Introduction

La décentralisation territoriale implique un transfert d’attributions administratives à des personnes publiques qui, sous le contrôle de l’État, bénéficient d’une réelle autonomie de gestion.  Ce phénomène a connu, en France, un lent processus de maturation de la Révolution de 1789 jusqu’à nos jours, avec une nette accélération à compter du dernier quart du XX° siècle.

Existent, ainsi, à l’heure actuelle, trois niveaux de décentralisation : la commune, le département et la région. Les deux premiers sont en charge des services publics et équipements de proximité, quand le troisième assure, avec l’Etat, le pilotage des orientations stratégiques du pays. Ces trois collectivités ont bénéficié de larges transferts de compétences avec les lois du 07/01/1983 et du 22/07/1983, mouvement renforcé par la loi du 13/08/2004 relative aux libertés et responsabilités locales et parachevé par la loi NOTRe du 07/08/2015.  Elles disposent, toutes, d’un organe délibératif et d’un exécutif. A côté de ces collectivités au statut uniforme, existent, également, des collectivités dont le statut est particulier pour des motifs historiques, démographiques ou géographiques.

Pour autant, le système décentralisé français souffre de nombreux handicaps. Il est, d’abord, caractérisé par un éparpillement qui est coûteux et qui nuit à l’efficacité de l’action administrative. Les compétences sont, par ailleurs, fortement imbriquées, ce qui rend malaisé le pilotage de certains projets. Enfin, les collectivités locales ne bénéficient pas d’une réelle autonomie financière à même de garantir le respect du principe de libre administration posé par l’article 72 de la Constitution. Ces collectivités dépendent, en effet, largement de la volonté de l’Etat qui, d’une part, détermine les recettes fiscales qui leurs sont allouées et, d’autre part, leurs attribue des dotations financières.

Il convient, donc, d’étudier le statut des communes (I), des départements (II), des régions (III) et des collectivités à statut particulier (IV).

I – Les communes

Pour exercer leurs compétences (B), les communes disposent de deux organes (A). Par ailleurs, face à l’émiettement communal, source d’inefficacité, diverses formules de coopération intercommunale ont été mises en place (C).

A - Les organes des communes

Les communes disposent d’un conseil municipal (1) et d’un maire (2).

1 – L’organe délibératif : le conseil municipal

Le conseil municipal voit sa composition, son fonctionnement et ses attributions encadrés par le Code général des collectivités territoriales (CGCT).

S’agissant de la composition, il faut noter que les conseillers municipaux, dont le nombre va de 7 pour les communes de moins de 100 habitants à 69 pour celles de 300 000 habitants ou plus, sont élus pour un mandat de 6 ans. Leur régime électif varie selon le nombre d’habitants de la commune.

Ainsi, pour celles de moins de 1 000 administrés (et non plus 3 500 depuis la loi du 17/05/2013), le conseil municipal est élu dans le cadre d’un scrutin majoritaire à deux tours sur des listes où le panachage est possible.

Dans les communes de plus de 1 000 habitants, le régime électif mélange système majoritaire et système proportionnel afin d’assurer une représentation de toutes les sensibilités, tout en conservant la possibilité d’obtenir une majorité stable. Ainsi, lorsqu’une liste obtient la majorité absolue des votants au premier tour, elle se voit attribuée la moitié des sièges et participe, avec les autres listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés, à la répartition proportionnelle des sièges restants. Si aucune liste n’a recueilli la majorité absolue au premier tour, un second tour est organisé auquel ne peuvent participer que les listes ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés : la liste qui obtient la majorité relative bénéficie de la moitié des sièges et les sièges restants sont répartis à la proportionnelle entre toutes les listes ayant obtenue au moins 5 % des suffrages (y compris la liste arrivée en tête).

Les listes présentées doivent respecter la parité hommes / femmes dans les communes de plus de 1 000 habitants (loi du 06/06/2000 et loi du 17/05/2013, notamment). Les avancées de la parité sont, toutefois, contrastées : dans les communes de moins de 1 000 habitants, les femmes représentent 37,6 % des conseillers municipaux après les élections de 2020 contre 46,6% dans les communes de 1 000 habitants et plus. Pour autant, les femmes ne représentent, en 2020, que 19,8 % des maires.

S’agissant du fonctionnement, le conseil municipal se réunit obligatoirement une fois par trimestre, mais le maire peut décider de le convoquer chaque fois qu’il l’estime nécessaire. Afin de renforcer les garanties démocratiques, certaines règles ont été instaurées. Ainsi, le conseil municipal doit élaborer, dans les communes de plus de 3 500 habitants, un règlement intérieur d’organisation de ses travaux qui peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Les conseillers municipaux doivent, par ailleurs, recevoir communication des rapports et ordre du jour plusieurs jours avant chaque conseil. Les séances sont publiques (sauf si le maire ou trois conseillers demandent que les séances se tiennent à huit clos). Et, les délibérations doivent faire l’objet d’une publicité sur un registre spécial et par voie d’affichage.

Enfin, sur le plan des attributions, l’article L 2121-29 du CGCT prévoit que le conseil municipal « règle par ses délibérations les affaires de la commune ». Il est habilité à statuer sur toutes les questions « d’intérêt public communal », sous réserve qu’elles ne soient pas dévolues par la loi à l’État ou à d’autres personnes publiques et qu’il n’y ait pas d’empiétement sur les pouvoirs du maire. C’est, ainsi, que le conseil municipal vote le budget, fixe les taux des impositions locales, décide de la création des services publics municipaux, de la passation des contrats, de la gestion du patrimoine local, …

2 – L’organe exécutif : le maire

Le maire est élu par le conseil municipal pour la durée du mandat de ce dernier à la majorité absolue aux deux premiers tours, puis à la majorité relative au troisième. A la suite de cette désignation, sont, également, élus des adjoints dans la limite de 30 % des effectifs des conseillers municipaux. Elus pour seconder le maire dans l’exercice de ses compétences, ils bénéficient de délégations de pouvoirs que celui-ci peut leur accorder et leur retirer discrétionnairement.

