Les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires (fiche thématique)

Introduction

Les finances publiques d’aujourd’hui n’ont que peu de choses à voir avec celles du début du XX° siècle. Il en va ainsi en ce qui concerne les dépenses publiques, mais aussi les prélèvements obligatoires, principale composante des ressources des collectivités publiques.

C’est, d’abord, le cas quant à leur montant. Dépenses publiques et prélèvements obligatoires ont, en effet, considérablement augmenté sous l’effet des crises, des guerres et de l’évolution de la demande sociale elle-même. Ce mouvement traduit les choix politiques faits depuis plus d’un siècle en matière de satisfaction des besoins collectifs aux termes desquels les acteurs publics se sont vu reconnaître un rôle central.

Leur structure même a, elle aussi, évolué. Au départ centrées sur l’Etat, les finances publiques se sont diversifiées. Se sont, en effet, développés, à côté de l’Etat, les collectivités locales ainsi que les organismes de Sécurité sociale du fait de l’essor de la décentralisation et de la mise en place d’un système de protection sociale.

Ce double mouvement n’a cessé de questionner les rapports entre dépenses publiques / prélèvements obligatoires d’un côté et politiques économiques de l’autre. Des rapports qui sont diversement appréciés et qui opposent les thèses libérales fondées sur l’idéologie du marché et des thèses « sociales » pour qui la sphère publique doit jouer un rôle majeur dans la régulation de l’économie.

Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, les dépenses publiques (I) et d’analyser, dans une seconde partie, les prélèvements obligatoires (II).

I - Les dépenses publiques

Les dépenses publiques, que l’on peut définir de manière précise (A), ont connu une hausse constante (B). Leurs effets sur l’économie sont diversement appréciés (C).

A - La composition des dépenses publiques

Les dépenses publiques peuvent être appréhendées en fonction des administrations publiques dépensières (1) et en fonction de leur nature (2).

1 - Une classification basée sur les administrations publiques dépensières

En France, le champ des administrations publiques inclut trois composantes principales. Cette définition est celle qui a été adoptée dans le traité des Maastricht par l’ensemble des Etats de l’Union européenne.

La première concerne les administrations publiques centrales (APUC). Celles-ci sont définies par une compétence nationale et regroupent les administrations de l’Etat, ainsi que ce qu’on appelle les ODAC, c’est-à-dire les organismes divers d’administration centrale. Les ODAC sont des établissements publics ou privés financés majoritairement par des taxes affectées ou des subventions de l’Etat. Il en existe plus de 700 ; l’on peut citer les universités, Météo France, les parcs nationaux ou, encore, le CNRS. Le montant des dépenses des APUL était de 612 milliards d’euros en 2021.

La deuxième regroupe les administrations publiques locales (APUL). Cette catégorie englobe les collectivités territoriales, les établissements publics locaux, ainsi que les ODAL (organismes divers d’administration locale) qui produisent des services non marchands. Le nombre des APUL s’est, considérablement, accru à la suite des lois de décentralisation et des transferts de compétences qu’elles ont entraîné. Les dépenses des APUL représentaient environ 280 milliards d’euros en 2021.

La troisième concerne les administrations de Sécurité sociale (ASSO) qui regroupent les régimes d’assurance sociale auxquels l’affiliation est obligatoire et les organismes financés par ces régimes. Le montant des dépenses des ASSO était, en 2021, d’environ 683 milliards d’euros.

2 – Une classification basée sur la nature des dépenses

Les dépenses publiques peuvent aussi être définies en fonction de leur nature. Ce mode de présentation permet de définir le modèle politico-social de l’Etat. Trois grands types de dépenses peuvent être évoquées.

Le premier concerne les dépenses de fonctionnement, c’est-à-dire les dépenses dont l’objet est de permettre le fonctionnement des équipements (salaires, petits achats, frais d’entretien, …). Les dépenses de personnel en sont le principal poste. Les gouvernements français successifs se sont attachés à en diminuer le poids ces dernières années. Mais, cette politique a conduit à sinistrer des pans entiers des services publics et à ne plus satisfaire les besoins les plus essentiels des citoyens. L’exemple de la gestion marchande des hôpitaux publics et ses conséquences lors de la crise sanitaire en sont l’exemple le plus éloquent.

