Introduction
Les administrations qui interviennent dans l’élaboration du projet de loi de finances de l’année sont multiples. La principale est la Direction du budget : c’est elle, en effet, qui pilote le processus de préparation du budget. A côté, d’autres administrations interviennent : l’on peut, notamment, citer la Direction générale du Trésor, la Direction générale des finances publiques ou, encore, les directions des affaires financières des différents ministères.
Sur un plan politique, les administrations financières ne disposent pas d’un pouvoir de décision. Celui-ci relève, en effet, du Premier ministre et du ministre des Finances. Aussi, sont-elles obligées de respecter le cadre budgétaire posé par le Gouvernement. Mais, elles fournissent à celui-ci les informations qui lui sont indispensables pour déterminer les priorités politiques du nouveau projet de budget.
Sur un plan technique, les administrations financières assurent les tâches matérielles de préparation du projet de loi de finances. Elles exercent, ainsi, une mission traditionnelle de prévision des recettes et des dépenses, mais aussi un rôle d’arbitrage au sein et entre les ministères. Leur tâche consiste, également, à maîtriser la dépense publique dans un contexte contemporain qui a donné à cette fonction une nouvelle dimension.
Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, les administrations financières en tant qu’elles sont au cœur du processus politique de préparation du projet de budget (I) et d’analyser, dans une seconde partie, leur mission de préparation technique dudit projet (II).
I - Des administrations au cœur du processus politique de préparation du projet de budget
Bien que leur rôle soit de nature technique, les administrations financières sont au cœur du processus politique de préparation du budget. En effet, leurs tâches sont, étroitement, dépendantes des choix politiques faits par le Gouvernement (A) et, dans le même temps, leurs propositions préparent les choix, ainsi, effectués (B).
A - Une action dépendante des choix politiques
Les décisions qui parsèment le processus de préparation du projet de loi de finances relèvent d’un choix politique : celui du Gouvernement. En effet, l’article 38 de la loi organique relative aux lois de finances, dite LOLF, du 1° août 2001 prévoit que « sous l'autorité du Premier ministre, le ministre chargé des finances prépare les projets de loi de finances, qui sont délibérés en conseil des ministres. » C’est, donc, le Gouvernement qui fixe les grands postulats qui vont déterminer l’élaboration du budget de l’Etat, qu’il s’agisse des hypothèses macroéconomiques envisagées, des réformes budgétaires à entreprendre ou bien des politiques publiques à mener.
Le travail des administrations financières doit s’inscrire dans le cadre, ainsi, déterminé. Il leurs revient d’assurer les tâches de préparation du budget sur la base des priorités politiques qui ont été retenues. Ce lien est essentiel et lourd de conséquences : en effet, si les hypothèses de conjoncture économique imposées par le pouvoir politique sont trop optimistes, c’est la validité du projet de budget, elle-même, qui se trouvera faussée. Aussi, les retours des différentes administrations financières sont fondamentaux pour éclairer le Gouvernement.
B - Une action en soutien de la décision politique
Au cours du processus de décision budgétaire, les administrations financières, et plus particulièrement la Direction du budget, sont en étroite relation avec les autorités politiques, qu’il s’agisse du ministre des Finances en charge, spécifiquement, de la préparation du budget ou des différents ministères pour l’élaboration de leur propre budget.
Les liens avec le ministre des Finances sont doubles. En amont, les administrations financières lui fournissent les informations nécessaires à la prise des décisions : notamment, la Direction du budget effectue des prévisions de recettes et de dépenses, la Direction générale du Trésor réalise, quant à elle, des projections macroéconomiques. En aval, une fois les priorités politiques fixées, la Direction du budget traduit les choix gouvernementaux en termes de moyens budgétaires.
Les liens entre la Direction du budget, via ses huit sous-sections, et les services des ministères, qu’il s’agisse de leurs directions des affaires financières ou de leurs directions métiers, ont lieu lors des différentes réunions qui ponctuent le processus de préparation budgétaire : conférences performances dont l’objet est de déterminer une liste des objectifs et des indicateurs de performance pour le prochain budget ; conférences budgétaires au cours desquelles sont examinées et négociées les demandes de crédits et d’effectifs des ministères. Cette direction centrale du ministère des Finances intervient, également, lors de la finalisation du projet de loi de finances pour procéder, au cours de réunions dites de répartition, à la répartition des crédits et des effectifs par programmes et actions au sein des diverses missions.
Tout au long de ce processus de va-et-vient, les administrations financières assurent la préparation technique du projet de budget en exerçant différentes tâches.
