Introduction

Parmi tous les crédits d’impôt institués en vue de soutenir certains secteurs ou activités, le crédit d’impôt recherche (CIR) est, sans aucun doute, le plus couteux : 6 milliards d’euros par an en moyenne. Instauré en 1983, le CIR est une mesure fiscale destinée à soutenir les entreprises dans leur démarche de recherche et développement (R&D) en couvrant une partie des dépenses engagées. Il s’agit, notamment, d’accroître la compétitivité de l’appareil productif français, de servir de levier à la recherche privée et d’inciter les entreprises à embaucher du personnel scientifique.

Ce crédit d’impôt (dont le régime est fixé à l’article 244 quater B du Code général des impôts – CGI et au Bulletin officiel des finances publiques – BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10 du 13/07/2021) s’adresse aux entreprises industrielles, commerciales et agricoles imposées d'après leur bénéfice réel, de droit ou sur option, qu’elles soient soumises à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu, et ce, quel que soit leur mode d'exploitation (entreprise individuelle, société artisanale, société à responsabilité limitée, société anonyme, ...). Pour être éligibles au dispositif, ces entreprises doivent mener des activités de R&D, c’est-à-dire des activités de recherche fondamentale, de recherche appliquée ou de développement expérimental.

Le CIR est calculé à partir d’un ensemble de dépenses (amortissements, dépenses de personnel, dépenses sous-traitées auprès d’organismes de recherche ou d’experts scientifiques ou techniques, …) dont la somme est multipliée par un taux, qui est, généralement, de 30 %, pour obtenir le montant du crédit. Celui-ci vient, ensuite, s’imputer sur le montant de l’impôt sur les bénéfices du. Le CIR peut, également, dans certaines hypothèses, donner lieu à une restitution immédiate.

A côté de ce dispositif, le législateur a également institué trois crédits d’impôt annexes : le crédit d’impôt innovation, le crédit d’impôt pour frais de collection et, plus récemment, le crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative.

Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, le champ d’application du CIR (I), d’analyser, dans une deuxième partie, le calcul du CIR (II), d’examiner, dans une troisième partie, le contrôle du CIR (III) et de se pencher, dans une quatrième partie, sur les crédits d’impôt annexes au CIR (IV).

I – Le champ d'application du CIR

Pour bénéficier du CIR, les entreprises doivent réaliser une activité de recherche et développement (A). Celle-ci doit, en outre, satisfaire 5 critères cumulatifs (B).

La définition des opérations éligibles audit crédit d'impôt s’appuie sur le Manuel de Frascati élaboré par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et dont la dernière édition date de 2015. Ce texte constitue la référence internationale pour la définition du périmètre des activités de R&D et leur mesure par les statistiques nationales. Celui-ci définit, ainsi, les activités de R&D comme « les activités créatives et systématiques entreprises en vue d’accroître la somme des connaissances - y compris la connaissance de l’humanité, de la culture et de la société - et de concevoir de nouvelles applications à partir des connaissances disponibles » (Manuel de Frascati, § 2.5).

A - Les activités de R&D

Trois types d’activités sont regardées comme des opérations de recherche scientifique ou technique éligibles au CIR (art. 49 septies F Annexe III du CGI) : les activités de recherche fondamentale (1), les activités de recherche appliquée (2) et les activités de développement expérimental (3). Des exemples de ces activités pourront, ensuite, être donnés (4).

1 – Les activités de recherche fondamentale

Selon le Manuel de Frascati, la recherche fondamentale consiste en des travaux expérimentaux ou théoriques entrepris principalement en vue d’acquérir de nouvelles connaissances sur les fondements des phénomènes et des faits observables, sans envisager une application ou une utilisation particulière (§ 2.25).

Le CGI traduit, fiscalement, cette définition à l’article 49 septies F a de son Annexe III : il s’agit, ainsi, des « activités ayant un caractère de recherche fondamentale qui concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse » (n° 20 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021).

2 – Les activités de recherche appliquée

La recherche appliquée consiste en des travaux de recherche originaux entrepris en vue d’acquérir de nouvelles connaissances et dirigés principalement vers un but ou un objectif pratique déterminé (Manuel de Frascati, § 2.29).

Aux termes de l’article 49 septies F b de l’Annexe III du CGI, « les activités de recherche appliquée sont celles qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode » (n° 40 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021). Ces modèles permettent de vérifier expérimentalement les hypothèses de départ d’une recherche appliquée. Ils sont destinés à apporter la preuve que les recherches pourront ou non être poursuivies au stade du développement incluant la construction d'un prototype ou d’une installation pilote. Ils se distinguent notamment des prototypes par le fait qu'ils ne s'intéressent qu'à la levée de doutes scientifiques ou techniques, sans la préoccupation de représenter le produit, l’opération ou la méthode dans son état final.

3 – Les activités de développement expérimental

Le développement expérimental consiste en des travaux systématiques - fondés sur les connaissances tirées de la recherche et l’expérience pratique et produisant de nouvelles connaissances techniques - visant à déboucher sur de nouveaux produits ou procédés ou à améliorer les produits ou procédés existants (Manuel de Frascati, § 2.32).

Selon l’article 49 septies F c de l’Annexe III du CGI, « les activités de développement expérimental sont celles qui sont effectuées au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. On entend par amélioration substantielle les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes dans le domaine et qui présentent un caractère de nouveauté. »

Composante généralement la plus importante de la R&D des entreprises, le développement expérimental a pour but la mise au point de plans ou de modèles devant déboucher sur des produits ou procédés nouveaux ou nettement améliorés, que ce soit pour la vente ou l’utilisation propre de l’entreprise. S’appuyant sur des recherches antérieures ou sur l’expérience pratique, il comprend la formulation d’un concept, la conception et la mise à l’essai de produits de substitution, et peut aussi englober la construction de prototypes et le lancement d’une installation-pilote (n° 70 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021).

