Introduction
Les pensions et les rentes viagères consistent en allocations périodiques dont le paiement est, le plus souvent, garanti aux bénéficiaires leur vie durant. Conformément à l’article 79 du Code général des impôts (CGI), ces revenus concourent, tout comme les traitements, salaires, indemnités et émoluments, à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu.
Ce revenu catégoriel recouvre une grande diversité de revenus. Outre les pensions de retraite proprement dites, sont, en effet, imposables dans cette catégorie les pensions d’invalidité, les pensions alimentaires, ainsi que les rentes viagères qu’elles soient constituées à titre gratuit ou à titre onéreux.
Sur le plan des modalités d’imposition, les règles sont, à l’exception des rentes viagères à titre onéreux, proches de celles applicables aux traitements et salaires, puisqu’est retenu le montant brut des pensions sous déduction des frais engagés en vue de l’acquisition du revenu et des cotisations sociales. Est, ensuite, appliqué un abattement de 10 % au montant net imposable.
Il convient, donc, d’étudier, d’une part, les revenus imposables (I) et, d’autre part, le calcul du revenu imposable en matière de pensions et de rentes viagères (II).
I – Les revenus imposables
Ce revenu catégoriel imposable à l’impôt sur le revenu est composé des pensions de retraite et d’invalidité (A), des pensions alimentaires (B) et des rentes viagères (C). D’autres types de pensions sont, en revanche, exonérées d’impôt sur le revenu (D).
A – Les pensions de retraite et d'invalidité
Sont imposables à l’impôt sur le revenu les pensions de retraite proprement dite (1), ainsi que les pensions d’invalidité (2).
1 – Les pensions de retraite
Les pensions de retraite passibles de l’impôt sur le revenu correspondent à toutes les allocations, rentes ou indemnités allouées soit en récompense de services rendus durant la vie active, soit à raison de droits acquis lors de la constitution d'une retraite, soit pour assurer des ressources aux personnes ayant atteint un certain âge et dont le paiement est, le plus souvent, garanti au bénéficiaire sa vie durant (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-10-10-10 du 12/09/2012). Constituent, notamment, de telles pensions les pensions civiles et militaires servies par l'État, les sommes perçues au titre de l'assurance vieillesse des différents régimes de sécurité sociale, les pensions servies par les régimes complémentaires de retraite et de prévoyance (AGIRC, ARRCO, IRCANTEC, …) ou, encore, les pensions servies aux élus locaux par le régime de retraite complémentaire des agents non titulaires des collectivités publiques. Sont, également, imposables, dans les mêmes conditions, un certain nombre de prestations de retraite qui font, par exception au principe du versement sous forme de rente, l’objet d’un versement sous forme de capital : par exemple, les retraites de faible montant versées par les régimes ou contrats de retraite en France ou à l’étranger qui font, par exception, l’objet d’une liquidation non pas sous forme de rente viagère mais d’un versement unique, les prestations servies au titre des plans épargne retraite populaire (Perp), …
Les sommes soumises à l'impôt, au titre de ce type de revenus, comprennent la totalité de la prestation, à savoir, d’une part, la pension principale et, d’autre part, les avantages accessoires en argent ou en nature concédés au titulaire de la pension ou à ses ayants droit. Sont, ainsi, à retenir à titre d'avantages accessoires, notamment : les majorations pour conjoint à charge, les majorations de retraite ou de pension allouées en considération du nombre d'enfants à charge, la mise à la disposition du pensionné d'un logement ou d'attributions gratuites ou à prix réduit de gaz, d'électricité ou d'autres éléments.
2 – Les pensions d’invalidité
Les allocations, rentes ou indemnités servies, tant à l'intéressé lui-même qu'à ses ayants cause, à raison d'une infirmité ayant entraîné soit une invalidité, soit le décès, constituent, en principe, des pensions passibles de l'impôt sur le revenu (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-10-10-20 du 12/09/2012). Il en va ainsi, notamment, des pensions servies par les régimes de sécurité sociale et par les régimes complémentaires obligatoires (qui sont, toutefois, exonérées en dessous d’un certain seuil lorsqu’elles sont servies par un régime général), des avantages servis par les organismes de retraite ou de prévoyance dans le cadre de contrats collectifs et obligatoires ou, encore, des indemnités journalières versées par les régimes complémentaires obligatoires d'assurance invalidité-décès des travailleurs non-salariés. Les sommes soumises à l'impôt comprennent non seulement la pension principale, mais aussi les avantages accessoires, en nature ou en argent, qui lui sont adjoints.