Afin d’apporter aux maires, dont la tâche est de plus en plus complexe, des garanties, un statut de l’élu local s’est progressivement mis en place : rémunération, garanties d’emploi, protection civile et pénale, congés. Sur le plan disciplinaire, les maires et les adjoints peuvent être suspendus pour un mois par arrêté motivé du ministre de l’Intérieur ou révoqués par décret motivé pris en Conseil des ministres.

Les pouvoirs du maire sont relativement importants. Celui-ci est, en effet, à la fois, un agent de la commune et un agent de l’État. Dans cette seconde hypothèse, le maire, qui agit au nom de l’Etat et engage la responsabilité de ce dernier, assure l’exécution des lois, bénéficient d’attributions d’officier de police judiciaire et d’officier d’état civil (célébration des mariages, registre des naissance, …).

En tant qu’agent de la commune, le maire engage la responsabilité de cette dernière. Il prépare le budget, l’ordonnance une fois celui-ci voté, signe les marchés sitôt l’autorisation accordée par le conseil municipal, représente la commune en justice. Il peut, également, bénéficier de délégations de pouvoirs de la part du conseil municipal. Il dispose, enfin, d’attributions propres : recrutement et nomination des agents de la commune, direction des services communaux, exercice de la police administrative générale au niveau communal et de pouvoirs de police administrative spéciale.

B – Les compétences des communes

Les communes sont responsables des services publics de proximité (1) et disposent, également, de compétences en matière économique (2).

1 - Les services publics de proximité

Les communes doivent, d’abord, assurer certains services publics obligatoires. L’on trouve, ainsi, en matière de sécurité : la police municipale, les pompes funèbres, l’élimination des déchets ménagers, l’assainissement collectif, l’entretien des voies publiques, ou, encore, la lutte contre l’incendie. D’autres services sont également à la charge des communes : la construction et l’entretien des écoles du premier degré, l’organisation matérielle du service public de l’enseignement primaire, les transports en commun en zone urbaine, …

Outre ces services publics obligatoires, les communes peuvent, également, créer divers services publics facultatifs. Certains sont prévus par la loi : par exemple, les ports de plaisance, les conservatoires, musées ou bibliothèques municipaux, la distribution de l’eau, le service public de l’urbanisme qui permet aux communes, depuis 1982, d’élaborer elles-mêmes les plans d’organisation de l’espace et de délivrer les autorisations d’urbanisme. D’autres sont créées de manière totalement spontanée par les communes en matière industrielle et commerciale : outre la nécessité de relever des affaires locales, leur légalité est également astreinte au respect de certains principaux fondamentaux (liberté du commerce et de l’industrie, droit de la concurrence).

2 – Attributions en matière économique

L’échelon d’intervention demeure en matière économique la région. Mais, les communes disposent, dans le cadre de leur mission de développement économique et de lutte contre la désertification rurale, de diverses possibilités d’aide aux entreprises privées. Elles peuvent, ainsi, accorder des garanties d’emprunt et des aides en matière d’investissement immobilier et de location. Les communes peuvent, également, en cas de défaillance de l’initiative privée en milieu rural, apporter des aides pour assurer le maintien de services nécessaires à la satisfaction de la population (aide au maintien d’une épicerie ou d’un bar-restaurant) ou confier ces services à une association ou à toute autre personne. Dans le même esprit, les communes peuvent attribuer des aides destinées à favoriser l’installation ou le maintien de professionnels de santé.

Cependant, afin de respecter la compétence de principe de la région en la matière, les aides accordées par les communes doivent être compatibles avec les orientations définies par le conseil régional dans le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation.

C – L'intercommunalité : un remède à l'émiettement communal

A l’inverse des autres pays européens, la France se caractérise par un profond émiettement communal. La France comptait, ainsi, au 01/01/2022, 34 955 communes. Nombre d’entre elles ne compte que quelques dizaines ou centaines d’habitants, ce qui grève l’efficacité de leur action et conduit à un éparpillement de la dépense publique. Aussi, l’Etat a développé différents procédés de coopération intercommunale qui, tout en préservant l’existence de chaque commune, permettent la mise en commun de certaines compétences. Certaines coopérations sont souples (1), d’autres sont renforcées (2).

1 - La coopération souple : les syndicats de communes

La coopération souple entre communes peut se réaliser dans le cadre de syndicats de communes ou de syndicats mixtes qui constituent, tous deux, des EPCI. D’origine ancienne, ils connaissent un fort succès en raison de leur souplesse, même si leur nombre tend à diminuer sensiblement.

Les syndicats de communes, dont l’origine remonte à une loi du 22/03/1890, associent des communes en vue de la constitution et de la gestion d’équipements publics collectifs et de différents services publics (piscine, ramassage des ordures ménagères, transports, …). Ils ont joué et continuent de jouer un rôle important en milieu rural. Leur souplesse explique leur succès : en effet, une commune peut n’adhérer à un syndicat que pour une partie seulement des compétences qu’il exerce ; l’on parle, ainsi, de « syndicalisme à la carte ». Les syndicats de communes peuvent n’être constitués qu’en vue d’une seule tâche, l’on parle, alors, de syndicat à vocation unique (SIVU), ou pour des missions multiples, il s’agit, ici, de syndicats à vocation multiple (SIVOM). Dans le cas des SIVU, la création et les décisions interviennent à l’unanimité. Dans le cas des SIVOM, la constitution n’appelle pas l’unanimité des communes regroupées, mais une majorité qualifiée : soit les 2/3 des conseils municipaux représentant la moitié de la population, soit la moitié des conseils municipaux représentant les 2/3 de la population. Chaque syndicat, dont la création est actée par un arrêté préfectoral, est administré par un comité, en principe composé de deux délégués par commune, et un président élu par le comité. Il dispose d’un budget propre alimenté par les contributions obligatoires des communes et les taxes perçues sur les usagers des services gérés par le syndicat. Aucune fiscalité propre n’est, ici, possible. Au 1°/04/2022, il existait 4 705 SIVU (contre 9 721 au 1°/01/2013) et 1 215 SIVOM (contre 1 305 au 1°/01/2013).

