Les stocks et les productions en cours (fiche thématique)

Introduction

Les stocks au sens général du terme constituent une composante de l’actif dit « circulant » par opposition à l’actif immobilisé qui comprend l’ensemble des immobilisations incorporelles, corporelles et financières. Ils se composent, d’une part, des marchandises, des matières premières, des matières et fournitures consommables, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels, des emballages non destinés à être récupérés et, d’autre part, des productions en cours.

Les règles qui les gouvernent répondent à un objectif fiscal précis : déterminer le résultat fiscal des entreprises. En effet, l’article 38 – 2 du Code général des impôts (CGI) prévoit que « le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. » La valeur des stocks à la clôture de l'exercice constitue, donc, un élément essentiel pour la détermination du bénéfice imposable. Ainsi, s’explique qu’ils doivent, obligatoirement, faire l’objet, chaque année, d’un inventaire à l’occasion duquel il doit être procédé à leur évaluation.

Pour pouvoir mettre en œuvre ces exigences fiscales, il convient, donc, de définir ce qu’il faut entendre par stocks et productions en cours (I) et de déterminer, ensuite, les modalités qui gouvernent leur évaluation (II).

I – La définition des stocks et des productions en cours

Les stocks et les productions en cours sont composés d’un ensemble d’éléments (A) et répondent à deux critères d’identification (B).

A – Les éléments constitutifs

La notion générale de stock (n° 1 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-PDSTK-20-10 du 12/09/2012) fait l’objet d’une approche qui diffère selon qu’il s’agit de la règlementation comptable ou de la règlementation fiscale (1). Son analyse commande de distinguer les stocks proprement dit et les productions en cours (2).

1 – Les approches comptable et fiscale

Si elles se recoupent en partie, les approches comptable et fiscale de la notion de stock présentent certaines différences.

Du point de vue comptable, un stock est un actif détenu pour être vendu dans le cours normal de l’activité, ou en cours de production pour une telle vente, ou destiné à être consommé dans le processus de production ou de prestations de services dont la fourniture interviendra ultérieurement. Les stocks, qui constituent un des éléments de l’actif, doivent, par conséquent, répondre aux critères généraux de définition des actifs prévues par le plan comptable général. Ce texte retient, notamment, la notion de contrôle de l’entreprise sur l’actif concerné et non la notion de propriété que privilégie le droit fiscal. Le contrôle de l’entreprise sur un stock peut, par exemple, résulter d’un transfert des risques attachés à ce stock, avant ou après la date du transfert juridique de propriété.

Sur le plan fiscal, aux termes des dispositions de l’article 38 ter de l’Annexe III du CGI, les stocks sont constitués par l’ensemble des marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables, productions en cours, produits intermédiaires, produits finis, produits résiduels et emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l’entreprise à la date de l’inventaire et dont la vente en l’état ou au terme d’un processus de production à venir ou en cours permet la réalisation d’un bénéfice d’exploitation.

2 – La distinction stocks / productions en cours

Les stocks et les productions en cours doivent être distingués en ce qu’ils possèdent des caractéristiques différentes, mais aussi en raison de leur méthode d’évaluation qui diffère.

Les stocks proprement dit comprennent les marchandises, les matières premières, les matières et fournitures consommables, ainsi que les emballages commerciaux (qu’il s’agisse des emballages perdus destinés à être livrés avec leur contenu sans consignation ni reprise ou des emballages récupérables dès lors qu’ils ne sont pas commodément identifiables). L’on y classe, également, les produits, à savoir : les produits intermédiaires qui sont les produits qui, ayant atteint un stade d'achèvement, sont destinés à entrer dans une nouvelle phase du cycle de production, les produits finis qui sont ceux qui ont atteint un stade d'achèvement définitif dans le cycle de production et les produits résiduels qui sont constitués par des déchets et des rebuts de fabrication.