B – Les pensions alimentaires
Les dispositions du code civil fixent les cas où il existe, à l'égard de certaines personnes, une obligation de fournir des « aliments » à d'autres personnes. Cette obligation concerne, essentiellement, les relations entre parents et enfants et les relations entre époux et ex-époux. Sur le plan fiscal (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-10-30 du 12/09/2012), les pensions alimentaires, qui découlent de cette obligation, sont, en principe, imposables à l’impôt sur le revenu au nom de leur bénéficiaire quelle que soit leur périodicité (mensuelle, trimestrielle, annuelle) ou la forme de leur versement (en espèces ou en nature). Plus précisément, ces pensions sont imposables entre les mains de celui qui les reçoit dès lors qu’elles sont déductibles du revenu global de celui qui les verse. Dans le cas contraire, elles ne sont, en principe, pas imposables.
Les plus fréquentes sont les pensions servies par les enfants ou enfants adoptifs à leurs parents ou parents adoptifs dans le besoin, et réciproquement, les pensions versées à l'époux dans le besoin en cas de séparation de corps ou, encore, les pensions servies en cas de divorce pour l'entretien et l'éducation des enfants.
C – Les rentes viagères
Les rentes viagères correspondent aux allocations périodiques qu'une personne, appelée débirentier, verse en exécution d'engagements contractuels à une autre personne, appelée crédirentier. Le versement de la rente viagère est interrompu par le décès du crédirentier. Ces rentes peuvent être constituées à titre gratuit ou à titre onéreux. Dans la première hypothèse, il n’y a aucune contrepartie en échange de la rente promise : c'est, par exemple, le cas de la rente viagère constituée en dot par un père à son enfant. Dans la seconde hypothèse, l’obligation contractée par le débirentier a pour contrepartie soit le versement d'un capital en argent, soit l'aliénation d'un bien, meuble ou immeuble : les plus célèbres de ces rentes sont, ainsi, celles perçues en contrepartie de la vente d'un immeuble, d'un fonds de commerce, de la nue-propriété de biens ou de la cession de parts de sociétés appartenant au crédirentier.
Sur le plan fiscal (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-10-40 du 02/05/2014), toutes les rentes viagères, qu'elles soient versées en exécution d'un contrat, d'une disposition testamentaire ou d'un jugement, sont imposables et ce principe de taxation s’applique tant aux arrérages, qu'ils soient payés en argent ou en nature, qu’aux avantages consentis au crédirentier. Demeurent sans influence sur le champ d'application de l'impôt tant le fait que les rentes soient constituées à titre gratuit ou à titre onéreux que le fait qu’elles soient constituées sur une ou plusieurs têtes. Sont, toutefois, exonérées les rentes viagères servies en vertu d'obligations légales aux victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, ou à leurs ayants droit, ainsi que les rentes viagères servies en représentation de dommages-intérêts aux victimes d'une incapacité permanente totale, en vertu soit d'une condamnation judiciaire, soit d'une transaction avec la compagnie d'assurances en cas d'accident de la circulation.
D – Les pensions de retraite et d'invalidité exonérées
Diverses mesures législatives exonèrent d'impôt sur le revenu certaines allocations ou prestations relatives aux pensions de vieillesse et de retraite, aux pensions d'invalidité et aux rentes viagères (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-20 du 12/09/2012). Il est possible d’en citer quelques exemples.