Le deuxième vise les dépenses d’investissement ou en capital. Elles peuvent concerner les domaines militaire ou civil. S’agissant du second, les dépenses de soutien mises en œuvre dans le cadre de la politique industrielle ont été très importantes de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux années 1960. Ainsi, en 1962, les fonds publics finançaient environ ¼ des investissements civils. Mais, en raison du retour au marché, la participation de l’Etat a décliné fortement depuis.

Le troisième type concerne les dépenses de transfert ou d’intervention : il s’agit de dépenses inscrites au budget d’une personne publique ou assimilée, mais qui transitent simplement par ce budget pour être redistribuées au profit de particuliers ou d’organismes. Ces dépenses manifestent l’existence d’un Etat protecteur. L’on peut, notamment, citer : en matière sociale, le Fonds national vieillesse, le RSA, l’allocation aux adultes handicapés ; en matière économique, les aides à l’agriculture et les subventions de l’Etat versées aux entreprises publiques déficitaires ; en matière de politique internationale, les aides aux pays en développement ou, encore, les contributions au budget des organisations internationales.

B – D'hier à aujourd'hui, la hausse constante des dépenses publiques

Depuis le début du XX° siècle, les dépenses publiques ont cru de manière continue, mais par sauts successifs (1). Cette hausse peut s’expliquer par différents facteurs (2).

1 - Les grandes phases de la hausse des dépenses publiques

Les dépenses publiques sont passées d’environ 10 % du PIB au début du XX° siècle à 59 % du PIB en 2021. Ce mouvement haussier, accompagné d’une diversification toujours plus grande des dépenses, traduit les multiples bouleversements que l’Etat a connu au cours du siècle dernier. Quatre grandes étapes ont ponctué ce mouvement.

Au début du XX° siècle, le niveau des dépenses publiques était relativement faible. En effet, celles-ci représentaient de 10 à 13 % du PIB. Elles augmentaient, par ailleurs, dans les mêmes proportions que la richesse nationale. Pour l’essentiel, ces dépenses étaient consacrées au financement des activités régaliennes de l’Etat.

Le premier conflit mondial devait marquer un premier saut. L’effort de guerre, puis les nécessités de la reconstruction provoquèrent une multiplication des interventions de l’Etat : reconstruction du pays, interventions économiques pour pallier les effets de la crise, prise en charge de besoins sociaux, budgets militaires. Les dépenses publiques représentaient, alors, environ 20 % du PIB.

Un nouveau seuil a été franchi après la Seconde Guerre mondiale. Outre les efforts de reconstruction, les grands projets industriels et le développement de la couverture sociale constituèrent les nouveaux chantiers de la puissance publique. Les dépenses publiques représentaient alors environ 40 % du PIB.

C’est à partir de cette époque que l’on a noté une évolution de la nature des dépenses publiques. En effet, la part relative aux dépenses des organismes de Sécurité sociale devait s’accroître considérablement du fait de la mise en place du système de protection sociale français. Quasiment inexistantes au début du XX° siècle, elles dépassent aujourd’hui celles de l’Etat. Le développement des missions de l’Etat (éducation nationale, enseignement supérieur et recherche, …) changea, par ailleurs, la composition de ses dépenses. Enfin, les différentes vagues de décentralisation à compter des années 1980 provoquèrent une hausse conséquent des dépenses locales.

Depuis la fin du XX° siècle, le poids des dépenses publiques est supérieur à 50 % du PIB ; il est d’environ de 55 % du PIB depuis les années 2000. Sous l’effet de la crise sanitaire, les dépenses publiques ont augmenté depuis 2020 : elles se sont, ainsi, élevées à 1 476 milliards d’euros en 2021, soit l’équivalent de 59 points de PIB. En termes de répartition pour l’année 2021, les dépenses de l’Etat et des ODAC représentent 35 % des dépenses publiques, les administrations de Sécurité sociale 46 % et les administrations publiques locales 19 %.

2 - Les causes de la hausse des dépenses publiques

Plusieurs éléments peuvent être avancés pour expliquer cette hausse constante des dépenses publiques.

