Introduction
L’administration centrale de l’Etat a, de tout temps, eu un poids considérable en France. Cette situation, déjà existante sous l’Ancien régime, s’est renforcée sous l’Empire et s’est développée au XIX° et XX° siècle au fur et à mesure de l’accroissement des tâches de l’Etat. Actuellement, l’administration centrale étatique est organisée autour de quatre pôles : le président de la République, le Premier ministre, les ministres et différents organismes consultatifs et de contrôle.
Au sommet de ces administrations se trouvent le chef de l’Etat et le Premier ministre qui se partagent les attributions administratives. Cette situation, qui est liée au renforcement des pouvoirs présidentiels sous la V° République, rompt avec les régimes antérieurs où l’administration centrale était confiée à une seule autorité : président de la République sous la III° République et Président du Conseil sous la IV°. Plus précisément, le chef du Gouvernement dispose de la compétence de droit commun en matière règlementaire et de nomination aux emplois civils et militaires de l’Etat, tandis que le président de la République garde des compétences propres.
A l’échelon inférieur figurent les ministres dont la tâche est d’exécuter, avec le concours des diverses administrations centrales placées sous leur autorité, la politique de l’Etat.
Enfin, l’intervention de l’Etat dans des secteurs toujours plus variés et complexes a conduit à la création de multiples organismes consultatifs chargés d’apporter au pouvoir exécutif un regard d’expert sur les questions traitées, tandis que le souci constant de contrôle de l’action administrative a entrainé le développement de différents corps d’inspection et de contrôle.
Il convient donc d’étudier l’ensemble des composantes de l’administration centrale de l’Etat : le président de la République (I), le Gouvernement composé du Premier ministre et des ministres (II) et les organismes consultatifs et de contrôle (III).
I – Le président de la République
Excepté les périodes de mise en œuvre de l’article 16 de la Constitution, le chef de l’Etat est, selon les textes, une autorité seconde en matière administrative au regard des prérogatives majeures allouées au Premier ministre. La pratique constitutionnelle est, cependant, allée dans le sens d’un accroissement de ses attributions lorsque les majorités présidentielle et parlementaire coïncident. La pratique se rapproche, à nouveau, de la lettre du texte constitutionnel en période de cohabitation. C’est donc en ayant à l’esprit ces considérations qu’il faut analyser les pouvoirs juridiques du président de la République (A) et ses services (B).
A - Les pouvoirs juridiques du chef de l'Etat
Le président de la République dispose de trois pouvoirs juridiques : un pouvoir d’encadrement de l’action administrative (1), un pouvoir de nomination de hauts fonctionnaires (2) et un pouvoir règlementaire (3).
1 – Des pouvoirs d’encadrement de l’action administrative
Le chef de l’Etat dispose, d’abord, de prérogatives constitutionnelles. Ainsi, en matière diplomatique, il est le garant de l’indépendance nationale et du respect des traités. Il est, à ce titre, responsable de la négociation et de la ratification de ceux-ci. La Constitution fait, également, de lui le chef des armées, une prérogative qui lui assure la présidence du Conseil supérieur de la défense nationale, instance essentiellement consultative, et surtout du Conseil de défense où sont prises, dans les faits, les grandes décisions en la matière.
Le président de la République est aussi à la tête de différents conseils permanents ou non. Au titre des premiers, l’on peut citer le Conseil de politique nucléaire extérieure ou le Conseil de sécurité intérieure. Les conseils non permanents sont constitués pour une occasion particulière et réunissent, à l’Elysée, divers ministres pour prendre les décisions que justifient les circonstances. Leur fréquence marque la volonté du chef de l’Etat d’apposer son empreinte sur la marche des affaires de l’Etat. C’est, ainsi, que V. Giscard d’Estaing et F. Mitterrand firent un usage appuyé du procédé. Par la suite, les deux périodes de cohabitation furent caractérisées par un moindre recours à ces commissions, puisqu’en pareille hypothèse, le pouvoir est, essentiellement, exercé à Matignon. Il y est, cependant, à nouveau recouru lorsque les deux majorités redeviennent identiques.