Les syndicats mixtes sont deux sortes : les syndicats mixtes dits fermés qui n’associent que des communes ou des EPCI (ou uniquement des EPCI) et les syndicats mixtes dits ouverts qui peuvent associer des communes, des départements, des régions, des chambres de commerce et d’industrie, des établissements publics. Ces syndicats sont constitués en vue de tout projet d’intérêt commun. La formule est très utilisée pour gérer des services à un niveau territorial pertinent, comme les transports en commun ou, encore, la planification en matière d’urbanisme. Certaines structures créées récemment relèvent de cette catégorie : il en va ainsi des pôles métropolitains et du pôle d’équilibre territorial et rural. Leur souplesse explique le succès qu’ils ont longtemps rencontré avant de connaître un léger recul : au 1°/04/2022, on comptait 2 780 syndicats mixtes (majoritairement fermés), contre 3 265 au 11°/01/2015.

2 - La coopération renforcée : les communautés et les métropoles

C’est la loi du 12/07/1999, dite loi Chevènement, qui a profondément remanié les formules de coopération institutionnelle entre communes. Cette loi vise à simplifier et mettre en cohérence les différentes structures de coopération intercommunale. Cet effort a été poursuivi par la loi du 16/12/2010 qui a, notamment, renforcé la légitimité démocratique de ces structures en permettant que les représentants des communes membres soient désignés au suffrage universel direct (en même temps que les conseillers municipaux) dans les communes de plus de 1 000 habitants. Par ailleurs, la loi du 7/08/2015 impose la création, dans tout EPCI à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants, d’un conseil de développement, composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels, éducatifs, scientifiques, environnementaux et associatifs dont le rôle est purement consultatif.

À la différence des syndicats financés par les subventions des communes, il s’agit, ici, d’une intercommunalité de projet : ces structures fédératives sont, en effet, dotées d’une fiscalité locale propre et disposent du droit de prélever l’impôt soit à la place des communes, soit de manière additionnelle aux impôts prélevés par les communes. Certaines sont propres aux territoires ruraux, d’autres aux territoires urbains. Au 1°/04/2022, il existait 1 254 EPCI à fiscalité propre.

Les territoires ruraux

Afin de répondre à l’émiettement communal en milieu rural, source de mauvaise gestion et de gaspillage, le législateur a tenté de diminuer le nombre de communes par deux procédés de fusion de communes. Le premier dispositif a été instauré par la loi du 16/07/1971 : il permettait au préfet de prononcer la fusion de plusieurs communes soit par simple accord des communes, soit après référendum local. Face aux craintes de désertification rurale, cette procédure fut un échec, puisque seule 1 068 communes ont été supprimées.  Aussi, la loi du 16/12/2010 a supprimé cette procédure et l’a remplacée par la possibilité de créer une commune nouvelle, toujours sur le mode du volontariat. Cette création se réalise soit par fusion de communes contiguës, soit par transformation d’un EPCI en commune nouvelle. Elle est toujours prononcée par arrêté préfectoral. Quatre hypothèse peuvent se présenter. La première est celle d’un accord unanime des conseils municipaux. Les trois autres hypothèses présentent deux points communs : exigence d’une majorité qualifiée (deux tiers des conseils municipaux et de la population) et d’un référendum local. Ils diffèrent quant à l’initiative : préfet, conseils municipaux des communes membres d’un EPCI à fiscalité propre ou demande de l’organe délibérant d’un tel EPCI. Des incitations financières existent et, pour faciliter la transition, il est prévu le maintien de « communes déléguées », représentation matérielle des anciennes communes, avec un maire délégué et une annexe de la mairie. Cette nouvelle procédure a connu quelques résultats : en effet, au 01/01/2021, 778 communes nouvelles ont été créées représentant 2 512 communes regroupées.

Les communautés de communes ont été instituées par la loi du 06/02/1992. Elles sont destinées au milieu rural et semi-urbain. Aucun seuil démographique n’est prévu. Elles sont créées par arrêté préfectoral avec l’accord de la majorité qualifiée des communes et doivent être d’un seul tenant et sans enclave. Leur conseil est composé de représentants de chaque commune, dont le nombre est proportionnel à l’importance de leur population. Elles exercent de plein droit, en lieu et place des communes membres, sept compétences : aménagement de l’espace urbain et rural, actions de développement économique, collecte et traitement des déchets des ménages, accueil des gens du voyage, gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, eau et assainissement. Elles peuvent, en outre, se voir transférer, par décision des conseils municipaux des communes membres prise à la majorité qualifiée requise pour leur création et en tout ou partie, sept autres compétences : environnement, logement et cadre de vie, politique de la ville, voirie, équipements scolaires, culturels et sportifs, action sociale, participation à une convention « France services » destinée à améliorer les services au public, notamment en milieu rural. Sur le plan financier, elles peuvent opter, soit pour un régime de fiscalité additionnelle aux impôts communaux, soit pour une fiscalité propre dans le cadre de laquelle elles perçoivent la contribution économique territoriale dont le taux est unique pour l’ensemble des communes et dont elles conservent une partie du produit. Elles bénéficient, aussi, d’une forte aide financière avec une augmentation de la part de DGF par habitant. Cette formule remporte un réel succès : au 1er avril 2022, la France compte 992 communautés de communes.

Les territoires urbains

Les communautés d’agglomération sont adaptées aux villes moyennes et à leur périphérie. Il s’agit d’un EPCI regroupant des communes formant un ensemble d’un seul tenant et sans enclave de plus de 50 000 habitants (réduit à 30 000 lorsque la communauté comprend le chef-lieu du département) autour d’une ou plusieurs communes centre d’au moins 15 000 habitants. Leur création est décidée par le préfet après accord des communes à la majorité qualifiée (2/3 des conseils municipaux représentant la moitié de la population ou la moitié des conseils municipaux représentant les 2/3 de la population). L’on retrouve un conseil composé de représentants de chaque commune, dont le nombre varie en fonction de leur population, et un président. La communauté se voit confiée de plein droit, à la place des communes membres, dix compétences : développement économique, aménagement de l’espace communautaire, politique d’équilibre social de l’habitat, politique de la ville, gestion des milieux aquatiques, accueil des gens du voyage, collecte et traitement des déchets ménagers, eau, assainissement, gestion des eaux pluviales. À la majorité qualifiée requise pour la création, les conseils municipaux des communes concernées peuvent lui transférer, en tout ou partie, cinq autres compétences : voirie et parcs de stationnement d’intérêt communautaire, protection de l’environnement et du cadre de vie, équipements culturels et sportifs, action sociale, participation à une convention « France services », destinée à améliorer les services au public, notamment en milieu rural. Sur le plan financier, elles bénéficient des impositions relatives aux compétences qu’elles exercent et perçoivent directement la contribution économique territoriale, dont le taux uniformisé est voté par le conseil de la communauté. Elles peuvent aussi percevoir, sur décision de leur conseil, une fiscalité additionnelle aux autres taxes locales. Des mesures incitatives sont, également, prévues : elles perçoivent, ainsi, une part majorée de la DGF. Ce système connaît un grand succès puisqu’au au 1°/04/2022, il existait 227 communautés d’agglomération.