La conception, la construction et les essais des prototypes / installations pilotes entrent dans le cadre des opérations de R&D tant qu'il s’agit de lever les incertitudes scientifiques et/ou techniques permettant d’améliorer le produit ou le procédé visé et d’en fixer les caractéristiques (n° 130 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-25 du 13/07/2021). Lorsque ce stade est dépassé, l’opération ne peut plus être considérée comme une activité de recherche et développement. Par exemple, dans le secteur de la pharmacie, préalablement à la mise sur le marché de médicaments, de vaccins ou de traitements nouveaux, il est nécessaire de procéder à des essais systématiques sur des volontaires afin de s’assurer que ces produits sont, à la fois, sûrs et efficaces. Ces essais cliniques se divisent en quatre phases standard. Les phases 1 à 3 précédant l’autorisation de mise sur le marché sont considérées comme des activités de R&D. En revanche, la phase 4, au cours de laquelle on continue à tester le médicament ou le traitement après autorisation de mise sur le marché, n’est, en principe, pas considérée comme appartenant aux activités de R&D, car les progrès scientifiques et/ou techniques ont déjà été réalisés lors des trois phases précédentes (n° 230 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-25 du 13/07/2021).

4 – Exemples d’activités de R&D dans trois domaines scientifiques

Des exemples des trois types d’activités de R&D peuvent être donnés dans trois domaines scientifiques (n° 100 et s. du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021).

Dans le domaine de la chimie avec des applications aux industries chimiques et des matériaux, le fait d’étudier une classe de réactions de polymérisation dans diverses conditions constitue une activité de recherche fondamentale. Les efforts entrepris pour optimiser l’une de ces réactions en vue d’obtenir un polymère doté de propriétés physiques ou mécaniques données (qui lui confèrent une utilité particulière) relèvent, eux, de la recherche appliquée. Le développement expérimental consiste, alors, à mettre en œuvre le procédé optimisé en laboratoire à une plus grande échelle, ainsi qu’à rechercher et à analyser les méthodes de fabrication éventuelles de ce polymère ainsi que les produits susceptibles d’être fabriqués dans ce matériau.

Dans le domaine des sciences exactes, naturelles et de l’ingénieur, ensuite, le fait de modéliser l’absorption du rayonnement électromagnétique par un cristal constitue une activité de recherche fondamentale. En revanche, l’étude de l’absorption du rayonnement électromagnétique par ce même matériau, à des conditions expérimentales variables (température, impuretés, concentration, ...) en vue d’obtenir certaines propriétés de détection du rayonnement (sensibilité, rapidité, ...), appartient à la recherche appliquée. La mise à l’essai d’un dispositif utilisant ce matériau en vue de fabriquer un détecteur de rayonnement plus performant que ceux existants (dans la gamme spectrale considérée) relève, elle, du développement expérimental.

Enfin, dans le domaine des sciences humaines et sociales, le fait d’élaborer de nouvelles théories du risque relève de la recherche fondamentale. Le fait d’étudier de nouveaux types de contrat d’assurance censés couvrir de nouveaux risques de marché ou de nouveaux types d’instruments d’épargne relève, lui, de la recherche appliquée. Et, la démarche qui consiste à définir un nouveau mode de gestion pour un fonds d’investissement relève du développement expérimental (sous réserve du respect des cinq critères définis par le Manuel de Frascati).

B - Les critères de la R&D

Pour être éligible au CIR, une opération doit, en outre, satisfaire 5 critères cumulatifs. Elle doit, ainsi, comporter un élément de nouveauté, comporter un élément de créativité, comporter un élément d’incertitude, être systématique et être transférable et/ou reproductible (n° 10 du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021).

Les deux critères fondamentaux permettant de distinguer la R&D des activités connexes sont le fait qu’une opération de R&D doit combiner un élément de nouveauté non négligeable avec la dissipation d’une incertitude scientifique et/ou technique (verrou scientifique). Autrement dit, l'opération de R&D doit viser à résoudre un problème dont la solution n’apparaît pas évidente à quelqu’un qui est parfaitement au fait de l’ensemble des connaissances, pratiques et techniques couramment utilisées dans le secteur considéré. Il ne doit donc pas s’agir de carences particulières, comme le fait de ne pas maîtriser les connaissances existantes ou les compétences techniques nécessaires au projet. Les opérations de R&D représentent, ainsi, un écart appréciable par rapport au savoir-faire de la profession ou aux pratiques généralement répandues dans le domaine d’application concerné (n° 40 du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-25 du 13/07/2021).

Pour procéder à cette appréciation, il convient de se référer à l'état des techniques existantes, dit état de l’art, que l’on peut définir comme l’état des connaissances scientifiques et/ou techniques accessibles au début des travaux et utilisables par l'homme du métier normalement compétent dans le domaine en cause sans qu'il ait besoin de faire preuve d'une activité inventive (n° 90 du BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 13/07/2021). Il convient, ici, de réaliser une recherche bibliographique (articles de journaux, de revues, actes de conférences scientifiques et/ou techniques, livres, livres blancs, mémoires de thèse, rapports de recherche externes à l’entreprise, brevets et bases de données techniques, …), ainsi qu’une analyse détaillée des approches théoriques ou pratiques existantes. Si le problème posé n’a pas trouvé de solution dans les connaissances accessibles, alors il s’agit d’un verrou scientifique nécessitant l’engagement d’une opération de R&D. En revanche, lorsqu’une ou plusieurs solutions identifiées dans l’état des connaissances accessibles permettent de contourner le verrou scientifique, les travaux ainsi entrepris sont qualifiés d’ingénierie et ne relèvent pas de la R&D et ne sont pas éligibles au CIR.

II – Le calcul du CIR

Pour déterminer le montant du CIR d’une entreprise, il convient d’évaluer les dépenses éligibles (A) et de procéder au calcul dudit crédit selon certaines modalités (B).