2 – Un pouvoir de nomination de hauts fonctionnaires
C’est l’article 13 de la Constitution de 1958 qui prévoit que le chef de l’Etat nomme aux emplois civils et militaires de l’Etat. La loi organique du 28/11/1958 organise, cependant, des délégations au profit d’autres autorités, essentiellement les ministres et les autorités subordonnées, telles que les préfets ou les recteurs, de sorte que ce sont ces autorités qui nomment la quasi-totalité des fonctionnaires.
Le président de la République garde, cependant, une compétence exclusive pour les nominations aux emplois pourvus par décret en Conseil des ministres, comme les préfets, les recteurs, les ambassadeurs, les directeurs d’administration centrale ou, encore, les officiers généraux. Cela représente environ 500 emplois. Le locataire de l’Elysée nomme, également, par décret simple, les professeurs d’université, les administrateurs civils, les magistrats, les officiers, … (soit environ 70 000 emplois).
Ses pouvoirs dans le choix des plus hauts fonctionnaires, à qui revient la charge de mettre en œuvre l’action de l’Etat, étant considérables, le pouvoir constituant a souhaité les encadrer. Ainsi, la loi constitutionnelle du 23/07/2008 de modernisation des institutions de la V° République a institué un contrôle parlementaire de certaines nominations. Ce contrôle vise certains emplois « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation », dont la liste est précisée par la loi organique du 23/07/2010 (notamment, président de la Banque de France, Défenseur des droits ou membres du Conseil constitutionnel). Concrètement, la nomination doit faire l’objet d’un avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Ces commissions disposent d’un véritable droit de véto, dans la mesure où un avis négatif obtenu à la majorité des 3/5° des suffrages exprimés au sein des deux commissions fait obstacle à la nomination.
3 – Un pouvoir règlementaire
En matière règlementaire, la compétence de principe appartient, selon l’article 21 de la Constitution, au Premier ministre. Le chef de l’Etat est, quant à lui, compétent pour signer les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des ministres. Si cette règle parait simple, la pratique a démontré que cette dernière pouvait faire l’objet de détournements.
La première hypothèse est celle où le président de la République signe des décrets règlementaires non délibérés en Conseil des ministres. Le Conseil d’Etat a, ici, jugé que la signature du chef de l’Etat était superfétatoire et que le texte, dès lors qu’il était signé par le Premier ministre, devait être considéré comme relevant de la seule compétence de ce dernier (CE, ass., 27/04/1962, Sicard).
La seconde a donné lieu à une évolution jurisprudentielle. Elle concerne les décrets règlementaires délibérés en Conseil des ministres par simple volonté présidentielle, alors qu’aucun texte ne l’imposait. Dans un premier temps, le Conseil d’Etat a jugé que l’auteur du décret restait le Premier ministre, la signature du chef de l’Etat étant surabondante (CE, 16/10/1987, Syndicat autonome des enseignants de médecine). Puis, le juge administratif suprême a opéré un total revirement de jurisprudence en considérant que ces décrets relevaient de la compétence du chef de l’Etat qui, ce faisant, pouvait, seul, les modifier (CE, ass., 10/09/1992, Meyet). Avec cette solution, le président de la République peut, ainsi, accroître de lui-même, au travers de sa maîtrise de l’ordre du jour du Conseil des ministres, le champ de ses compétences.
B – Les services de la Présidence
Ces services ne sont prévus par aucun texte et leurs effectifs se sont étoffés concurremment au renforcement des pouvoirs du président de la République depuis 1958. Le chef de l’Etat choisit très librement ses collaborateurs. Cependant, afin de lutter contre le népotisme, le décret du 14/06/2017 lui interdit de recruter des membres de sa famille dans son cabinet. Trois grands services aident le chef de l’Etat à remplir sa mission.
Le premier est lié à la fonction de chef des armées du président de la République. Ainsi, celui-ci dispose d’un état-major particulier où les trois armées sont représentées et dont le rôle est de le conseiller sur les questions de défense nationale.