Les communautés urbaines sont destinées aux grandes villes et à leur périphérie. Elles regroupent plusieurs communes d’un seul tenant et sans enclave qui forment un ensemble de plus de 250 000 habitants. Elles sont créées par le préfet selon les règles habituelles de la majorité qualifiée (2/3 – ½). Elles sont administrées par un conseil composé des délégués des différentes communes, répartis proportionnellement à l’importance de leur population.  Le conseil élit un président qui exécute ses délibérations et représente la communauté dans les actes de la vie juridique. Elles exercent, de plein droit en lieu et place des communes membres, les 7 compétences suivantes : développement et aménagement économique, social et culturel de l’espace communautaire,   aménagement de l’espace communautaire, notamment en matière de planification urbaine, politique de logement social et de réhabilitation, politique de la ville, gestion de certains services d’intérêt collectif, protection et mise en valeur de l’environnement et du cadre de vie, aménagement et gestion des aires d’accueil des gens du voyage. Sur le plan financier, elles perçoivent la contribution économique territoriale à taux unique, les autres impôts directs, ainsi qu’une part importante de la DGF. Au 1°/04/2022, il existait 14 communautés urbaines.

Enfin, les métropoles ont été créées par la loi du 16/12/2010. Elles visent à doter les très grandes agglomérations d’un statut à leur mesure dans un contexte de mondialisation. Cependant, cette initiative n’a connu que peu de succès, puisque seule la métropole de Nice Côte d’Azur a été créée. Aussi, la loi du 27/01/2014 a réformé cette formule. Elle a, ainsi, décidé qu’au 01/01/2015 les EPCI à fiscalité propre qui forment un ensemble de plus de 400 000 habitants dans une aire urbaine de plus de 650 000 habitants sont transformés par décret en métropole : ont été concernés Bordeaux, Brest, Grenoble, Lille, Nantes, Nice, Rennes, Rouen, Strasbourg et Toulouse. En dehors de cette hypothèse, à la condition que les 2/3 au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de leur population (ou l’inverse) soient d’accord, le statut de métropole peut, également, être attribué par décret à certains EPCI : il en est allé de la sorte pour les EPCI de Toulon, Mets, Nancy, Tours, notamment. Ainsi, au 1°/04/2022, il existait 21 métropoles. Sur le plan organisationnel, la métropole est administrée par un conseil avec à sa tête un président. Ce dernier préside, par ailleurs, une conférence métropolitaine comprenant les maires des communes dont la mission est d’être une instance de coordination et de concertation. Un conseil de développement est, aussi, consulté sur les projets de développement et de planification. S’agissant des compétences obligatoires, ce sont celles qui sont de plein droit exercées en lieu et place des communes membres et celles qui appartenaient à l’EPCI auquel la métropole succède. Pour les compétences facultatives, cela dépend des conventions passées avec l’Etat, la région et le département qui peuvent leurs transférer ou leur déléguer certaines compétences. A côté de ces métropoles de droit commun, la loi du 27/01/2014 a, également, institué trois métropoles à statut particulier : Lyon, Aix-Marseille et le Grand Paris. La métropole de Lyon est une collectivité territoriale à statut particulier (art. 72 de la Constitution) qui se substitue à la communauté urbaine de Lyon mais aussi, dans ses limites territoriales, au département du Rhône. Elle est dotée d’une assemblée délibérante, dont les membres seront élus au suffrage universel direct, et d’un organe exécutif. Elle exerce à la fois les compétences d’une métropole de droit commun et celles d’un département. Les métropoles du Grand Paris et d’Aix-Marseille sont, en revanche, des EPCI à fiscalité propre qui relèvent du régime de droit commun des métropoles sous réserve d’adaptation. La métropole du Grand Paris regroupe Paris et les 123 communes des départements de la petite couronne et se substitue aux EPCI qui réunissaient ces dernières. Elle est administrée par un conseil, composé de conseillers métropolitains élus, et par le président de ce conseil. L’originalité de son organisation tient à l’existence de structures intermédiaires entre la métropole et les communes membres. La métropole d’Aix-Marseille regroupe l’ensemble des communes membres de six EPCI situés dans le département des Bouches-du-Rhône, dont la communauté urbaine de Marseille, auxquels elle se substitue. Elle est divisée en territoires non personnalisés mais dotés d’un conseil et d’un président auxquels certaines compétences peuvent être déléguées.

II - Les départements

Les départements ont été créés par les lois des 15 janvier et 16 février 1790. Le découpage a été réalisé de telle façon que le chef-lieu ne puisse être à plus d’une journée de cheval de chaque point du territoire délimité. Souvent critiqués, les départements sont, progressivement, devenus le support d’une identité territoriale et d’un attachement des populations, d’où la difficulté de les réformer. A l’heure actuelle, la France compte 96 départements dans l’hexagone et 5 en outre-mer.

Comme pour la commune, le département dispose de deux organes (A) et a bénéficié depuis les réformes décentralisatrices menées à compter de 1982 de larges transferts de compétences qui tendent à être remis en cause aujourd’hui (B). Devra, enfin, être évoqué le cas particulier de la collectivité européenne d’Alsace qui constitue un département à part entière, malgré certaines spécificités (C).

