Introduction
Les lois constitutionnelles des 24, 25 février et 16 juillet 1875 (loi du 24 février 1875, sur l'organisation du Sénat ; loi du 25 février 1875, sur l'organisation des pouvoirs publics ; loi du 16 juillet 1875, sur les rapports entre les pouvoirs publics) sont adoptées dans un contexte difficile tant du point de vue politique avec la chute du Second Empire, qui donna naissance à une opposition forte entre républicains et monarchistes, que sur le plan international après une lourde défaite à l’issue de la guerre franco-prussienne quelques années auparavant et la cession de l’Alsace-Moselle. Le temps qui s’est écoulé pour doter la France d’un régime politique et d’institutions aura été particulièrement long. L’objectif premier est donc de tenter de mettre en œuvre un régime équilibré et stable qui puisse satisfaire les françaises et les français.
Malgré les efforts, les débuts de la IIIe République sont difficiles. Comme le rappelle le Professeur Marcel MORABITO, « le laborieux équilibre imaginé par les lois constitutionnelles se révèle des plus hypothétiques. Il ne va pas tarder à être rompu au profit des républicains, ceux-ci imposant une nouvelle lecture de la Constitution, plus conforme à la tradition révolutionnaire » (M. Morabito, Histoire constitutionnelle de la France, 16e Ed, LGDJ, p. 327). Après la célèbre crise du 16 mai 1877 qui entraina concurremment la démission du républicain Jules Simon, alors Chef du gouvernement, puis quelques mois plus tard celle du Maréchal de Mac-Mahon, président de la République monarchiste, l’élection de Jules Grévy à la présidence va rompre l’équilibre initialement espéré. Dans son message aux chambres, en février 1879, ce dernier a annoncé aux parlementaires son intention de ne pas s’opposer et de les laisser dicter la politique nationale. Très vite, la soumission de l’exécutif par rapport au Parlement est prégnante, ce qui ne manque pas d’engendrer une instabilité ministérielle régulière, sauf à de rares occasions comme la période de la Première Guerre mondiale.
Malgré tout, les textes constitutionnels de la IIIe République sont marqués par la longévité de leur application, faute de pouvoir mettre en œuvre un autre régime. Les textes s’appliqueront effectivement de 1875 à juillet 1940, soit près de 65 ans. Dès lors, se pose légitimement la question de potentielles évolutions des trois textes durant cette longue période. Il faut dire que l’article 8 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 précise ainsi les contours de la procédure de révision : « Les chambres auront le droit, par délibérations séparées prises dans chacune à la majorité absolue des voix, soit spontanément, soit sur la demande du Président de la République, de déclarer qu'il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles. - Après que chacune des deux chambres aura pris cette résolution, elles se réuniront en Assemblée nationale pour procéder à la révision. - Les délibérations portant révision des lois constitutionnelles, en tout ou en partie, devront être prises à la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale. - Toutefois, pendant la durée des pouvoirs conférés par la loi du 20 novembre 1873 à M. le maréchal de Mac-Mahon, cette révision ne peut avoir lieu que sur proposition du Président de la République ». La révision est plutôt simplifiée, elle ne fait pas intervenir le peuple par un vote comme on peut le connaitre sous la Ve République aujourd’hui. Les monarchistes ont notamment pris soin d’y intégrer des dispositions qui leur sont plutôt favorables : la possibilité d’instaurer un nouveau régime qui ne soit pas républicain en révisant l’ensemble des textes constitutionnels ; de même que le monopole de l’initiative en la matière à destination du seul président de la République durant le septennat de Mac-Mahon. De leur côté, les républicains souhaitaient pouvoir renforcer aisément le régime parlementaire dès que cela serait possible.
Finalement, les lois de la IIIème République seront révisées à quelques reprises durant ces soixante-cinq ans d’existence (I), tandis que d’autres tentatives de révisions ne réussiront pas à aboutir (II).