Les productions en cours se distinguent des stocks proprement dit en ce qu’il s’agit de produits ou de travaux en voie de formation ou de transformation à la clôture de l'exercice, c’est-à-dire de travaux qui sont inachevés à la clôture de l'exercice, parce qu’ils n'ont ni fait l'objet, en totalité ou en partie, d'une réception provisoire, ni été mis à la disposition du maître d'œuvre. Les productions en cours se rencontrent, notamment, chez les entrepreneurs de bâtiments ou de travaux publics et dans les entreprises effectuant des travaux sur des matériels qui leurs sont confiés. Par exemple, les entreprises de travaux publics et du bâtiment ne peuvent comprendre dans leur stock les matières premières et marchandises qui, à la date de l'inventaire, sont déjà sorties des magasins et sont spécialement affectées à des marchés de travaux en cours d'exécution, mais doivent les comptabiliser dans les productions en cours. 

B – Les critères d'identification

Pour être qualifié fiscalement de stock (n° 80 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-PDSTK-20-10 du 12/09/2012), un bien doit être la propriété de l’entreprise (1) et ne pas constituer une immobilisation (2).

1 – Le critère de la propriété

Pour être enregistré en stocks, les biens doivent être la propriété de l'entreprise à la date de l'inventaire. À cet égard, les difficultés, qui pourraient se présenter touchant leur situation exacte à la clôture de l'exercice, doivent être résolues conformément aux dispositions du Code civil, et notamment son article 1583 selon lequel la vente « est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

Des difficultés peuvent se poser quand il existe une différence entre la date du transfert juridique de propriété et la date de transfert du contrôle sur les biens vendus. En pareille hypothèse, le plan comptable commande d’enregistrer, lors de l’inventaire, les biens dont l’entreprise a le contrôle sans en être juridiquement propriétaire. Il est, alors, nécessaire de neutraliser l’impact fiscal de cette inscription anticipée des stocks à l’actif (par exemple, les provisions) par une rectification extra-comptable. Il en va de même pour les cas où l’inventaire exclurait des biens dont l’entreprise est propriétaire, parce qu’elle ne disposerait pas de leur contrôle effectif. De tels retraitements ne sont susceptibles de se rencontrer que lorsque, par exemple peu de temps avant la date de l’inventaire, une entreprise acquiert des biens du point de vue juridique pour lesquels le vendeur continue à assumer les risques principaux jusqu’à la date effective de livraison, les biens en cause n’étant livrés qu’au début de l’exercice suivant.

2 – Le critère de non-immobilisation

Seuls les biens qui, eu égard à l'objet de l'entreprise (et non à la nature des produits), sont destinés à être revendus en l'état ou après exécution d'opérations de fabrication ou de transformation et dont la vente permet la réalisation d'un bénéfice d'exploitation, peuvent être considérés comme des stocks. Cette définition s’oppose à celle des immobilisations qui sont des biens destinés à servir de façon durable pour l’activité de l’entreprise et qui ne se consomment pas par le premier usage.

Cette distinction peut être illustrée par les emballages commerciaux qui sont les objets destinés à contenir les produits ou marchandises livrés à la clientèle en même temps que leur contenu, et par extension, tous ceux employés dans le conditionnement des matières, fournitures ou marchandises livrées à la clientèle. Les emballages non récupérables, c’est-à-dire, tous les objets destinés à être livrés à la clientèle avec leur contenu sans consignation ni reprise (boîtes de conserve, flacons, bouteilles en matière plastique, caissettes, …) sont en comprendre dans les stocks, car ils perdent leur utilité pour l’entreprise dès le premier usage. A l’inverse, les emballages récupérables, c’est-à-dire les emballages susceptibles d'être conservés provisoirement par la clientèle et que le livreur s'engage à reprendre dans des conditions déterminées, sont à comptabiliser en immobilisation dès lors qu’ils sont commodément identifiables (bouteilles de gaz, containers, …) :  en effet, en pareille hypothèse, ces emballages sont susceptibles de réemploi et peuvent, donc, servir durablement l’activité de l’entreprise.

II – L'évaluation des stocks et des productions en cours

Selon l’article 38 – 2 du CGI, « le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. » La valeur des stocks à la clôture de l'exercice constitue, donc, un élément essentiel pour la détermination du bénéfice imposable.

Ainsi, s’explique, d’une part, l’obligation pour les entreprises d'effectuer un inventaire physique de leurs stocks au moins une fois par an (art. L 123-12 du Code de commerce) et, d’autre part, l’encadrement de leur évaluation par le Code général des impôts. Ces deux opérations permettent, en effet, d’évaluer les stocks et donc de calculer le bénéfice de l’entreprise sur la base de l’article 38 – 2 du CGI.