A – Les organes des départements

Le département dispose d’une assemblée délibérative (1) et d’un exécutif (2).

1 – L’organe délibératif : le conseil départemental

Trois points doivent retenir l’attention : la composition, le fonctionnement et les attributions du conseil départemental.

En ce qui concerne la composition, il importe de relever les changements intervenus en 2013. Jusqu’à cette date, en effet, l’assemblée du département se dénommait « conseil général » et les conseillers généraux étaient désignés, pour six ans avec renouvellement par moitié tous les trois ans, au scrutin majoritaire uninominal à deux tours dans le cadre de la circonscription cantonale. La loi du 17/05/2013 a changé l’appellation de ladite assemblée : l’on parle, désormais, de conseil départemental. Surtout, en vue d’établir une représentation paritaire des hommes et des femmes, la loi de 2013 a institué un régime électif original de scrutin binominal qui s’est appliqué pour la première fois en 2015 : concrètement, dans chaque canton du département (dont le nombre a été divisé par deux), les électeurs désignent, au scrutin majoritaire à deux tours, deux conseillers départementaux de sexe différent qui exercent, ensuite, leur mandat indépendamment l’un de l’autre. Enfin, le conseil départemental est, à présent, renouvelé intégralement tous les six ans.

S’agissant du fonctionnement, le conseil départemental doit se réunir en session ordinaire au moins une fois par trimestre. Des sessions extraordinaires sont, cependant, possibles à la demande d’un certain nombre de membres de l’assemblée. Ici aussi, les exigences démocratiques ont été renforcées. Ainsi, le conseil doit établir son règlement intérieur dans le mois qui suit son renouvellement, ce dernier pouvant être contesté devant le juge administratif. L’ordre du jour et les rapports sur les affaires inscrites doivent, par ailleurs, être adressés à chaque conseiller plusieurs jours à l’avance. Et, les séances sont normalement publiques.

Enfin, pour ce qui concerne les attributions, le conseil départemental est chargé de régler par ses délibérations les affaires du département, ce qui inclue notamment : le vote du budget, la fixation du taux des impositions locales, la création et l’organisation des services publics départementaux, la gestion du domaine public départemental (notamment, routier).

2 – L’organe exécutif : le président du conseil départemental

Le président du conseil départemental (hier dénommé président du conseil général) est l’organe exécutif du département depuis la loi du 02/03/1982, en lieu et place du préfet. Il est élu par le conseil départemental pour la durée du mandat de ce dernier. Pour être élu au premier et au deuxième tour, le candidat doit avoir obtenu la majorité absolue des membres du conseil. La majorité relative suffit au troisième tour. Des vice-présidents sont, également, élus, auxquels le président du conseil départemental peut déléguer certains de ses pouvoirs. Ils composent, ensemble, ce que l’on nomme le bureau qui devient une sorte d’exécutif collégial.

Le président prépare et exécute les délibérations du conseil départemental, est l’ordonnateur des dépenses, prescrit l’exécution des recettes départementales, signe les contrats ou procède au recrutement des agents lorsque l’assemblée a autorisé la signature de la convention ou créé un emploi, gère le domaine et exerce les pouvoirs de police correspondant à ce dernier (notamment, celle de la circulation).

B – Les compétences des départements

Les départements avaient été les principaux bénéficiaires des transferts de compétences à la suite des réformes décentralisatrices réalisées à partir de 1982. La loi du 2/03/1982 leurs avait, ainsi, attribué la clause générale de compétence. Ce mouvement semble s’être inversé ces dernières années, notamment avec la loi NOTRe du 07/08/2015 : c’est, ainsi, que la clause de compétence générale leur a été retirée.

Les départements conservent, toutefois, des compétences significatives : ils interviennent principalement dans le domaine de la solidarité (1) et dans divers autres secteurs (2).

1 – Les compétences en matière de solidarité

La mission de solidarité des départements comprend deux volets : elle est sociale et territoriale.

L’action sociale est la mission traditionnelle du département. Cela inclue notamment : l’aide à l’enfance et aux jeunes en difficultés, la gestion de l’allocation personnalisée d’autonomie pour les personnes âgées, l’aide aux personnes handicapées, la mise en œuvre et le financement de la politique d’insertion (RSA, notamment). A ce titre, le département est la collectivité « chef de file », ce qui signifie qu’il définit et met en œuvre la politique en la matière, et coordonne l’action des différentes autres institutions intervenantes. Le département ne dispose, cependant, pas d’une totale liberté dans la gestion de ces questions dans la mesure où les principales aides sont étroitement règlementées, notamment quant aux conditions de leur versement, par les textes nationaux.

Le département poursuit, également, une mission de solidarité sur le plan territorial.  Il est, ainsi, chargé de mener, à son échelle, une action d’aménagement de son territoire de manière à éviter que les différentes parties de celui-ci ne connaissent des développements trop inégaux. Il élabore à cette fin un schéma départemental de la solidarité territoriale. Ces compétences s’exercent principalement en milieu rural.

2 – Les autres compétences

S’agissant des autres compétences, certaines sont maintenues, d’autres lui ont été retirées.

En matière économique, la loi NOTRe le prive de la plupart de ses prérogatives. Ainsi, il n’est plus consulté sur le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation. S’agissant des aides aux entreprises, il perd la plus grande partie de ses pouvoirs, sauf en ce qui concerne les aides qui visent un but de solidarité territoriale ou certaines aides spécifiques (installations des professionnels de santé, notamment).

En matière de transports et d’infrastructures de transport, le département disposait d’importantes compétences que la loi NOTRe est venue largement remettre en cause. C’est, ainsi, qu’ont été transférées à la région l’organisation des transports non urbains ou, encore, celles des transports scolaires. Le département demeure, en revanche, chargé de la création et de l’entretien des routes classées dans son domaine public dont le nombre a été fortement accru par la loi du 13/08/2004 (transfert de 20 000 km de routes nationales), ce qui représente un lourd poste budgétaire.

En matière d’environnement, le département garde des compétences conséquentes : chemins de grande randonnée, espaces naturels sensibles, aménagement et surveillance des forêts, …

En matière d’enseignement, le département conserve la construction et l’entretien des collèges, ainsi que la gestion des agents affectés à cette tâche.