Vient, ensuite, le cabinet qui est chargé d’assister le chef de l’Etat dans ses fonctions politiques : c’est ici que l’on trouve les plus proches collaborateurs du président.
Enfin, le Secrétariat général de l’Elysée, composé de conseillers techniques et de chargés de mission, permet d’assurer la liaison permanente avec le Premier ministre et de contrôler l’action du Gouvernement. Ce service est présidé par un Secrétaire général qui occupe une place privilégiée auprès du chef de l’Etat. C’est ici que se tranchent, souvent, certaines questions administratives importantes en période de concordance des majorités. Pendant les périodes de cohabitation, ce service permet surtout au président de la République de continuer à jouer un rôle politique sur les matières qui relèvent du Gouvernement.
II – Le Gouvernement
Le Gouvernement est en charge de la politique de la Nation et dispose, pour ce faire, de l’administration. Sa marge de manœuvre apparaît, cependant, inversement proportionnelle au poids du chef de l’Etat : en effet, en cas de concordance des majorités présidentielle et parlementaire, les décisions majeures nécessiteront presque toujours l’aval du président de la République, tandis qu’en période de cohabitation, le Gouvernement jouira d’une liberté quasi-totale.
Sur le plan organisationnel, le Gouvernement est une instance collégiale composée de ministres (B) et chapeautée par le Premier ministre (A). Cette collégialité s’observe au travers des différentes formations gouvernementales dans le cadre desquelles les décisions majeures du pays sont prises. La plus importante est le Conseil des ministres qui réunit, sous l’autorité du chef de l’Etat, tous les ministres et, parfois, les secrétaires d’Etat : outre l’examen des projets de lois et d’ordonnances, cette instance permet d’organiser et de discipliner le travail gouvernemental. En période de cohabitation, cette tâche s’effectue, cependant, dans le cadre d’un Conseil de cabinet qui réunit à Matignon, hors la présence du chef de l’Etat, l’ensemble des membres du Gouvernement. Il existe, également, différents comités interministériels qui permettent, sous l’autorité du Premier ministre (mais aussi, de plus en plus souvent, du chef de l’Etat), de trancher des questions complexes sur lesquelles les administrations ont des positions différentes et, par la suite, d’assurer la coordination de l’ensemble des ministères.
A – Le Premier ministre
Le Premier ministre dispose de certains pouvoirs (1) qu’il met en œuvre par l’intermédiaire des services qui lui sont rattachés (2).
1 – Les pouvoirs juridiques du Premier ministre
Le chef du Gouvernement dispose de trois grandes prérogatives.
En premier lieu, il « dirige l’action du Gouvernement » (art. 21 de la Const.). A ce titre, il peut adresser aux ministres et secrétaires d’Etat des instructions par voie de circulaires leur prescrivant d’agir dans un sens déterminé ou d’adopter une interprétation donnée du droit en vigueur. Bien qu’il ne soit pas le supérieur hiérarchique des autres membres du Gouvernement, le Premier ministre joue, également, un rôle majeur dans la direction et la coordination de l’action gouvernementale. Il est, ainsi, amené à rendre des arbitrages, notamment à l’occasion des différents comités ou réunions interministérielles présidés par lui ou son cabinet. Par ailleurs, c’est à lui que sont rattachés des services couvrant l’ensemble du champ d’action de l’Etat, tels que ceux chargés d’une réflexion prospective sur l’action publique ou de la gestion de la fonction publique.
En second lieu, le chef du Gouvernement est, en vertu de l’article 21 de la Constitution, l’autorité règlementaire de principe. En effet, excepté les compétences réservées en la matière au président de la République, le Premier ministre dispose seul du pouvoir d’édicter des normes administratives générales tant en matière d’exécution des lois que dans le cadre du pouvoir règlementaire autonome. Ce dernier pouvoir est une innovation de la Constitution de 1958 : prévu à l’article 37 de la loi fondamentale, il permet au chef du Gouvernement de règlementer toutes les matières qui ne sont pas attribuées à la loi par l’article 34 dudit texte. