’il a des justificatifs.
b / Les frais de transport du domicile au lieu de travail : ces frais sont intégralement déductibles dans la limite de deux fois 40 km (aller – retour) ; si la distance est supérieure, la déduction est admise pour les 40 premiers kilomètres, mais non au-delà, sauf si le contribuable justifie de circonstances particulières (difficulté à trouver un emploi à proximité du domicile suite à un licenciement, état de santé d’un membre de la famille, problème de scolarisation des enfants, …) ; ces frais comprennent la dépréciation du véhicule, les frais de réparation, d’entretien, d’usure des pneus, les primes d’assurance et la consommation de carburant ; ils peuvent être évalués selon les dépenses réellement engagées (sous certaines limites) ou forfaitairement à partir des barèmes kilométriques fiscaux.
c / De nombreux frais de formation professionnelle sont, également, déductibles : frais pour l’acquisition d’un diplôme ou d’une qualification à condition que la formation permette d’améliorer la situation professionnelle du contribuable ou l’accès à une autre profession, frais de stage de formation professionnelle ou, encore, frais de documentation pour se perfectionner dans sa profession ou accroître ses connaissances professionnelles.
d / Dépenses afférentes aux locaux professionnels : si l’activité salariée d’un contribuable nécessite l’utilisation d’un local professionnel spécifique (bureau, atelier, local de stockage, …), celui-ci peut déduire les frais correspondants (loyers, dépenses d’entretien et de réparation, …), à condition que l’employeur ne mette pas à sa disposition un lieu adapté à l’exercice de sa profession.
e / Les matériels professionnels : les dépenses afférentes à l’achat de matériel, outillage, mobilier de bureau utilisés pour l’exercice de la profession et dont la valeur unitaire HT ne dépasse pas 500 € sont intégralement déductibles au titre de l’année de l’acquisition ; au-delà de 500 €, seule la dépréciation annuelle est déductible.
f / Les frais de double résidence qui résultent de la nécessité pour le contribuable de résider pour des raisons professionnelles (mutation, travail saisonnier, …) dans un lieu distinct du domicile habituel sont admis en déduction ; il s’agit des dépenses supplémentaires de logement et de nourriture, des frais de déplacement, des intérêts d’emprunt contracté pour l’acquisition de la deuxième résidence.
g / Autres frais : frais exposés au cours des voyages professionnels (transport, nourriture, hébergement), frais de vêtements (s’il s’agit de vêtements spéciaux), cotisations syndicales, frais de recherche d’emploi, …