I - L'adoption de plusieurs révisions constitutionnelles sous la IIIe République
Les soixante-cinq années écoulées entre 1875 et 1940 enregistrent des révisions importantes (A), mais aussi d’autres révisions dont le contenu reste relativement mince (B).
A - Des révisions constitutionnelles importantes
Deux textes de révision constitutionnelle vont être particulièrement importants : la loi constitutionnelle du 14 août 1884, visant à renforcer le caractère républicain du régime (1) et la loi constitutionnelle du 10 juillet 1940, visant à mettre fin à la IIIe République (2). Leurs objectifs sont d’ailleurs, il faut le remarquer, pleinement opposés.
1 - La loi constitutionnelle du 14 août 1884 : le renforcement du régime républicain
Si les textes constitutionnels de la IIIe République émanent d’un compromis entre monarchistes et républicains, nous l’avons dit l’opposition entre ces deux idéologies demeure extrêmement forte, en particulier jusqu’à l’accession de Jules Grévy à la présidence de la République en 1979. Le principal apport de cette révision constitutionnelle de 1884 (sur le sujet, v. N. Droin, « Retour sur la loi constitutionnelle de 1884 : contribution à une histoire de la limitation du pouvoir constituant dérivé », RFDC, 2009) est l’introduction d’une clause d’éternité sur le caractère républicain du régime et sur l’éviction de tout retour possible de la monarchie. L’article 2 de la loi constitutionnelle du 14 août 1884 vient donc réviser la loi constitutionnelle du 25 février 1875, ajoutant à l’article de cette dernière les dispositions suivantes : « La forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une proposition de révision. Les membres des familles ayant régné sur la France sont inéligibles à la présidence de la République ». Le texte de révision vient également modifier le délai, en son article 1, pour la tenue de nouvelles élections en cas de dissolution de la chambre. Le délai passe ainsi de trois mois à deux mois. Par ailleurs, l’article 3 de ce texte de révision ne manque pas de supprimer le caractère constitutionnel des articles 1 à 7 de la loi constitutionnelle du 24 février 1875 sur le Sénat, entrainant des modifications par voie législative de cette institution plutôt conservatrice. Dans la foulée, les sénateurs à vie seront ainsi notamment supprimés par le législateur (loi du 10 décembre 1884). Enfin, l’article 4 de cette révision constitutionnelle supprime une référence à la religion qui figurait à l’article 1er de la loi du 16 juillet 1975 : « Le dimanche qui suivra la rentrée [parlementaire], des prières publiques seront adressées à Dieu dans les églises et dans les temples pour appeler son secours sur les travaux des assemblées ». On le voit bien, cette révision est importante, car elle gomme un certain nombre d’éléments plutôt favorable à la monarchie, pour garantir la pérennité de la IIIe République.
2 - La loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 : la fin de la IIIe République
La révision de 1884 et l’instauration d’une clause d’éternité relative au maintien du caractère républicain du régime n’auront guère l’effet escompté. En tout cas, elle a bien permis à la monarchie de ne pas être réinstaurée, sans prémunir la France de la mise en œuvre d’un autre régime autoritaire près de 50 ans plus tard. Dans le contexte désastreux de la défaite de l’armée française et du début de l’Occupation en 1940, les parlementaires font peu de cas de ce caractère républicain du régime qui doit être préservé et ne peut faire l’objet d’une révision. Sans évoquer les questionnements autour de la légitimité et de la légalité des opérations constitutionnelles menées à Vichy (cf. Fallait pas faire du droit, document sur les actes constitutionnels de Vichy), il faut rappeler que les parlementaires – tout du moins une partie d’entre eux – ont accepté de modifier l’article 8 qui concernait la révision constitutionnelle. Ce même article prévoyait, en effet, que la révision devait être adoptée à la majorité absolue des membres composant le Parlement, tandis que la loi du 10 juillet 1940 fût adoptée seulement à la majorité absolue « des membres présents ». Près de 200 députés et sénateurs restaient empêchés durant cette période difficile. L’adoption de la loi constitutionnelle du 10 juillet vient finalement réviser la procédure de révision en confiant tout pouvoir « au gouvernement de la République, sous l'autorité et la signature du maréchal Pétain, à l'effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l'État français ». Par ailleurs, le texte précise que la nouvelle Constitution « sera ratifiée par la Nation et appliquée par les Assemblées qu'elle aura créées ». Finalement, le projet de Constitution ne sera jamais présenté aux français, tandis que le Régime autoritaire de Vichy détient tous les pouvoirs pendant près de 4 ans. Cette révision majeure d’un « autre genre » sera finalement responsable de la fin de la IIIe République, que les français confirmeront par référendum une fois la France libérée.