A – Les dépenses éligibles

Six catégories de dépenses peuvent être prises en compte dans la base de calcul du CIR : les amortissements (1), les dépenses de personnel (2), les frais de fonctionnement (3), les dépenses externalisées (4), les dépenses relatives aux brevets et certificats d’obtention végétale (5) et les dépenses de normalisation et de veille technologique (6).

1 – Les amortissements des immobilisations affectées à la recherche

Dès lors qu’elles sont fiscalement déductibles au sens de l’article 39 du CGI, les dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la R&D constituent des dépenses éligibles au CIR (art. 244 quater B II a du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-10 du 04/04/2014). Les immobilisations concernées peuvent être des immeubles, des biens autres que les immeubles, des brevets, des certificats d’obtention végétale, des dépenses de conception de logiciels liées, notamment, à des ordinateurs ou des logiciels intermédiaires de calcul.

Les immobilisations doivent, toutefois, respecter un certain nombre de conditions. Elles doivent, d’abord, avoir été créées ou acquises à l'état neuf. Elles doivent, ensuite, être affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche, y compris la réalisation de prototypes et d'installations pilotes. Il en va, ainsi, des biens qui permettent, en eux-mêmes, la réalisation des programmes de recherche de l'entreprise : tel est, notamment, le cas des instruments de manipulations, des instruments de calcul, des ordinateurs, des machines servant à fabriquer les pièces entrant dans la composition d'un prototype. En revanche, les biens non destinés spécifiquement à l'exécution des opérations de recherche n'ouvrent pas droit au crédit d'impôt : sont ainsi exclus les téléphones, le petit matériel de bureau, ainsi que les meubles de bureau.

Lorsque les immobilisations font l’objet d’un usage mixte (recherche / fabrication), les amortissements sont pris en compte au prorata du temps effectif d'utilisation des biens pour la recherche, à condition que l'entreprise puisse déterminer avec précision le temps d'utilisation du bien à des fins de R&D.

2 – Les dépenses de personnel

Les dépenses de personnel affecté directement aux opérations de recherche sont prises en compte pour le calcul du CIR (art. 244 quater B II b du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 du 13/07/2021).

Les personnels visés sont les chercheurs et les techniciens de recherche. Les chercheurs sont des scientifiques ou des ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Cette qualité est reconnue aux titulaires d’un diplôme de niveau master au minimum ou d’un diplôme équivalent. Toutefois, sont assimilés aux ingénieurs, les salariés qui, sans remplir les conditions de diplôme, ont acquis des compétences au sein de l'entreprise ou antérieurement les assimilant, par le niveau et la nature de leurs activités, aux ingénieurs impliqués dans les travaux de recherche. Les techniciens de recherche sont des personnes qui travaillent en étroite collaboration avec les chercheurs pour assurer les tâches nécessaires à la mise en œuvre des projets de recherche (préparation des substances, des appareils pour la réalisation d'expériences, exécution des expériences sous le contrôle des chercheurs, …). Leurs sont assimilés les stagiaires et les apprentis.

D’autres catégories de personnels sont, également, éligibles. Il en va, ainsi, des dirigeants d'entreprise, qu'ils soient salariés ou non. Ces derniers peuvent être assimilés à des chercheurs ou des techniciens de recherche s'ils participent effectivement et personnellement aux projets de recherche éligibles au CIR et à la condition que leur rémunération soit déductible du résultat fiscal. Les dépenses afférentes aux personnels de recherche dont l'entreprise n'est pas l'employeur, mais qui sont mis à sa disposition par une autre entreprise, ainsi que celles afférentes aux intérimaires sont, également, à prendre en compte, dès lors qu’ils sont des personnels de recherche directement affectés aux opérations de R&D. En revanche, le personnel de soutien est expressément exclu du champ d'application du CIR (activités administratives, de direction, juridiques et réglementaires, commerciales, de transport, d’entreposage, …).

Pour pouvoir être éligibles au CIR, les dépenses de personnel doivent constituer des charges fiscalement déductibles au sens de l’article 39 du CGI. Les personnels éligibles doivent, surtout, être directement affectés à des opérations de R&D. Lorsque cette affectation est partielle, les dépenses sont prises en compte au prorata du temps effectivement consacré à ces opérations. Les entreprises doivent pouvoir établir, avec précision et rigueur, le temps réellement et exclusivement passé à la réalisation d'opérations de recherche, toute détermination forfaitaire étant exclue.

Les dépenses de personnel comprennent les rémunérations et leurs accessoires, ainsi que les charges sociales dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations obligatoires. Sont donc pris en compte les salaires proprement dits, les indemnités de congés payés, les avantages en nature, les primes, ainsi que les cotisations sociales obligatoires. Par cotisations sociales obligatoires, il faut entendre les cotisations patronales légales ou conventionnelles à caractère obligatoire versées par l'entreprise, assises sur des éléments de rémunération éligibles au CIR et ouvrant directement droit, au profit des personnels concernés ou leurs ayants-droits, à des prestations et avantages. En d’autres termes, lorsque ces cotisations sont sans contrepartie directe pour les personnels de recherche concernés, elles ne sont pas prises en compte dans la base de calcul du CIR.

3 – Les autres dépenses de fonctionnement

Sont éligibles au CIR les frais de fonctionnement relatif aux opérations de recherche (art. 244 quater B II c du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-25 du 13/07/2021).

Ces frais sont fixés forfaitairement à la somme de 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations affectées directement aux activités de recherche et à la somme de 43 % des dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement affectés aux opérations de recherche.

4 – Les dépenses externalisées

Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de recherche et sous-traitées auprès d’organismes de recherche ou d’experts scientifiques ou techniques sont retenues, sous conditions, dans la base de calcul du crédit d'impôt de l'entreprise donneuse d'ordre (art. 244 quater B II d bis et d ter ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-30 du 13/04/2023).