Enfin, il reste responsable, avec le concours des communes, de l’organisation du service départemental d’incendie et de secours.

C – Le cas particulier de la collectivité européenne d'Alsace

L’idée de fusionner les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin au sein d’une collectivité unique est ancienne. Un premier projet de création d'une collectivité unique alsacienne exerçant les compétences régionales et départementales avait, ainsi, été rejeté par référendum le 7/02/2013. Mais, après la création de la région Grand-Est en 2016, région qui regroupe la Champagne-Ardenne, la Lorraine et l’Alsace (dont l’inclusion dans cette région a été mal vécue par les alsaciens), un certain nombre d’élus alsaciens souhaitaient donner une plus grande place institutionnelle à l’Alsace au sein de cet ensemble. Des discussions entre élus locaux et Gouvernement se sont, alors, donc engagées. Elles ont débouchées sur la signature, le 29/10/2018, d’une déclaration commune visant à la création d’une collectivité européenne d’Alsace (CeA).

Créée par la loi du 2/08/2019 et existant depuis le 1°/01/2021, cette nouvelle collectivité relève juridiquement de la catégorie des départements et n’est pas, contrairement à ce que son nom semble indiquer, une collectivité à statut particulier. Toutefois, afin de tenir compte des particularités de l’Alsace, ses compétences sont plus étendues que celles d’un département traditionnel. C’est, ainsi, que la CeA est compétente en matière d'organisation de la coopération transfrontalière (avec l’Allemagne et la Suisse) sur son territoire ; elle élabore à cette fin, en qualité de chef de file, un schéma de coopération transfrontalière, en association avec l’État, la région Grand-Est, la métropole de Strasbourg et les collectivités locales. Elle assure, également, la gestion des routes et autoroutes non concédées, classées dans le domaine public routier national, situées dans les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, promeut le bilinguisme par la mise en place d'un enseignement facultatif de langue et culture régionales tout au long de la scolarité, anime et coordonne la politique touristique sur son territoire.

Pour assurer ses missions, elle dispose, comme pour tous les départements, d’un organe délibérant qui est l’assemblée d’Alsace, dont les membres, élus dans chacun des cantons de la collectivité, sont dénommés conseillers d'Alsace. Elle dispose de son propre président élu par l’assemblée. Ses prérogatives sont sensiblement identiques à celles du président d’un conseil départemental : il oriente et met en place les politiques de la CeA, préside et dirige les débats de l’assemblée, prépare et exécute les délibérations votées en assemblée, élabore et gère le budget, ordonne les dépenses et prescrit l’exécution des recettes, dirige l’ensemble des services départementaux, …

III – Les régions

L’apparition des régions résulte d’un lent processus qui n’a abouti que lors des réformes décentralisatrices menées à compter de 1982 : ce n’est, en effet, qu’à cette époque que les régions sont devenues des collectivités territoriales à part entière, administrées par un conseil régional élu au suffrage universel direct et dont le président est devenu l’exécutif régional.

Il existait, initialement, 22 régions en métropole et 5 en outre-mer. Mais, la loi du 16/01/2015 a substitué aux 22 régions métropolitaines, à compter du 01/01/2016, 13 régions constituées par l’addition des régions existantes sans modification des départements. Le but était de renforcer l’efficacité de l’action régionale, de mutualiser les moyens et de doter les régions d’un statut à même de leur permettre d’exister sur la scène européenne.

Il convient, alors, d’étudier les organes des régions (A) et leurs compétences (B).

A - Les organes des régions

Les régions disposent de trois organes : le conseil régional (1), le président du conseil régional (2) et le conseil économique, social et environnemental régional (3).

1 – L’organe délibératif : le conseil régional

Les conseillers régionaux étaient initialement élus dans le cadre de la représentation proportionnelle sur des listes bloquées, toutes les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages participant à la répartition des sièges. Ce mode de suffrage conduisait, cependant, à un profond émiettement de la représentation et empêchait, souvent, la constitution de majorité stable. Aussi, la loi du 19/01/1999 l’a réformé. Ainsi, désormais, le conseil régional est élu, pour six ans, dans le cadre de listes établies au niveau régional avec une répartition des sièges par département selon un système mixte : la liste ayant obtenu la majorité absolue au premier tour ou relative au second obtient ¼ des sièges, puis elle participe avec les autres listes ayant obtenu au moins 5 % des voix à la distribution proportionnelle des sièges restants. Il faut, également, noter que la loi du 6/06/2000 a introduit le principe de parité hommes / femmes dans la constitution des listes.

Le conseil régional se réunit au moins une fois par trimestre. Il élabore son règlement intérieur qui peut être contesté devant le juge administratif. Il règle par ses délibérations les affaires de la région. Il vote le budget et joue un rôle essentiel pour rationaliser le choix des investissements, la participation au financement des équipements publics, l’attribution des aides financières (notamment celles venant des fonds européens). Il élabore et approuve les contrats de plan État-région qui permettent, notamment, une accélération de la construction des infrastructures de transports ferroviaires, routiers et fluviaux.

2 – L’organe exécutif : le président du conseil régional

Le conseil régional élit un président qui est, depuis 1982, l’exécutif régional, en lieu et place du préfet de région. Le mode d’élection est le même que pour le maire et le président du conseil départemental. Il est assisté de vice-présidents, élus en même temps que lui, auxquels il peut déléguer certains de ses pouvoirs.

Le président prépare et exécute les délibérations du conseil, gère le patrimoine de la région, est l’ordonnateur des dépenses, assure la direction des services régionaux, …

3 – L’organe consultatif : le conseil économique, social et environnemental régional

Il comprend de 40 à 110 membres. Y siègent des représentants des entreprises, des syndicats de salariés les plus représentatifs, des organismes participant à la vie collective de la région et à la protection de l’environnement, des associations de jeunesse et d’éducation populaire et des personnalités qui concourent au développement de la région.

Ses avis ne lient pas le conseil régional. Mais, sa consultation est obligatoire pour la préparation et l’exécution du schéma régional, les orientations générales en matière budgétaire et le projet de budget, ainsi que les orientations générales des politiques confiées par la loi aux régions (notamment, dans le domaine de l’environnement). Il peut, également, être consulté de manière facultative sur tout sujet relevant des compétences de la région. Il peut, enfin, émettre un avis de sa propre initiative.