Sur le plan théorique, l’économiste allemand Adolph Wagner a avancé, dès la fin du XIX° siècle, que le progrès économique s’accompagne d’une hausse de la part des dépenses publiques plus que proportionnelle à celle du PIB. Ce mouvement tient au développement de nouveaux besoins pour le bon fonctionnement de l’économie (infrastructures, réglementations, services publics urbains) et à l’importance croissante accordée par la population à l’éducation, la culture, les loisirs, la protection de l’environnement, la santé et, plus généralement, la prévention de tous les risques. C’est ce que l’on a appelé la loi de Wagner.

D’autres considèrent qu’il existe un effet de cliquet des dépenses publiques résultant d’une plus grande facilité à augmenter des dépenses et à mettre en place des politiques publiques qu’à les supprimer. Ainsi, s’explique que, la plupart du temps, les nouvelles dépenses s’ajoutent aux anciennes qui ne disparaissent pas.

Enfin, le ralentissement de la croissance, l’apparition du chômage de masse et la hausse de la dette publique accroissent, mécaniquement, la part dans le PIB des dépenses liées à l’indemnisation du chômage, au soutien de l’emploi et aux intérêts de la dette.

C - Dépenses publiques et politiques économiques

Les effets des dépenses publiques en matière économique sont diversement appréciés : certains pointent leurs inconvénients (1) quand d’autres font valoir leurs bienfaits (2).

1 – Les inconvénients de la dépense publique

Les inconvénients de la dépense publique sont mis en avant par les thèses libérales. Celles-ci font valoir trois arguments.

Le dépense publique constituerait, d’abord, un poids pour l'économie tant par les prélèvements qu'elle implique que par les choix de dépenses effectués qui seraient moins productifs que ceux des agents privés. Selon cette thèse, la dépense publique freinerait, ainsi, la croissance en empêchant une utilisation privée, censée être plus productive, des ressources.

Le développement de la dépense publique entrainerait, par ailleurs, une baisse de l'épargne disponible pour les investissements privés du fait de la hausse des prélèvements obligatoires et du recours à l'emprunt public. Les sommes utilisées pour financer la dépense publique constitueraient, alors, autant d’argent en moins à la disposition des entreprises pour mener à bien leurs projets d’investissement. C’est ce qu’on appelle l’effet d’éviction.

Enfin, selon ces thèses, les dépenses publiques ne contribuent pas nécessairement à résoudre les problèmes sociaux comme le chômage ou l’exclusion. Certains économistes libéraux estiment, ainsi, qu’il existe, pour les pays du G7, un parallélisme complet entre le taux des dépenses publiques par rapport au PNB et le taux de chômage par rapport à la population active.

2 – Les bienfaits de la dépense publique

La démonstration de l’utilité de la dépense publique pour entretenir, voire relancer la croissance économique est principalement le fait de l’économiste britannique Keynes. Pour le célèbre économiste, la dépense publique permet d'assurer une solidarité sociale. Elle joue, surtout, le rôle de stabilisateur économique et peut même insuffler des gains de croissance par son soutien à la demande en période de crise. Le résultat de cette stimulation est égal au montant des dépenses publiques associées à un coefficient multiplicateur. La dépense publique stimule, en effet, la production, ce qui entraine une hausse des revenus des ménages et donc une hausse de la consommation, ce qui stimule à nouveau la production.

Plus récemment, l’économiste Solow a développé la théorie de la croissance endogène. Selon cette théorie, il existe des externalités qui font qu'un investissement aura un faible rendement privé, mais un fort rendement social, ce qui influencera toute l'économie. Ainsi, les efforts faits en matière d'éducation, de santé, de recherche, d’infrastructures publiques, … sont autant d'investissements porteurs de croissance dans l'avenir.

II – Les prélèvements obligatoires

Les ressources publiques correspondent aux sommes que les collectivités publiques mobilisent pour couvrir les dépenses publiques. Leur champ d’élection est plus large que celui des prélèvements obligatoires. Ainsi, les redevances pour service rendu constituent des recettes publiques, mais non des prélèvements obligatoires. Ces derniers étant les ressources les plus caractéristiques des administrations publiques, ils seront seuls analysés ici. Trois points de vue doivent être retenus : leur composition (A), leur évolution (B) et leurs liens avec les politiques économiques (C).