Jusqu’au 31 décembre 2021, les organismes de recherche privés et les experts scientifiques et techniques devaient être agréés par le ministre chargé de la recherche pour que les dépenses puissent être prises en compte. Cet agrément n’était pas exigé pour la plupart des organismes publics, tels que les établissements d’enseignement supérieur délivrant un diplôme confiant le grade de Master, les communautés d’universités ou encore les centres techniques exerçant une mission d’intérêt général.

Depuis le 1° janvier 2022, tous les organismes de recherche (publics, assimilés publics ou privés) et experts scientifiques et techniques doivent être titulaires d'un agrément délivré par le ministre chargé de la recherche s’ils souhaitent se voir confier la réalisation d’opérations de recherche dont les dépenses ouvrent droit au CIR pour l’entreprise donneuse d'ordre.

Les dépenses engagées doivent être afférentes à de véritables opérations de R&D, nettement individualisées. Toutefois, les dépenses afférentes aux travaux scientifiques et techniques externalisées qui ne constituent pas en tant que tels des opérations de R&D, mais qui sont indispensables à la réalisation d'une opération de R&D éligible au CIR menée en interne par le donneur d'ordre, peuvent également être prises en compte dans la base de calcul du CIR de l'entreprise donneuse d'ordre (CE, 22/07/2020, FNAMS, n° 428127).

La réalisation de ces opérations peut, soit, être confiée complètement à un organisme de recherche tiers pour le compte d’une entreprise donneur d’ordre, soit menée dans le cadre d'une collaboration de recherche avec cet organisme où les deux parties partagent les risques et les résultats éventuels. Dans la première hypothèse, les organismes sous-traitants doivent réaliser directement les opérations qui leur sont confiées, mais par dérogation ils peuvent recourir, pour certains travaux indispensables aux opérations de recherche, à des organismes ayant la qualité de sous-traitant au regard du crédit d'impôt.

Les dépenses externalisées entrant dans l'assiette du crédit d'impôt font l’objet de deux plafonnements. Ainsi, elles ne sont retenues que dans la limite de trois fois le montant total des autres dépenses de recherche. Et, elles sont plafonnées à 10 M € par an en l'absence de liens de dépendance entre l'entreprise et l'organisme prestataire, et à 2 M € dans le cas contraire.

5 – Les dépenses relatives aux brevets et certificats d’obtention végétale

Les frais relatifs aux brevets et aux certificats d'obtention végétale ouvrent droit au crédit d'impôt recherche (art. 244 quater B II e et e bis du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-40 du 04/04/2014). Il est précisé, s’agissant des brevets, que seuls les frais afférents aux titres de propriété industrielle protégeant les inventions (à savoir les brevets proprement dits, les certificats d'utilité et les certificats d'addition rattachés à un brevet ou à un certificat d'utilité) sont pris en compte pour le calcul du crédit d'impôt, à l'exclusion par conséquent de ceux relatifs aux dessins, modèles et marques de fabrique.

Ces frais concernent, d’abord, la prise de brevets, tels que les honoraires versés aux conseils en brevets d'invention et aux mandataires auprès de l’INPI, les honoraires versés aux mandataires chargés du dépôt du brevet directement à l'étranger si le brevet est également déposé en France et les frais de traduction, le cas échéant.

Les frais de maintenance de brevets sont, quant à eux, limités, en principe, au montant de la taxe annuelle pour le maintien en vigueur des titres. Toutefois, il y a lieu d'admettre, également, les rémunérations versées en France et à l'étranger aux conseils et aux mandataires chargés de la surveillance des brevets et du paiement de la taxe annuelle de maintien en vigueur.

Enfin, les frais de défense de brevets et de certificats d'obtention végétale sont éligibles au CIR. Sont éligibles les dépenses exposées dans le cadre d'actions en contrefaçon menées par les entreprises, et notamment les frais de justice, dont les émoluments des auxiliaires de justice (avocats, experts judiciaires). Sont également éligibles les dépenses de personnel (dont les frais de mission) supportées par l'entreprise au titre de la défense de brevets. Ne sont, en revanche, pas éligibles les dépenses supportées par l'entreprise consécutivement à une condamnation pour contrefaçon (dommages et intérêts, dépens, amendes, …).

6 – Les dépenses de normalisation et de veille technologique

Deux dernières dépenses ouvrent droit au CIR : les dépenses de normalisation et les dépenses de veille technologique (art. 244 quater B II g et j ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-20-50 du 06/07/2016).

Les premières correspondent aux dépenses exposées par les entreprises à raison de la participation de leurs salariés aux réunions officielles de normalisation afférentes à l’élaboration de normes concernant les produits de l’entreprise. Il s’agit, également, des dépenses liées à la participation aux réunions officielles de normalisation des chefs d'entreprises individuelles, des associés d'une société soumise au régime fiscal des sociétés de personnes et des mandataires sociaux. Ces deux types de dépenses sont retenues pour la moitié de leur montant.

Les secondes sont les dépenses de veille technologique dès lors qu'elles sont liées à la réalisation d'opérations de recherche. La veille technologique est un processus de mise à jour permanent ayant pour objectif l'organisation systématique du recueil d'informations sur les acquis scientifiques, techniques et relatifs aux produits, procédés, méthodes et systèmes d'informations afin d'en déduire les opportunités de développement. Sont, ainsi, éligibles les dépenses d'abonnements à des revues scientifiques, à des bases de données, les dépenses d'achat d'études technologiques, ainsi que les dépenses de participation à des congrès scientifiques, les dépenses de personnel générées par la participation à ces congrès (versements de primes, d'indemnités, etc.) n'étant pas prises en compte lorsqu'elles constituent des dépenses de personnel déjà éligibles au crédit d'impôt recherche. L’ensemble de ces dépenses sont prises en compte dans la limite de 60 000 € par an et par entreprise.