B – Les compétences des régions

La région apparaît comme la principale bénéficiaire des transferts de compétences menées depuis 1982. Elle dispose, ainsi, de prérogatives en matière de développement économique (1), d’aménagement du territoire (2) et intervient, également, dans divers autres secteurs (3).

1 – Le développement économique

Si la compétence de la région en matière de développement économique n’est pas exclusive, son rôle n’en demeure pas moins premier. Ainsi, le conseil régional est seul compétent pour instituer et attribuer les aides aux entreprises destinées à la création ou à l’extension d’activités économiques. Les communes ou leurs groupements ne peuvent que participer au financement de ces aides ou se voir déléguer le pouvoir de les allouer. Dans le même sens, c’est au conseil régional qu’il revient d’accorder les aides aux entreprises en difficulté, les communes et leurs groupements ne pouvant être que co-financeurs de ces aides.

Ces constats attestent que si les régions conservent une compétence de principe en matière de développement économique, d’autres collectivités territoriales peuvent, néanmoins, intervenir. Aussi, il revient à la région de coordonner les actions économiques locales en tant que collectivité « chef de file ». Pour cela, la région est chargée d’élaborer un schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation qui a pour objet de définir les orientations dans ces différents domaines. Les aides allouées par les autres collectivités territoriales doivent être compatibles avec ce schéma.

2 – L’aménagement du territoire

L’aménagement du territoire est l’autre domaine traditionnel d’intervention des régions. Ces dernières le mettent en œuvre principalement via une planification. Les régions sont, ainsi, chargées d’élaborer un schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires dont l’objet est de fixer les objectifs dans ces trois domaines, ainsi que les règles permettant de les atteindre. Comme pour le développement économique, un certain nombre d’actes d’autres collectivités territoriales doivent être compatibles avec ce schéma.

La région peut, également, signer des contrats de plan avec l’Etat. Ces contrats planifient les investissements que les deux partenaires (avec le concours d’autres collectivités publiques) s’engagent à financer sur une période de six ans (sept ans à partir de 2021).

3 – Les autres compétences régionales

Les régions disposent, également, de compétences dans des domaines spécifiques que les dernières réformes ont étendus au détriment des départements.

Le premier est l’enseignement et la formation professionnelle. Les régions sont, ainsi, chargées de la construction et de l’aménagement des lycées, ainsi que de la gestion des personnels chargés de leur entretien et de leur maintenance. Elles disposent, aussi, d’une compétence de principe en matière de formation professionnelle, d’apprentissage et d’orientation professionnelle que la loi du 5/09/2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est, toutefois, venue réduire. Enfin, la région est la collectivité « chef de file » dans le domaine du soutien à l’enseignement supérieur et à la recherche.

Le second est le transport. Les régions se sont, ainsi, vues attribuées des compétences auparavant exercées par les départements. Les régions sont, également, chargées, notamment, de l’organisation du service public de transport ferroviaire de voyageurs d’intérêt régional.

Enfin, les régions disposent de certaines compétences en matière de tourisme et d’environnement. Elles peuvent, ainsi, par exemple, créer des parcs naturels régionaux avec l’agrément de l’Etat.

IV - Les collectivités à statut particulier

Certaines collectivités territoriales font l’objet d’un statut dérogatoire qui peut être justifié par des raisons historiques ou par la volonté de respecter une spécificité géographique ou culturelle. L’on peut citer : Paris (A), la Corse (B) et les collectivités d’outre-mer (C).

A – Le statut de Paris

Paris, capitale de la France, a toujours suscité des méfiances de la part des pouvoirs publics nationaux. Elle fut, en effet, le siège de nombreuses insurrections à compter de la Révolution. Aussi, afin que la ville où siègent les institutions politiques nationales ne se dresse pas contre ces dernières, elle fut dotée d’un statut dérogatoire.

Initialement administrée par un préfet et un préfet de police, il faut attendre la V° République pour que Paris bénéficie d’institutions propres. Ainsi, la loi du 10/07/1964 fait de Paris une ville-département, toujours dépourvue d’exécutif propre, cette mission restant confiée aux deux préfets. Sur le même territoire existaient, ainsi, deux collectivités, une commune et un département : le conseil de Paris siégeait en tant que conseil municipal ou en tant que conseil départemental. Ce n’est qu’avec la loi du 31/12/1975 que Paris fut, par ailleurs, dotée d’un maire élu.

Ce mode d’organisation a fini par être jugé source de lourdeurs administratives. Aussi, la loi du 28/02/2017 y a mis fin en créant, à compter du 01/01/2019, une collectivité à statut particulier (au sens de l’article 72 de la Constitution) dénommée Ville de Paris en lieu et place de la commune de Paris et du département de Paris. Les organes exécutif et délibérant de cette collectivité continuent à être dénommés respectivement Maire de Paris et Conseil de Paris. La Ville de Paris exerce sur son territoire les compétences des communes et des départements. Mais, le pouvoir de police administrative générale appartient à un préfet de police, le maire de Paris gardant, cependant, quelques compétences résiduelles (bruits de voisinage, salubrité sur la voie publique, maintien du bon ordre sur les foires et marchés, …).

L’organisation interne à la Ville de Paris mise en place par la loi du 31/12/1982 demeure cependant. Subsistent, ainsi, les arrondissements qui, bien que dépourvus de la personnalité morale, sont dotés de quelques compétences et d’organes élus : ils sont, notamment, un lieu de débat et d’information, peuvent donner leur avis sur certains projets et décident de la localisation du programme et des conditions de gestion des équipements de proximité (crèches, stades, …).