B - Des révisions constitutionnelles plus minimes
D’autres révisions constitutionnelles, très minimalistes, sont adoptées sous la IIIe République. On peut citer en particulier la loi constitutionnelle du 21 juin 1879 (1) et celle du 10 août 1926 (2).
1 - La loi constitutionnelle du 21 juin 1879
Il s’agit ici avant tout d’une révision symbolique, la première de la IIIe République, qui résulte des années difficiles qui ont mené à la IIIe République. Les évènements de la Commune de Paris ont marqué l’histoire de France durant quelques mois au début de l’année 1871. Ces évènements résultent à la fois de la chute du Second Empire, de la capitulation de la France dans la guerre franco-prussienne, mais aussi d’une opposition entre une capitale française très républicaine et une Assemblée nationale plus conservatrice. Dès lors, les mouvances révolutionnaires renforcées par différentes professions de la capitale vont participer à une insurrection sanglante qui déstabilise le pouvoir. L’Assemblée nationale est, dès lors, déplacée très momentanément à Bordeaux pour échapper aux assauts dans la capitale.
À partir du mois de mars 1871, l’Assemblée gagne Versailles où son siège sera établi. À la satisfaction des monarchistes et conservateurs, l’article 9 de la loi du 25 février 1875 relative à l’organisation des pouvoirs publics a fini par préciser que « le siège du pouvoir exécutif et des deux chambres est à Versailles ». La révision du 21 juin 1879 vient abroger les dispositions de l’article 9, permettant aux chambres de regagner la capitale, symbole d’un retour en grâce des républicains. Le Palais Bourbon et le Palais du Luxembourg sont donc réinvestis par les deux chambres du Parlement.
2 - La loi constitutionnelle du 10 août 1926
La Première Guerre mondiale est un point important dans l’histoire de la IIIe République tant en termes de défense que de coût financier. Aujourd’hui encore la question de la dette publique est brûlante. L’idée de la révision constitutionnelle du 10 août 1926 est de donner un caractère constitutionnel à « l'autonomie de la caisse de gestion des bons de la défense nationale et d'amortissement de la dette publique », ajoutée ainsi à la loi constitutionnelle du 25 février 1875. Cette révision fait suite à une proposition de Raymond Poincaré, ancien président de la République, qui devient Chef du gouvernement. Ce dernier souhaitait réinstaurer une certaine confiance alors que la situation budgétaire et les mesures prises à l’époque sont particulièrement impopulaires. La loi constitutionnelle du 10 août 1926 ajoute également que « Seront affectés à cette caisse, jusqu'à l'amortissement complet des bons de la défense nationale et des titres créés par la caisse : 1° Les recettes nettes de la vente des tabacs ; 2° Le produit de la taxe complémentaire et exceptionnelle sur la première mutation des droits de succession et les contributions volontaires ; Le produit des ressources ci-dessus énumérées au cours du premier exercice qui suivra la promulgation de la présente loi, constitue la dotation annuelle minimum de la caisse d'amortissement. 3° En cas d'insuffisance des ressources ci-dessus pour assurer le service des bons gérés par la caisse et des titres créés par elle, une annuité au moins égale, inscrite au budget ».