B – Les modalités de détermination du CIR

Le CIR est déterminé par année civile, quelles que soient la date de clôture des exercices et leur durée. Pour procéder à ce calcul, les entreprises doivent souscrire, obligatoirement par voie électronique, la déclaration de crédit d'impôt recherche n° 2069-A-SD dans les mêmes délais que la déclaration annuelle de résultat.

Le calcul du CIR suppose, d’abord, de faire la somme des différentes dépenses éligibles réalisées par l’entreprise et de déduire de ce montant deux éléments (art. 244 quater B III du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-30-20 du 13/07/2021).

Le premier concerne les subventions publiques, entendues comme toutes aides versées par une personne morale de droit public, reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt. Celles-ci doivent, en effet, être déduites de l'assiette du crédit d'impôt, même lorsqu'elles sont remboursables. Plus précisément, cette déduction doit être opérée sur la base de calcul du CIR de l'année (ou des années) au cours de laquelle (ou desquelles) les dépenses éligibles que ces subventions ont vocation à couvrir sont exposées. Les aides remboursables sont, elles, ajoutées à la base de calcul du crédit d'impôt de l'année du remboursement, même si aucune dépense de recherche n'a été exposée cette année-là.

L'entreprise doit, également, déduire de la base de calcul les rémunérations versées à des tiers (cabinets, avocats, comptables, ...) pour des prestations de conseil rendues en vue de l'octroi du crédit d'impôt qui sont fixées proportionnellement au montant de l'avantage obtenu. Les rémunérations forfaitaires viennent, également, diminuer l'assiette du CIR lorsqu'elles excèdent 15 000 € ou, si ce montant est plus élevé, 5 % du total des dépenses de recherche éligibles minoré des subventions publiques.

Une fois ces deux sommes déduites, le CIR est calculé en appliquant à la base éligible un taux de 30 % sur la fraction des dépenses de recherche n'excédant pas 100 M € et de 5 % sur la fraction des mêmes dépenses supérieures à 100 M € (art. 244 quater B I du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-30-10 du 13/04/2023). Le premier de ces taux est porté à 50 % pour les dépenses de recherche engagées par des exploitations situées dans les départements d’outre-mer.

Le CIR peut, ensuite, faire l’objet de deux utilisations (BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-50 du 13/07/2021). Il peut, d’abord, être imputé sur l'impôt dû par l'entreprise au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche ont été exposées, après prise en compte des prélèvements non libératoires et autres crédits d'impôt. Lorsque l'exercice ne coïncide pas avec l'année civile, l'imputation se fait sur l'impôt dû au titre de l'exercice clos au cours de l'année suivante. Le crédit excédentaire non imputé constitue une créance sur l'État (non imposable) qui peut être utilisée pour le paiement de l'impôt sur les bénéfices du au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée. La fraction non utilisée à l'expiration de cette période est remboursée.

Certaines entreprises peuvent, toutefois, demander le remboursement immédiat de la créance : les PME au sens du droit de l’Union européenne (entreprises dont l’effectif salarié est inférieur à 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros), les entreprises nouvelles, les jeunes entreprises innovantes et les entreprises ayant fait l'objet d'une procédure de conciliation ou de sauvegarde, d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire (que la créance soit née ou non avant l'ouverture de la procédure).

III – Le contrôle du CIR

Le CIR peut faire l’objet d’un contrôle de la part de deux administrations (BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-60 du 13/07/2021) : le ministère chargé de la recherche (A) et l’administration fiscale (B).

A – Le contrôle des agents du ministère chargé de la recherche

La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR peut, d’abord, être vérifiée par les agents du ministère chargé de la recherche. Leur intervention peut résulter soit d'une initiative de ce ministère, soit d'une demande de l'administration fiscale lorsque l'appréciation du caractère scientifique des travaux apparaît nécessaire dans le cadre d'un contrôle ou d'un contentieux fiscal.

Dans le cadre de cette procédure, l'agent chargé du contrôle envoie à l'entreprise contrôlée une demande de pièces justificatives. Il s’agit d’obtenir les documents scientifiques et techniques nécessaires à l'appréciation de l'éligibilité des opérations de recherche réalisées en interne ou confiées à un prestataire, les justificatifs relatifs aux personnes affectées aux projets de recherche déclarés (qualification, temps passé), ainsi que les documents fiscaux et comptables relatifs aux dépenses déclarées. L'entreprise doit répondre dans un délai de trente jours, éventuellement prorogé de la même durée à sa demande. L'entreprise joint à sa réponse les documents nécessaires à l'expertise de l'éligibilité des dépenses.

Si les éléments fournis par l'entreprise en réponse à une première demande ne permettent pas de mener l'expertise à bien, l'agent peut envoyer à l'entreprise contrôlée une seconde demande d'informations à laquelle celle-ci doit répondre dans un délai de trente jours. Dans ce délai, l'entreprise a la faculté de demander un entretien afin de clarifier les conditions d'éligibilité des dépenses.

L'agent chargé du contrôle peut, également, se rendre sur place après l'envoi d'un avis de visite pour, notamment, consulter les documents comptables, ainsi que tous les documents annexes ou justificatifs, en vue de s'assurer de la réalité des dépenses affectées à la recherche, effectuer toute constatation matérielle, procéder à des vérifications techniques, en vue de s'assurer de la réalité de l'activité de recherche à laquelle les dépenses ont été affectées.

L'avis émis par l’agent chargé du contrôle sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR est, ensuite, notifié à l'entreprise. Il est motivé lorsque la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d’impôt est contestée. L'avis et, le cas échéant, les copies de documents ou autres éléments motivant cet avis sont communiqués aux services de la direction générale des finances publiques (DGFIP).