B – Le statut de la Corse

Alors que la Corse avait eu, pendant longtemps, un régime identique à celui des autres provinces françaises (deux départements et une région), d’importantes modifications institutionnelles sont intervenues à partir de la loi du 02/03/1982. La loi du 13/05/1991 est allée encore plus loin en transformant la Corse en collectivité à statut particulier au sens de l’article 72 de la Constitution. La loi du 22/01/2002 a encore accru l’autonomie interne de l’île. Enfin, la loi du 07/08/2015 a institué, à compter du 01/01/2018, la « collectivité de Corse » en lieu et place de la collectivité territoriale de Corse et aux départements de Corse du Sud et de Haute-Corse. Il s’agit toujours d’une collectivité territoriale à statut particulier (art. 72 de la Constitution).

Cette collectivité est administrée par une assemblée de Corse, un conseil exécutif et son président, assistés du conseil économique, social et culturel de Corse. Elle exerce les compétences normalement dévolues aux départements et celles qui avaient été attribuées à la collectivité territoriale de Corse. Ces compétences sont particulièrement étendues en matière d’identité culturelle, ainsi que de développement, d’aménagement et d’environnement. Du point de vue normatif, l’évolution reste, néanmoins, minime : l’assemblée de Corse peut seulement faire des propositions de modification ou d’adaptation des lois et règlements relatifs à la Corse. Mais, la Corse peut, comme les autres collectivités territoriales, bénéficier du droit à l’expérimentation. Et, la loi lui permet, sous certaines réserves, d’adapter les dispositions règlementaires à la situation corse.

C - Le statut de l'outre-mer

La plupart des collectivités d’outre-mer relèvent de deux grands régimes : celui de l’article 73 de la Constitution (1) et celui de son article 74 (2). A côté, la Nouvelle-Calédonie fait l’objet d’un traitement particulier (3).

1 – Les collectivités d’outre-mer – Article 73 de la Constitution

A partir de 1946, les quatre anciennes colonies (Guadeloupe, Martinique, Guyane et Réunion) ont bénéficié du statut de département d’outre-mer (DOM), semblable pour l’essentiel à celui des départements métropolitains. Afin d’appliquer le mouvement décentralisateur à ces territoires, la loi du 31/12/1982 institua, à côté de chaque département et sur le même territoire, une région d’outre-mer (ROM).          La réforme constitutionnelle du 28/03/2003 modifia profondément leurs régimes. Ainsi, l’article 73 de la Constitution autorise, désormais, le législateur à créer une collectivité se substituant à un département et à une région d’outre-mer à la condition que les électeurs aient donné leur consentement.

Ces dispositions ont été appliquées, après accord de leurs électeurs, à la Guyane et à la Martinique qui ont été transformées, à compter de mars 2014, en collectivité unique. Ces collectivités exercent les compétences attribuées à un département et une région d’outre-mer, ainsi que toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi pour tenir compte de leurs caractéristiques et contraintes particulières.

La Guadeloupe et la Réunion demeurent, elles, des DOM et des ROM. Leur régime présente certaines spécificités par rapport à leurs homologues métropolitains. Ainsi, ces collectivités disposent de pouvoirs accrus dans les domaines de l’emploi, de l’organisation des transports et du développement de l’identité culturelle. Il en va de même en matière d’aménagement du territoire et de politique maritime.

Enfin, la loi du 03/08/2009 a transformé Mayotte, auparavant régie par l’article 74 de la Constitution, en département d’outre-mer relevant de l’article 73 du même texte. Ce DOM exerce, également, les compétences dévolues à une ROM.

L’ensemble de ces collectivités relèvent de plein droit des lois et règlements nationaux. Ces derniers sont, cependant, susceptibles de faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières desdites collectivités. Ces adaptations peuvent être décidées par les collectivités elles-mêmes dans les matières relevant de leurs compétences. Elles peuvent, également, édicter des règles dans les matières relevant du domaine du règlement ou de la loi, à l’exclusion de certains domaines (libertés publiques, ordre public, organisation de la justice, monnaie, notamment). L’exercice de ces deux pouvoirs suppose, toutefois, une habilitation de la loi ou du règlement selon le cas, habilitation qui est accordée dans les conditions prévues par une loi organique.

2 – Les collectivités d’outre-mer – Article 74 de la Constitution

Ces collectivités sont Saint-Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna, la Polynésie française, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Selon l’article 74 de la Constitution, elles « ont un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d’elles au sein de la République ». Celui-ci est mis en place, après consultation de leurs assemblées, par une loi organique, notamment pour la définition de leur organisation, de leurs compétences, de leur consultation sur les projets de textes ayant des incidences particulières pour ces collectivités.

Le droit applicable est principalement un droit spécifique : une loi organique précise, en effet, les conditions dans lesquelles les lois et règlements s’appliquent sur leur territoire. Pour le reste, c’est l’assemblée territoriale qui élabore, dans le cadre ainsi fixé, les règles propres à la collectivité.

3 – Le Nouvelle-Calédonie

À la suite de fortes revendications indépendantistes, le statut de la Nouvelle-Calédonie a fait l’objet de deux accords majeurs : les accords de Matignon en 1988 et les accords de Nouméa en 1998 (qui ont donné lieu à la révision constitutionnelle du 20/07/1998). A ce jour, ce territoire est une collectivité sui generis qui a bénéficié de transferts de compétences considérables, l’Etat ne conservant que des compétences d’attribution.

La Nouvelle-Calédonie est gérée par un congrès élu sur la base d’une citoyenneté calédonienne. L’originalité vient de ce qu’elle s’est vu reconnaître certains éléments de souveraineté : partage de certaines relations internationales avec l’Etat, reconnaissance de l’existence du peuple canaque, adoption par le congrès de lois de pays qui ont force de loi et sont soumises au contrôle du Conseil constitutionnel.

Il s’agit de la collectivité territoriale bénéficiant de la plus large autonomie. Cependant, l’étendue de ses prérogatives demeure, toujours, de la compétence du Parlement national et les décisions prises relèvent de la compétence des juridictions nationales.

La Nouvelle-Calédonie demeure, toutefois, encore, partie intégrante de la France. Depuis les accords de 1998, trois référendums d’autodétermination étaient prévus. Le « non » à l’indépendance l’a nettement emporté en 2018 et 2020. La troisième consultation en décembre 2021 a débouché sur le même résultat, avec, toutefois, pour particularité la forte abstention du fait d’un appel en ce sens du FLNKS dans un contexte de crise sanitaire.