II - Des administrations en charge de la préparation technique du projet de budget
Les administrations financières, avec au premier rang la Direction du budget, exercent une mission classique de prévision et d’arbitrage (A). Elles interviennent, également, pour maîtriser la dépense publique : ce rôle a été renforcé ces dernières années (B).
A - Un rôle classique de prévision et d'arbitrage
Les missions traditionnelles de la Direction du budget la conduisent à procéder à une évaluation des recettes et des dépenses, ainsi qu’à réaliser des arbitrages.
La Direction du budget doit, d’abord, faire des estimations de recettes et de dépenses pour l’année à venir. Pour cela, elle se base sur des projections macroéconomiques. Certaines lui sont fournies par la Direction générale du Trésor : celle-ci a, en effet, la charge de suivre la conjoncture économique française et internationale et d’élaborer des prévisions (croissance, compétitivité, emploi, …) pour la France et son environnement. D’autres sont des hypothèses de travail imposées par le pouvoir politique. Elle propose, ensuite, ces prévisions au Gouvernement afin que celui-ci les prenne en compte pour décider de ses priorités budgétaires. Cet exercice de prévision est complexe, car on ne connaît pas avec certitude la totalité des dépenses et des recettes lors de la phase de préparation du budget. Si les estimations se révèlent être fausses, du fait, par exemple, de prévisions de croissance trop optimistes du Gouvernement ou d’incident conjoncturel (tel que la crise sanitaire de 2020), c’est tout le raisonnement budgétaire qui se trouvera faussé.
La Direction du budget réalise, par ailleurs, des arbitrages. Compte tenu des prévisions de recettes et de dépenses effectuées, ainsi que des choix politiques du Gouvernement, elle rend des arbitrages lors des différentes réunions budgétaires avec les ministères. Ceux-ci peuvent, ensuite, être contestés devant le pouvoir politique. Elle est, également, amenée à proposer, dans ce cadre, des réformes budgétaires. Il en va de même de la Direction générale du Trésor qui fournit des analyses et des pistes de réforme dans le domaine des finances publiques, de la dépense publique et de la politique fiscale.
Enfin, une autre direction, la Direction générale des finances publiques (DGFIP), comprend, en son sein, la Direction de la législation fiscale à qui revient la charge de concevoir et d’élaborer les dispositions législatives et réglementaires à caractère fiscal, ainsi que les instructions générales nécessaires à leur application.
L’autre mission de la Direction du budget est d’assurer la maîtrise de la dépense publique.
B - Un rôle renouvelé de maîtrise de la dépense publique
L’action de la Direction du budget porte, aussi, sur la maîtrise de la dépense publique. Ce rôle, qui se manifeste à deux égards, a été renforcé depuis une trentaine d’années.
La Direction du budget doit, d’abord, mener son travail en ayant, constamment, à l’esprit le souci de rendre compatible avec la nécessité de l’équilibre budgétaire les prévisions de dépenses de l’Etat. Cet impératif la conduit à réaliser une analyse critique de la dépense publique en questionnant son utilité et son efficacité. Cette exigence existe de longue date, mais a pris un relief particulier en raison des engagements européens souscrits par la France et de la difficulté à réduire les déficits publics. La LOLF a, de ce point de vue, constitué un cadre idéal pour permettre le renouvellement de cette mission : la nouvelle « Constitution financière » de la France impose, en effet, tant au pouvoir politique qu’à la Direction du budget, de fixer des objectifs et des indicateurs de performance et d’analyser les résultats obtenus au regard des objectifs qui avaient été fixés. Cette évolution s’est, notamment, traduite par différents plans de réforme : RGPP, MAP et, plus récemment, CAP22.
La Direction du budget a, également, dû faire évoluer son regard en adoptant une approche pluriannuelle des finances publiques censée permettre une meilleure maîtrise des dépenses publiques. Elle doit, ainsi, proposer une stratégie globale des finances publiques pour le long terme, sur la base de laquelle est élaboré le programme de stabilité transmis chaque année à la Commission européenne. Elle doit, par ailleurs, préparer un budget semi-glissant à moyen terme sur trois ans. En effet, depuis 2009, la préparation du projet de loi de finances de l’année s’effectue dans le cadre d’une programmation budgétaire triennale. Celle-ci concerne uniquement les dépenses et le périmètre étatique. Il s’agit d’une démarche de l’Exécutif pour maîtriser les dépenses de l’Etat.
Les administrations financières ont, donc, vu leur rôle évoluer ces dernières années sous l’effet des mêmes impératifs qui pèsent, à présent, sur le pouvoir politique. Au cours de ce processus, elles ont su s’adapter et s’approprier de nouvelles fonctions. Autant de choses qui sont de nature à leurs permettre de répondre aux enjeux des finances publiques contemporaines.