Lorsque l'entreprise n'a pas répondu aux demandes d'informations qui lui ont été adressées, lorsqu'elle a refusé de communiquer les pièces justificatives demandées ou lorsqu'elle n'a pas produit ces éléments en cas de visite sur place, les agents chargés du contrôle constatent que l'affectation des dépenses à la recherche n'est pas justifiée.

B – Le contrôle des agents de l'administration fiscale

Le CIR peut, également, être contrôlé par les agents de l’administration fiscale. Ceux-ci peuvent obtenir les mêmes documents et se rendre dans les locaux de l’entreprise, dans le cadre d’une procédure de contrôle fiscal externe, afin de procéder à l’examen circonstancié dudit crédit.

Dans tous les cas, l'administration fiscale demeure seule compétente pour l'application des procédures de rectification au CIR dans le cadre de l'exercice de son droit de contrôle. A cet effet, elle adresse à l'entreprise concernée une proposition de rectification motivée. A la suite de la réception de la proposition de rectification, le contribuable peut formuler des observations auxquelles l’administration fiscale doit répondre. Le contribuable dispose, ensuite, d’un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l’administration à ses observations pour demander la saisine du comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche. Le désaccord est soumis à l'avis du comité lorsqu'il résulte de rectifications notifiées dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire et qu'il porte sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR

Cette procédure doit respecter le délai de reprise. Celui-ci s’exerce jusqu’au terme de la troisième année suivant celle du dépôt de la déclaration spéciale n° 2069-A-SD prévue pour le calcul du CIR. Par exemple, pour un CIR calculé au titre de N, si la déclaration spéciale n° 2069-A-SD a été déposé en N+1, le délai de reprise de l'administration fiscale pourra s'exercer jusqu'au 31 décembre N+4.

IV – Les crédits d'impôt annexes au CIR

A côté du CIR, il existe trois autres crédits d’impôt plus spécifiques, mais qui obéissent à la même logique : le crédit d’impôt innovation (A), le crédit d’impôt pour frais de collection (B) et le crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative (C).

A – Le crédit d'impôt innovation – CII

Le crédit d’impôt innovation (CII), dont le régime est défini à l’article 244 quater B II k du CGI, s’applique aux opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits. Après avoir déterminé son champ d’application (1), il conviendra d’analyser sa méthode de calcul (2).

1 – Le champ d’application du CII

Pour déterminer le champ d’application du CII (BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-45-10 du 02/03/2016), il convient de définir les entreprises éligibles et les activités éligibles.

Les entreprises éligibles au CII sont les PME au sens du droit de l’Union européenne. Il convient, pour apprécier les données de l'entreprise (effectif, chiffre d'affaires et total du bilan), de se placer à la date de fin du dernier exercice clôturé au jour du dépôt de la déclaration spéciale de crédit d'impôt recherche n° 2069-A-1-SD. Lorsqu'une entreprise, à la date de clôture des comptes, dépasse le seuil de l'effectif ou les seuils financiers, cette circonstance ne lui fait perdre la qualité de PME que si elle se produit au titre de deux exercices consécutifs.

Pour être éligible au CII, l’entreprise doit, par ailleurs, réaliser des opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits. Deux notions qu’il faut définir.

En premier lieu, un nouveau produit est un bien corporel ou incorporel qui satisfait à deux conditions cumulatives :  il n'est pas encore mis à disposition sur le marché et il se distingue des produits existants ou précédents par des performances supérieures sur le plan technique, de l'éco-conception, de l'ergonomie ou de ses fonctionnalités.

Sur le premier point, les nouveaux produits visés sont, uniquement, les biens corporels ou incorporels. En effet, si le Manuel d’Oslo, qui est l'équivalent en matière d'innovation du Manuel de Frascati, distingue quatre catégories d’innovation (les innovations de produit, les innovations de procédé, les innovations de commercialisation et les innovations d’organisation), le dispositif du CII ne concerne que le premier type d’innovation lorsqu’il est, de surcroît, afférent à des biens (et non des services), tant corporels qu’incorporels.

Sur le second point, à savoir les deux conditions cumulatives qui doivent être remplies, il convient, d’abord, que le bien ne soit pas encore mis à disposition sur le marché. La portée géographique de la notion de nouveauté pour le marché dépend de l'environnement concurrentiel dans lequel opère l'entreprise et peut inclure par conséquent des entreprises tant nationales qu’internationales. Ainsi, pour qu'il y ait innovation, un produit ne doit pas déjà avoir été mis en œuvre par d'autres agents économiques opérant dans le même environnement concurrentiel. Dans le cas contraire, le produit n’est pas éligible au CII. Les performances du nouveau produit doivent, ensuite, être supérieures à celles des produits déjà commercialisés sur le marché. La supériorité des performances doit être sensible, c'est-à-dire qu'elle doit être observable et mesurable, par exemple au moyen de tests. Le nouveau produit doit, ainsi, être doté de performances supérieures sur le plan technique (fiabilité, précision, temps de réponse, vitesse, débit, poids, ...), sur le plan de l'éco-conception (en termes d’impacts environnementaux, d’impact sur la santé humaine dans la conception et le développement du produit tout au long de son cycle de vie), sur le plan de l'ergonomie (adaptation de l’outil aux caractéristiques physiologiques et morphologiques, au fonctionnement cognitif de l’être humain) et sur le plan de ses fonctionnalités (ajout de fonctionnalités ou amélioration substantielle d’une fonctionnalité existant sur le marché).

En second lieu, ces nouveaux produits doivent donner lieu à la réalisation de prototypes ou d’installations pilotes. Un prototype est un modèle original qui possède les qualités techniques et les caractéristiques de fonctionnement du nouveau produit. Il n’en revêt pas nécessairement la forme ou l’aspect final, mais il permet de prouver que ce dernier présente des performances supérieures et répond à un besoin technique ou commercial. Une installation pilote est, elle, un ensemble d’équipements ou de dispositifs permettant de démontrer, à une échelle ou dans un environnement proche de la réalité industrielle, que le nouveau produit présente des performances supérieures et répond à un besoin technique ou commercial. Le prototype ou l'installation pilote d'un nouveau produit est un bien qui n'est pas destiné à être mis sur le marché mais à être utilisé comme modèle pour la réalisation d'un nouveau produit.