II - L'inachèvement de certaines révisions constitutionnelles sous la IIIe République
Certaines idées de révisions constitutionnelles, plus ou moins séduisantes, vont être proposées sans aboutir sous la IIIe République. C’est particulièrement le cas d’un certain nombre de propositions émanant des parlementaires (sur le sujet, v. A. Granero, « Les révisions constitutionnelles non abouties sous la Troisième République », RFDC, 2013). Il en est également ainsi du projet de révision important présenté en 1934 par Gaston Doumergue (A), mais aussi d’un certain nombre de propositions du président Millerand quelques années auparavant (B).
A - Un projet de réforme institutionnelle présenté par Gaston Doumergue
Un projet d’ampleur est présenté, dans le contexte de la crise du début des années 1930, d’abord par le député André Tardieu (1), avant d’être repris par le Chef du gouvernement, Gaston Doumergue, qui n’arrive pas malgré tout à obtenir un large consensus sur le texte (2).
1 - Un projet incertain initié par André Tardieu
La France subit, comme d’autres pays d’Europe et du monde, les effets néfastes de la crise économique de 1929. De la même façon, les difficultés des pouvoirs publics pour agir suscitent l’émoi et une tension particulière. Des groupuscules extrémistes s’engouffrent dans la brèche et travaillent à une dénonciation profonde et violente du parlementarisme, présenté comme « responsable » des malheurs du pays. Les émeutes du 6 février 1934 montrent la tension extrême dans laquelle la IIIe République est plongée, vacillant alors que l’Assemblée manque d’être attaquée durant la nuit par des groupes violents. C’est seulement quelques heures avant cette émeute que le député André Tardieu, ancien président du Conseil, conscient des difficultés du moment, publie un certain nombre de propositions pour réformer les institutions de la IIIe République. Il fait le constat d’une instabilité ministérielle importante et d’un dérèglement profond du régime. Il propose notamment : de remplacer la dénomination de Président du Conseil par celle de Premier ministre ; de proposer le recours à une procédure référendaire ; d’accorder le droit de vote aux femmes ; de donner le pouvoir de dissolution au Chef du gouvernement. En février 1934, André Tardieu devient ministre d’État au sein du gouvernement mené par Gaston Doumergue. Dès lors, il aura « l’oreille » du gouvernement pour tenter de travailler à mettre en œuvre une telle révision des institutions de la IIIe République.
2 - Le rejet d’une Constitution « Doumergue » ne faisant pas consensus
L’ancien président de la République, Gaston Doumergue, revient quelques années après son mandat (1924-1931) pour présider cette fois le Conseil des ministres comme Chef du gouvernement. Conseillé par Tardieu, il fit créer des deux commissions parlementaires en charge de la réforme de l’État et des institutions. Le président du Conseil met un certain temps à se prononcer publiquement sur les différentes réformes envisagées tant par Tardieu que par les parlementaires travaillant sur le sujet. Dans plusieurs communications publiques, à l’automne 1934, Gaston Doumergue propose plusieurs réformes dont certaines étaient plus ou moins évoquées jusqu’alors : limiter le nombre de ministres ; remplacer le Président du Conseil par un Premier ministre ; donner un statut aux fonctionnaires ; refus des propositions de dépenses nouvelles par les chambres ; réhabilitation du droit de dissolution sans l’aval du Sénat…
Pour autant, certains considèrent que la réforme proposée ne va pas aussi loin qu’espérer. D’autres à gauche considèrent qu’il faut s’opposer à cette réforme. Le parti radical apparait comme le groupement le plus farouchement opposé à cette révision constitutionnelle au sein du Parlement. Les réflexions de Tardieu et Doumergue ne manqueront pas d’irriguer les travaux constitutionnels des IVe et Ve Républiques.
B - Des propositions institutionnelles novatrices présentées par Alexandre Millerand
Alexandre Millerand apparait comme un défenseur d’une stabilité retrouvée (1), mais la pratique qu’il met en œuvre comme président de la République ne se concrétise finalement par en révision constitutionnelle (2).
