Énoncé du sujet
Maxime est parti vivre avec sa nouvelle copine, Jessy. Il a laissé son ex-concubine, Juliette, seule avec leur jeune fille, Louise. Après quatre ans de séparation, il s’est rendu compte qu’il passait à côté de la vie de Louise, et a demandé à Juliette d’obtenir une garde alternée. Si Juliette est en colère de ce retour soudain de Maxime dans leur vie, elle est surtout inquiète : Maxime habite à 350 kilomètres de son domicile. Or Louise est entrée à l’école en septembre, et s’est bien intégrée. Elle fait également de la danse, dans une association de son village. Maxime lui répond qu’au regard des années qu’il a perdues, il aimerait récupérer Louise pour la période scolaire, et la lui laisser pour les vacances. Étant dans une grande ville, la qualité de l’enseignement est selon lui meilleure. Juliette ne veut pas laisser sa fille à Maxime, qui ne s’en est jamais occupé. Elle craint qu’en l’absence d’affinité particulière, Louise se retrouve déstabilisée par ce changement. Toutefois, profitant du regain d’intérêt de Maxime pour sa fille, Juliette veut obtenir de lui une pension alimentaire couvrant les frais déjà engagés et à venir, puisque jusque-là, c’est elle qui prenait en charge tous les frais.
Résolution du cas
Maxime et Juliette sont les parents de Louise, séparés depuis plusieurs années. La résidence principale était fixée chez Juliette. Maxime veut désormais obtenir la garde alternée, mais il habite à 350 kilomètres et Juliette ne veut pas que Maxime récupère Juliette pendant la période scolaire. Par ailleurs, Juliette veut obtenir une pension alimentaire pour sa fille.
Un parent peut-il s’opposer à la garde alternée dans l’intérêt supérieur de l’enfant ? Peut-il obtenir une pension alimentaire pour couvrir les frais d’entretien de l’enfant plusieurs années après la séparation ?
Il sera nécessaire d’envisager d’une part la question de la garde alternée (I) et d’autre part la question de la pension alimentaire (II).
I – La demande de garde alternée
L’article 371-1 du Code civil définit l’autorité parentale comme étant un « ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ». Elle est exercée en commun, ce qui explique que la Cour d’appel de Paris ait jugé, le 11 septembre 2002 (D. 2002. IR. 3241) que « pour atteindre les objectifs définitifs à l’art. 371-1, les parents doivent se respecter mutuellement et accomplir chacun les efforts nécessaires pour traduire leurs responsabilités de façon positive dans la vie de leur enfant, notamment en respectant la place de l’autre parent, en maintenant un nécessaire dialogue entre eux ». L’un des devoirs est ainsi la garde de l’enfant, dont le mode alterné est possible (article 373-2-9 du Code civil), notamment afin de répondre aux exigences posées par l’alinéa 2 de l’article 373-2-6 du Code civil qui impose de conserver des liens familiaux avec les deux parents. Cependant, une condition subsiste : répondre à l’intérêt supérieur de l’enfant (article 3.1 de la Convention internationale des droits de l’enfant). A cet égard, la garde alternée ne pourra être prononcée dès lors que la distance entre les domiciles parentaux est trop importante (CA Bordeaux, 3è ch. Section famille, 18 août 2022, n°21/04964).
En l’espèce, la mère de Louise dispose de la garde exclusive. Or Maxime, qui est le père, veut obtenir la garde alternée, en ayant Louise pendant la période scolaire, et en laissant à sa mère le temps des vacances. Cependant, Louise habite depuis quatre ans exclusivement chez sa mère. Elle est déjà inscrite dans une école, dans le village où sa mère réside. Par ailleurs, elle réalise une activité extrascolaire qu’est la danse, dans ce même village. Elle parait donc intégrée dans son environnement, lequel est situé à plus de 350 kilomètres de celui de Maxime.
Ainsi, il est peu probable que le juge prononce la garde alternée en confiant à Maxime la garde pendant la période scolaire, et en ne laissant à Juliette que les vacances. En revanche, Maxime pourra obtenir des droits de garde, en période extrascolaire, s’il accepte de modifier sa demande. A minima, il obtiendra des droits de visite pour venir voir Louise.
II – La demande de pension alimentaire
L’article 371-2 du Code civil dispose que « chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, et de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant ». A cet égard, contrairement à l’adage selon lequel « aliments ne s’arréragent pas », en matière de pension alimentaire ayant pour vocation l’entretien des enfants, le somme qui n’a pas été réclamée par le passé peut être accordée, sans considérer que le créancier a renoncé au paiement de sa créance. Toutefois cette demande doit être formulée dans le délai de prescription de 5 ans, posé par l’article 2224 du Code civil, lequel prévoit que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer ».
En l’espèce, Juliette a payé l’entretien de Louise depuis sa naissance, donc depuis 4 ans. Elle souhaite désormais que Maxime participe à l’entretien de Louise, et aimerait d’ailleurs qu’il rattrape les années perdues, pendant lesquelles elle a dû tout payer. Comme Maxime dispose de l’autorité parentale, il doit contribuer à l’entretien de son enfant, à proportion de ses facultés financières. Juliette peut demander le paiement d’une telle contribution à Maxime jusqu’à cinq ans avant le jour de la demande, et faire fixer par le juge aux affaires familiales une pension alimentaire à lui verser régulièrement pour l’entretien de sa fille.
Ainsi, Juliette peut en effet faire une demande au juge pour obtenir paiement de la pension alimentaire due par Maxime au titre de ses obligations découlant de l’autorité parentale. Celui-ci devra donc verser ce qu’il doit au titre des 4 années passées, et devra verser une pension alimentaire pour Louise, qui ne s’arrêtera pas à sa majorité, mais seulement quand elle n’en aura plus besoin.