La réalisation de ces prototypes et installations pilotes suit plusieurs étapes. Il convient, d’abord, de procéder à leur conception, c’est-à-dire d’élaborer des procédures, des spécifications techniques et d’autres caractéristiques fonctionnelles ou d’utilisation pour de nouveaux produits. Cette phase inclut les premières études techniques. Elle est suivie par la configuration et l’ingénierie, c’est-à-dire la réalisation du prototype ou de l’installation pilote du nouveau produit. Ces opérations correspondent aux changements apportés aux procédures, méthodes et normes de production et de contrôle de la qualité, ainsi qu’aux logiciels associés requis pour fabriquer le produit nouveau ou amélioré ou utiliser le procédé nouveau ou amélioré. Enfin, les essais et l’évaluation permettent la mise à l’épreuve des prototypes ou installations pilotes.

2 – Le calcul du CII

Le calcul du CII suppose de suivre deux grandes étapes (BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-45-20 du 16/02/2022).

Il convient, d’abord, de définir les dépenses éligibles. Celles-ci sont proches de ce qui a cours en matière de CIR et obéissent aux même conditions. Ces dépenses comprennent, ainsi, les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l’état neuf et les dépenses de personnel affectés directement à la réalisation d’opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits. Leurs modalités de calcul sont identiques au CIR tant en ce qui concerne la base de calcul que l’application d’un prorata en cas d’affectation partielle auxdites opérations. Pouvaient, également, être prises en compte les dépenses de fonctionnement dans les mêmes proportions que pour le CIR ; cette possibilité a, toutefois, été supprimée pour les dépenses exposées à compter du 1° janvier 2023. Sont aussi éligibles les dépenses relatives à la propriété intellectuelle (frais de prise et de maintenance de brevets et de certificats d’obtention végétale, frais de dépôt de dessins et modèles relatifs aux opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits, frais de défense de brevets, de certificats d’obtention végétale, de dessins et modèles relatifs à ces mêmes opérations) réalisées tant en France qu’à l’étranger. Enfin, les dépenses de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits sous-traitées auprès d’entreprises tierces (bureaux d’études, centres techniques industriels, ...) sont éligibles au CII dès lors que ces dernières sont agréées par le ministre chargé de la recherche si elles réalisent également des opérations de R&D ou par le ministre chargé de l’industrie dans le cas contraire.

Une fois ces dépenses évaluées, il convient de les additionner. Le CGI prévoit, toutefois, un plafonnement : ces dépenses ne peuvent, en effet, être prises en compte dans la base de calcul du crédit d’impôt que dans la limite globale de 400 000 € par an. Le CII est, ensuite, obtenu en appliquant à cette base un taux de 20 % pour les dépenses exposées jusqu’au 31 décembre 2022 et de 30 % pour les dépenses exposées à compter du 1° janvier 2023 (taux majorés, respectivement, à 40 % et 60 % pour les exploitations situées dans les départements d’outre-mer).

Enfin, l’entreprise peut faire du CII un usage identique à celui du CIR : imputation sur l’impôt sur les bénéfices dus ou restitution immédiate dans certaines hypothèses et sous conditions.

B – Le crédit d'impôt pour frais de collection

Les entreprises industrielles du secteur textile – habillement - cuir peuvent, sous conditions, bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses qu’elles exposent pour l'élaboration de nouvelles collections (art. 244 quater B II h et i du CGI ; BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-10-40 du 13/04/2023). Il convient d’analyser le champ d’application dudit crédit (1) et ses modalités de calcul (2).

1 – Le champ d’application du crédit d’impôt pour frais de collection

Pour pouvoir bénéficier de ce crédit d’impôt, les entreprises doivent respecter trois grandes conditions. Elles doivent, d’abord, relever du secteur textile – habillement - cuir.

Elles doivent, ensuite, exercer une activité industrielle. Ont ce caractère les entreprises qui réalisent une activité qui concourt directement à la fabrication ou à la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant. Ne sont donc pas éligibles les entreprises qui n’exercent aucune activité de production.

Enfin, les entreprises doivent procéder à l'élaboration de nouvelles collections. L'élaboration d'une collection s'entend des travaux liés à la mise au point d'une gamme nouvelle de produits qui, conformément aux pratiques commerciales du secteur, doit être renouvelée à intervalles réguliers, connus à l'avance. Sur la première condition, la nouveauté de la gamme de produits s'apprécie par rapport aux matières, dessins, formes et couleurs utilisés dans les séries précédentes. Il s’ensuit que les dépenses liées à la simple adaptation d'une gamme existante par l'adjonction de quelques produits nouveaux ainsi que celles liées à la modification d'une seule des caractéristiques des produits existants (modification uniquement des couleurs par exemple) ne sont pas considérées comme des dépenses d'élaboration de nouvelles collections. Quant à la seconde condition, il est possible de citer l’exemple typique des collections de prêt-à-porter qui sont renouvelées deux fois par an. La condition est, également, satisfaite pour les autres collections du secteur textile – habillement - cuir qui sont renouvelées à intervalles réguliers et connus à l'avance, même si la périodicité n'est pas biannuelle dès lors qu'elle est conforme aux usages professionnels et aux exigences du marché. En revanche, lorsque le renouvellement de la gamme intervient en dehors de toute périodicité régulière, l'entreprise ne peut bénéficier du dispositif.

2 – Le calcul du crédit d’impôt pour frais de collection

Il convient ici aussi de suivre deux grandes étapes pour calculer le crédit d’impôt pour frais de collection.