A - La composition des prélèvements obligatoires

Les prélèvements obligatoires peuvent être définis au travers de trois critères : il s’agit de versements effectifs au profit des administrations publiques et des institutions européennes qui présentent un caractère non volontaire. Cette définition permet d’envisager deux grands types de prélèvements obligatoires : les impôts (1) et les cotisations sociales (2), le critère de distinction étant l’existence ou non d’une contrepartie directe.

1 - Les impositions de toutes natures

L’article 34 de la Constitution de 1958 prévoit que « la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». L’impôt est, généralement, défini comme une prestation pécuniaire obligatoire requise des particuliers par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie directe en vue de la couverture des charges publiques.

La jurisprudence constitutionnelle distingue deux grands types de prélèvements fiscaux : les impôts proprement dits et les taxes fiscales qui sont perçues à l’occasion du fonctionnement d’un service public. Ces dernières doivent être distinguées des redevances, perçues elles-aussi lors de la fourniture d’un service public, eu égard au fait que, pour les premières, le paiement n’est pas la contrepartie du service rendu, alors que, pour les secondes, il s’agit du prix payé par l’usager d’un service public en contrepartie de l’usage de ce service. En d’autres termes, les taxes fiscales doivent être payées par tous les contribuables, même s’ils n’utilisent pas effectivement le service, alors que les redevances sont acquittées seulement par les usagers du service.

2 - Les cotisations sociales

Les cotisations sociales sont des prélèvements effectués sur les salaires et affectées au financement des dépenses de Sécurité sociale. Elles se distinguent des impositions par le fait que leur versement comporte une contrepartie directe, en l’occurrence la couverture des risques sociaux. En la matière, la compétence du législateur se limite à la fixation des principes fondamentaux de la Sécurité sociale.

Si, juridiquement, la distinction entre impositions et cotisations sociales est fondamentale, d’un point de vue politique et économique, elle l’est moins : en effet, la question du poids de la dette publique et des déficits publics, notamment au regard des exigences communautaires et des impératifs de compétitivité économique, oblige à s’intéresser aux deux types de prélèvements.

B - D'hier à aujourd'hui, l'évolution des prélèvements obligatoires

La hausse des prélèvements obligatoires a été continue (1). Elle s’est accompagnée d’une évolution de la structure desdits prélèvements (2).

1 – Une hausse continue

Le niveau des prélèvements obligatoires est mesuré par la part qu’ils occupent dans la richesse nationale. Il constitue un indicateur de l’intervention publique, qui ne peut s’interpréter indépendamment des choix politiques d’organisation de la société.

La tendance sur le long terme est à l’augmentation du taux de prélèvements obligatoires (TPO). Il en est, allé, de la sorte dès le début du XX° siècle. En effet, les deux Guerres mondiales et la crise économique de 1929 ont justifié des interventions croissantes des autorités publiques et, par suite, provoqué une besoin accru en ressources publiques.

Plus près de nous, le TPO moyen est passé de 33,7 % du PIB en 1965 à 44,3 % en 2021. Il oscille depuis la fin du XX° siècle entre 40 et 45 % du PIB. Cette évolution s’explique par le choix fait, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, par de nombreux pays industrialisés, dont la France, d’un modèle d’Etat interventionniste. C’est, ainsi, qu’en France, outre le hausse des prélèvements opérés au profit de l’Etat, la création de la Sécurité sociale à la Libération et le processus décentralisateur amorcé au début des années 1980 ont joué un rôle majeur dans la hausse du TPO.

2 – Une évolution de la structure des prélèvements obligatoires

La répartition entre administrations publiques bénéficières a, également, considérablement évolué. Ainsi, la part dans le PIB des prélèvements obligatoires destinés à l’Etat a baissé au profit de celle des administrations de Sécurité sociale et des collectivités locales. Ainsi, en 2021, les prélèvements obligatoires au bénéfice des administrations d’Etat représentaient 29 ,5 % du total des prélèvements obligatoires, ceux au bénéfice des administrations publiques locales 14,7 % et ceux perçus au profit des administrations de Sécurité sociale 55,3 %.

Cette évolution reflète la tendance générale à la hausse des dépenses sociales, en particulier l’augmentation des dépenses liées aux risques vieillesse et santé. Quant aux prélèvements obligatoires affectés au financement des collectivités locales, elle tient aux transferts de compétences liés aux lois de décentralisation (acte I en 1982 et acte II en 2003-2004) qui se sont accompagnés de transferts de fiscalité ou de recettes complémentaires.