Il convient, alors, d’étudier la valorisation des stocks (A) et celle des productions en cours (B).

A – L'évaluation des stocks

Les stocks proprement dit sont, en principe, évalués à leur coût de revient (1). Toutefois, si leur valeur sur la base du cours du jour apparaît inférieure, il y a lieu de constater une provision pour dépréciation (2).

1 – La valorisation des stocks

Les stocks proprement dits doivent, à la clôture de chaque exercice, être évalués à leur coût de revient ou d'après le cours du jour à la date de l'inventaire si ce cours est inférieur au coût de revient (art. 38 – 3 du CGI). Le prix de revient d’un bien en stock est calculé différemment selon qu’il s’agit d’un bien acquis à titre onéreux ou d’un bien produit par l’entreprise (art. 38 nonies de l’Annexe III du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-PDSTK-20-20-10-10 du 12/09/2012).

Dans le cas d’un bien acquis à titre onéreux, les méthodes d’évaluation comptable et fiscale son identiques. Le coût de revient s’entend du prix d’achat minoré des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des frais de transport, de manutention et autres coûts directement engagés pour l’acquisition des biens. Le prix d'achat correspond au prix facturé, déduction faite des rabais ou ristournes qui ont pu être consentis par le fournisseur, mais augmenté des frais accessoires d'achat, tels que frais de transport ou droits de douane. Parmi les frais de transports, de manutention et les coûts directement engagés pour l'acquisition des biens, il convient de comprendre, de manière plus générale, tous les coûts qui peuvent être considérés comme directement engagés pour la réalisation de l’acquisition des biens, notamment : les dépenses de transports, les droits de douane, les commissions sur achats versés dans le cadre d'un contrat de fournitures générales. En revanche, la prise en compte des coûts indirects d’acquisition est exclue, dont les coûts administratifs.

Dans le cas des biens produits par l’entreprise, il convient de retenir, sur le plan comptable comme sur le plan fiscal, le coût de production. Celui-ci comprend les coûts directement engagés pour la production et les frais indirects de production variables ou fixes, ainsi que, sur option, les frais financiers. Les charges directes de production s'entendent des coûts directement liés aux unités produites, tels que la main-d'œuvre directe (salaires, charges sociales, droits à congés payés, compléments de rémunération) et les coûts des matières premières et fournitures consommées. Les charges indirectes de production comprennent, notamment, les amortissements pour dépréciation des bâtiments, de l'équipement industriel et des machines utilisés pour le cycle de production (à l’exclusion des amortissements dérogatoires) et les frais de production variables qui varient directement ou presque en fonction de la production, tels que la main d'œuvre indirecte ou les matières premières indirectes. Sont, en revanche, exclues les charges correspondant aux pertes et gaspillages, les frais généraux administratifs (à l'exception, toutefois, des frais d'administration et de gestion des sites de production) ou, encore, les frais de commercialisation.

2 – Le constat d’une provision pour dépréciation

En application de l’article 38 – 3 du CGI, l'évaluation du stock est faite au prix de revient ou au cours du jour s'il est inférieur au prix de revient. Le cours du jour s’entend du prix auquel les matières premières ou produits considérés seraient vendus sur le marché à la date de l'inventaire. Il résulte, en général, des tarifs en vigueur à la date de l'inventaire ou des mercuriales publiées à la même date ou à la date la plus rapprochée de celle de l'inventaire. Les marchandises qui ne font pas l'objet d'un marché régulier et pour lesquelles il n'existe pas de cours notoirement connu ne peuvent être, en principe, évaluées au-dessous du prix de revient que si elles ont subi une dépréciation certaine, par suite de circonstances telles que : détériorations matérielles, changements de mode ou pertes de débouchés. En pareil cas, la règle de l'évaluation d'après le cours du jour conduit à estimer ces marchandises à leur valeur probable de réalisation.