Il s’agit, d’abord, de déterminer les dépenses éligibles. Sont, ainsi, prises en compte les dépenses de personnel. Celles-ci concernent, d’une part, les stylistes et techniciens de bureaux de style de l’entreprise directement chargés de concevoir et d'exécuter les modèles à partir desquels seront réalisés les prototypes et échantillons de produits nouveaux et, d’autre part, les ingénieurs et techniciens de production qui, à partir des travaux effectués par les stylistes et techniciens des bureaux de style, réalisent les prototypes et les échantillons destinés à présenter les nouvelles collections au public, à condition que ces prototypes et échantillons ne soient pas vendus. Les modalités de calcul de ces dépenses sont identiques au CIR tant en ce qui concerne la base de calcul que l’application d’un prorata en cas d’affectation partielle auxdites opérations. Sont, aussi, prises en compte les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf qui sont directement affectées à la conception des nouvelles collections ou à la réalisation de prototypes et d'échantillons non vendus. Les frais de fonctionnement sont, quant à eux, évalués forfaitairement à la somme de 75 % des dépenses de personnel. Sont, également, éligibles les frais afférents aux dessins et modèles (frais de dépôt, frais de défense, dans la limite de 60 000 € dans cette seconde hypothèse). Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections confiée à des stylistes ou des bureaux de style extérieurs à l’entreprise sont éligibles à condition que ces derniers soient agréés par le ministre chargé de la recherche sur avis conforme du ministre chargé de l’industrie. Enfin, peuvent être prises en compte les dépenses de recherche destinées à tester et améliorer les moyens de production ou les nouvelles fibres.

La somme de toutes les dépenses exposées par l’entreprise doit, ensuite, être multipliée par un taux de 30 % pour déterminer le montant du crédit d’impôt. Ce dernier fait, également, l’objet d’un plafonnement en vertu des règles européennes sur les aides de minimis.

C – Le crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative - CICo

L’article 69 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a instauré un crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative (CICo), codifié à l’article 244 quater B bis du CGI (BOFIP n° BOI-BIC-RICI-10-15 du 13/04/2023). Ce crédit d’impôt bénéficie aux entreprises industrielles et commerciales ou agricoles qui concluent, à compter du 1er janvier 2022 et jusqu'au 31 décembre 2025, un contrat de collaboration avec un ou plusieurs organismes de recherche et de diffusion des connaissances (ORDC) et qui financent, dans ce cadre, une partie des dépenses de recherche exposées par ce ou ces organismes.

Le CICo bénéficie aux entreprises industrielles et commerciales ou agricoles quels que soient leur mode d’exploitation (entreprise individuelle, SARL, …), leur taille ou leur secteur d’activité. Ces entreprises doivent être imposées d'après leur bénéfice réel, de plein droit ou sur option, à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices agricoles.

L’entreprise doit avoir conclu un contrat de collaboration avec un ORDC agréé par le ministre chargé de la recherche. Un ORDC est une entité, quel que soit son statut légal ou son mode de financement, dont l’objectif premier est d’exercer, en toute indépendance, des activités de recherche fondamentale, de recherche appliquée ou de développement expérimental ou de diffuser largement les résultats de ces activités au moyen d’un enseignement, de publications ou de transferts de connaissances. Pour ouvrir droit au bénéfice du CICo pour l'entreprise qui conclut un contrat de collaboration avec lui, l’ORDC doit respecter trois conditions cumulatives : il doit exercer des activités de recherche et développement, il doit exercer ces activités de manière indépendante et il doit exercer à titre prépondérant des activités non économiques.

Le contrat de collaboration doit remplir un ensemble de conditions. Il doit, ainsi, avoir été conclu entre l'entreprise et les ORDC avant que les travaux de recherche en collaboration aient démarrés. Il doit prévoir que les dépenses de recherche sont facturées au coût de revient. Il doit, par ailleurs, fixer l'objectif commun poursuivi et la répartition des travaux de recherches entre l'entreprise et les ORDC. Il doit fixer les modalités de partage des risques et des résultats entre l'entreprise et les ORDC. Tous les résultats ne peuvent donc pas être attribués en totalité à l'entreprise. Il doit, également, prévoir que les dépenses facturées par les ORDC ne peuvent pas excéder 90 % des dépenses totales faites pour la réalisation des opérations prévues par le contrat. Enfin, les ORDC doivent pouvoir publier les résultats de leurs propres recherches faites dans le cadre de la collaboration avec l'entreprise.

Les dépenses facturées à une entreprise éligible par un ou plusieurs ORDC agréés ouvrent droit au crédit d’impôt dès lors qu’elles sont exposées pour la réalisation d’opérations de recherche et développement (recherche fondamentale, recherche appliquée, développement expérimental). Peuvent, ainsi, ouvrir droit du CICo, notamment, les frais de personnel, les coûts des instruments, du matériel, des bâtiments et des terrains utilisés pour le projet, les frais généraux additionnels. Ces dépenses doivent, par ailleurs, être afférentes à des opérations de R&D localisées au sein de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales et constituer des charges fiscalement déductibles.

Le CICo est calculé en fonction des dépenses effectuées au cours de l'année civile. Lorsque l'entreprise clôture son exercice en cours d'année, les dépenses prises en compte sont celles effectuées au cours de la dernière année civile écoulée. Les dépenses de recherche collaborative sont retenues dans la base de calcul du CICo dans la limite globale de 6 M € par an. Le montant des dépenses facturées doit, par ailleurs, être diminué du montant des aides publiques reçues par les organismes de recherche et par l'entreprise pour ces opérations. Le taux du crédit d’impôt est fixé à 40 %. Il est porté à 50 % pour les PME au sens de l’Union européenne. L’utilisation de ce crédit d’impôt s’effectue dans les mêmes conditions que pour le CIR.