1 - Une stabilité déjà recherchée dans les idées développées par Millerand
Alexandre Millerand s’est montré comme un ardant défenseur de la fonction présidentielle, à même de représenter prioritairement la France. Dès novembre 1919, il avait milité avec force en faveur d’une révision constitutionnelle avec cet objectif. Dans son célèbre discours du Ba-Ta-Clan, il se prononce en faveur d’un élargissement du collègue électoral, souhaitant faire élire le Président de la République par un corps plus imposant qui ne saurait se limiter aux seuls parlementaires. Pour lui, il est clair que, sans aller jusqu’au suffrage universel direct que l’on connait aujourd’hui, le Président doit pouvoir apparaitre comme le véritable représentant de la Nation. Dans le même esprit, il avait eu l’occasion de se prononcer en faveur d’un renouvellement de l’usage du droit de dissolution largement abandonné depuis Grévy. Millerand ne remet pas en cause le régime parlementaire, mais annonce ainsi clairement vouloir sa rationalisation pour éviter l’instabilité. Au moment de se présenter à la présidence de la République, Alexandre Millerand a très clairement annoncé son intention d’être un président réformateur des institutions, qui ne saurait être l’homme d’un camp politique. Les similitudes présentées avec ce que nous connaissons du président gaullien de la Ve République sont assez étonnantes quand on sait que ces propositions datent du début des années 1920. Malgré l’absence de soutien du président sortant, Alexandre Millerand accède à l’Élysée où il compte bien mettre en pratique ses idées.
2 - Une pratique ne se concrétisant pas en révision constitutionnelle
Considérant qu’il faut inverser la pratique des institutions, trop favorable à un parlementarisme absolu, le président Millerand n’hésite pas à faire preuve d’une certaine autorité et à occuper pleinement la fonction pour laquelle il avait été élu. En 1922, il conduisait ainsi le Chef du gouvernement, Aristide Briand, à démissionner suite à des désaccords sur la politique étrangère avec l’Allemagne. Comme président, il prononce à Évreux un célèbre discours, à l’automne 1923, dans lequel il réaffirme les idées qu’il avait pu évoquer depuis quelques années, à savoir l’encadrement du pouvoir législatif pour éviter les dérives et l’instabilité. Le 11 juin 1924, Millerand est poussé à la démission, refusant d’abandonner ses idées. Il écrit alors : « Fidèle au premier devoir du président de la République, qui est le respect scrupuleux des volontés du suffrage universel, je me suis tourné vers les hommes politiques qu'il avait désignés : j'entendais collaborer avec eux en toute loyauté à la gestion des affaires publiques. À mes offres ils ont répondu par un refus. Ils ont exigé ma démission, prétention injustifiable violemment opposée à l'esprit comme à la lettre de la loi constitutionnelle. Si notre Constitution remet le choix du chef de l'État uniquement aux mains des parlementaires, elle a eu du moins la prudence de disposer qu'une fois élu, il n'aurait, sauf le cas de haute trahison, à rendre des comptes à personne pendant la durée de son septennat. Une décision inspirée par l'esprit de parti à quelques meneurs vient de jeter bas cette garantie. Sous leur pression, des réunions extra-parlementaires ont déclaré que le président de la République ne plaisant pas à la majorité de la Chambre nouvelle devait se retirer immédiatement, sans attendre le terme légal de son mandat. Précédent redoutable qui fait de la présidence de la République l'enjeu des luttes électorales, qui introduit par un détour le plébiscite dans nos mœurs politiques et qui arrache à la Constitution le seul élément de stabilité qu'elle renfermât. J'aurais cru commettre une félonie en me faisant — ne fut-ce que par mon inertie — le complice d'une nouveauté si grosse de périls. J'ai résisté. Je ne cède qu'après avoir épuisé tous les moyens légaux en mon pouvoir ». Ne pouvant mener le pays vers une révision des institutions ou, au moins vers une évolution de sa pratique institutionnelle, la démission d’Alexandre Millerand entraine une nouvelle élection. Son successeur Gaston Doumergue, comme nous l’avons vu, ne parviendra pas non plus à réformer les institutions de la IIIe République.