Si le cours du jour est inférieur au prix de revient, l’entreprise a l’obligation de constater, dès la clôture de l’exercice et sans attendre la revente des produits en stock, une provision pour dépréciation à concurrence de la différence entre le coût de revient des stocks et le cours du jour à la date de l’inventaire (art. 38 decies de l’Annexe III du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-PDSTK-20-20-10-20 du 23/09/2013). Toutefois, les entreprises peuvent également appliquer une décote directe à la valeur de leurs stocks, en application des dispositions de l’article 38 – 3 du CGI. Pour être déductible, la provision doit, en principe, correspondre à une perte ou une charge nettement précisée et être évaluée avec une approximation suffisante. Cependant, l’évaluation selon des procédés forfaitaires est autorisée si elle présente un caractère d'approximation suffisante et ne résulte pas de l'application d'un pourcentage arbitraire n'ayant aucun rapport avec la probabilité de la perte. Cette dernière méthode constitue une simple dérogation à la règle et ne concerne que les petites entreprises.

A la clôture des exercices ultérieurs, les entreprises doivent assurer le suivi des provisions ainsi constatées. Si la dépréciation du stock s’est accrue, il convient de constater une dotation complémentaire. Dans le cas contraire, il est nécessaire de procéder à une reprise de tout ou partie de la provision. Dans l’hypothèse où le stock objet de la provision sort de l’actif, l’entreprise doit constater la perte en charge (son montant pouvant être différent de celui de la provision) et reprendre la totalité de la provision.

B – L'évaluation des productions en cours

Les productions en cours (BOFIP n° BOI-BIC-PDSTK-20-20-20 du 12/09/2012) sont évaluées à leur coût de revient (1). Lorsqu'une opération s'avère déficitaire à la clôture d’un exercice, une provision pour perte sur travaux en cours peut être constituée, mais son montant déductible sur le plan fiscal est limité (2).

1 – La valorisation des productions en cours

Les productions en cours sont évaluées, tant sur le plan comptable que sur le plan fiscal, à leur coût de revient. Celui-ci s’entend du coût de production, lequel comprend les coûts directement engagés pour la production ainsi que les frais indirects de production variables ou fixes, et, sur option, les frais financiers (art. 38 nonies de l’Annexe III du CGI).

Ce prix de revient, qui ne peut être inférieur à la somme des frais exposés et des charges supportées pour l'exécution des travaux à la clôture de l'exercice, comprend : le coût des matériaux utilisés, de la main-d'œuvre et des frais de chantier ; le coût des matériaux approvisionnés sur le chantier et non encore utilisés ; et une quote-part des frais généraux du siège et des amortissements, dans la mesure où ces frais peuvent être considérés comme se rapportant à des dépenses engagées pour l'exécution desdits travaux.

2 – Le constat d’une provision pour perte

La provision pour perte sur opération en cours ne concerne que les opérations relatives à la production de biens ou de services en cours de formation ou de transformation à la clôture de l'exercice au travers d'un processus de production.

Il y a lieu de constater un telle provision lorsque, à la clôture de l’exercice, le coût de revient des travaux exécutés excède la valeur de vente de ces mêmes travaux augmentée des révisions de prix contractuelles certaines à cette date. Le prix de vente des travaux exécutés à la clôture de l'exercice correspond, en principe, pour les entreprises de travaux publics et du bâtiment, au montant des « situations acceptées » augmenté des révisions de prix contractuelles pouvant être considérées comme certaines à cette date (fixées selon les termes du contrat ou acceptées par le client). Si des travaux ont été exécutés après la date de présentation de la dernière situation établie avant la clôture de l'exercice, la valeur de vente de ces travaux doit être ajoutée aux situations antérieures. Si le contrat ne permet pas de déterminer avec certitude le montant du prix de vente des travaux exécutés à la clôture de l'exercice, l'entreprise doit déterminer sous sa responsabilité le prix de vente de ces travaux de la manière la plus appropriée.

La déduction de cette provision est, sur le plan fiscal, limitée à la différence, ainsi, constatée entre le coût de revient des travaux réalisés à la clôture de l'exercice et le prix de vente de ces mêmes travaux. En d'autres termes, seule la fraction de la perte correspondant aux travaux exécutés à la clôture d'un exercice et non la perte globale prévisible sur l'ensemble de l'opération, peut faire l'objet d'une provision fiscalement déductible.