Ce mouvement s’est, par ailleurs, accompagné d’une évolution des recettes des organismes sociaux. En effet, si les cotisations assurent, encore, aujourd’hui, l’essentiel du financement de ces régimes, deux nouveaux modes de financement sont apparus. D’une part, l’Etat a été amené à assurer directement par la voie budgétaire une part croissante du financement de la Sécurité sociale. D’autre part, il a été procédé à une fiscalisation des recettes sociales avec la création de la Contribution sociale généralisée (CSG) et de la Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). C’est, ainsi, que depuis ces réformes, le système français et un système mixe à mi-chemin entre le modèle bismarckien, où le financement de la protection sociale est assuré par des cotisations sociales, et le modèle beveridgien, où le financement est assuré par des impôts d’Etat.

C – Fiscalité et politiques économiques

Jusqu'à ces 30 dernières années, la politique fiscale était marquée par le souci de redistribution (1). Mais, depuis les années 1990, les objectifs d'efficacité économique, du fait de la mondialisation, sont devenues plus importants (2).

1 - Un objectif de redistribution

La structure des prélèvements obligatoires peut permettre de redistribuer la richesse. Ainsi, l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 prévoit que la contribution commune « doit être également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés ». Cette disposition permet de traiter les citoyens différemment selon leur capacité contributive.

Sur cette base, les impôts progressifs permettent d’imposer la matière imposable en fonction d’un taux qui croît plus que proportionnellement à la base d’imposition. Ce choix se fonde sur l’idée qu’il paraît juste de moins imposer la partie des revenus servant à satisfaire les besoins vitaux par rapport à la partie la plus haute. Cette méthode conduit à taxer plus lourdement les plus fortunés et à opérer une forme de redistribution. En France, l’impôt sur le revenu relève de ce mécanisme, mais sa redistributivité est limitée en raison du faible rendement de cet impôt.

2 - Un objectif d’efficacité économique

A l’heure actuelle, les politiques en matière de prélèvements fiscaux se doivent de respecter un objectif d’efficacité économique, ce qui passe par une neutralité économique de ces prélèvements. A l’inverse, la fiscalité peut, également, être utilisée comme un moyen d’orienter structurellement l’économie.

La fiscalité n'est pas neutre d'un point de vue économique. En effet, tous les impôts ont une incidence sur le comportement des agents : on parle de distorsions fiscales. Ces dernières se traduisent par des modifications des prix des biens et des facteurs de production. Les distorsions fiscales sont moins importantes lorsque l'élasticité aux prix de l'offre et de la demande est faible : en pareille hypothèse, la consommation n'est pas affectée par une hausse des prix (par exemple, biens de première nécessité, tabacs). Il faut donc taxer en priorité ces produits. Mais, une telle politique entre, alors, en conflit avec l’objectif de redistribution. En revanche, lorsque l’élasticité aux prix de l’offre et de la demande est forte, les impacts sur l’activité économique peuvent être négatifs : ainsi, le facteur lourdement taxé peut être remplacé par un facteur moins taxé. C’est ce qui explique la tendance qui consiste à remplacer le facteur travail par le facteur capital ou à recourir aux délocalisations.

Les distorsions fiscales peuvent, par ailleurs, être volontaires. En effet, cette fois-ci, le pouvoir politique utilise le levier fiscal avec la volonté affirmée d’influer sur l’activité économique. En d’autres termes, le but des prélèvements est précisément de modifier le comportement des agents économiques dans le sens souhaité par l’Etat. Il peut s’agir, par exemple, de favoriser l’épargne, l’investissement ou, encore, la consommation. Il peut s’agir, également, de rendre des territoires attrayants : la baisse des impôts dans un pays donné est, en effet, de nature à attirer les investissements dans ce pays. L’inconvénient de cette politique est qu’elle aboutit à une concurrence fiscale dommageable entre Etats. La fiscalité peut, aussi, corriger des externalités négatives : ces dernières se traduisent par une influence négative sur l'ensemble de la société. La fiscalité apparait, alors, comme le moyen de faire peser sur l’auteur de la « nuisance » les conséquences de son comportement (par exemple, la taxe pollueur-payeur).