Au titre des pensions de retraite et de vieillesse et sommes versées à titre de réparation sont, ainsi, exonérées : l’allocation personnalisée d’autonomie, les avantages de vieillesse non contributifs (prestations constitutives du minimum vieillesse, allocation de solidarité aux personnes âgées – ASPA, …), la retraite du combattant accordée en témoignage de la reconnaissance nationale, les retraites mutualistes servies aux anciens combattants et victimes de la guerre, …
Au titre des pensions d’invalidité sont, également, exonérées : les pensions militaires d’invalidité et les pensions des victimes de la guerre (pensions militaires d’invalidité proprement dites, allocation temporaire aux grands invalides, allocations aux grands mutilés de guerre, indemnités de soins aux tuberculeux, pensions de veuve de guerre), les prestations et rentes viagères servies pour accidents du travail ou maladies professionnelles par les régimes obligatoires de sécurité sociale, les pensions d’invalidité versées par les régimes de sécurité sociale (sous conditions de seuil de revenus), …
Enfin, la pension temporaire d’orphelin, accordée à chaque orphelin jusqu'à l'âge de vingt et un ans et qui est fonction de la pension obtenue par le parent décédé ou qu'il aurait pu obtenir au jour du décès, est exonérée à hauteur du montant des prestations familiales auxquelles aurait eu droit le parent décédé, de la partie de la pension remplaçant, du fait de la loi, l’allocation aux adultes handicapés et de la rente d’invalidité que perçoit l’enfant concerné.
II – Le calcul du revenu imposable
Les modalités de calcul du revenu imposable varient selon qu’il s’agit de pensions / rentes viagères à titre gratuit (A) ou de rentes viagères à titre onéreux (B).
A – Les pensions et rentes viagères à titre gratuit
Le revenu brut des pensions et des rentes viagères à titre gratuit est constitué par le montant total des arrérages perçus en espèces ou en nature durant l'année d'imposition. Le montant net s'obtient en retranchant de ce revenu certaines menues dépenses effectuées en vue de l’acquisition du revenu (telles que les frais d'encaissement, les frais de certificat de vie exigé pour le paiement, les frais de procès engagés pour obtenir le paiement ou la revalorisation de la pension et les honoraires correspondant aux prestations d'assistance rendues pour l'accomplissement de la liquidation des droits à la retraite) et les cotisations de sécurité sociale lorsque, exceptionnellement, elles n'ont pas déjà été retenues sur le montant de la pension (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-30-10 du 11/12/2012). S’applique, ensuite, un abattement de 10 %, qui comporte un minimum de 442 € pour chacun des titulaires de pension et un plafond de 4 321 € par foyer fiscal (seuils applicables pour les revenus de 2023).
Il convient, enfin de noter que les prestations de retraite versées sous forme de capital sont soumises au barème progressif de l’impôt sur le revenu dans les mêmes conditions que les autres pensions. Elles peuvent, toutefois, sur demande expresse et irrévocable du bénéficiaire, être soumises à un prélèvement libératoire de 7,5 % assis sur le montant du capital diminué d'un abattement de 10 % à condition que le versement ne soit pas fractionné et que le bénéficiaire justifie que les cotisations versées durant la phase de constitution des droits étaient déductibles de son revenu imposable.
B – Les rentes viagères à titre onéreux
Les rentes viagères constituées à titre onéreux résultent d'un contrat par lequel le crédirentier a volontairement accepté de se dessaisir d'un élément de son patrimoine, bien mobilier (somme d'argent par exemple) ou immobilier, en contrepartie de versements en espèces échelonnés dans le temps (arrérages). Le législateur a donc exonéré d'impôt la quote-part des arrérages qui est censée correspondre au remboursement partiel du capital initial (BOFIP n° BOI-RSA-PENS-30-20 du 11/07/2017).
Le Code général des impôts prévoit que les rentes viagères constituées à titre onéreux ne sont considérées comme un revenu, pour l'application de l'impôt sur le revenu dû par le crédirentier, que pour une fraction de leur montant. Cette fraction, déterminée d'après l'âge du crédirentier lors de l'entrée en jouissance de la rente, est fixée à : 70 % si l'intéressé est âgé de moins de 50 ans, 50 % s'il est âgé de 50 à 59 ans inclus, 40 % s'il est âgé de 60 à 69 ans inclus et 30 % s'il est âgé de plus de 69 ans.
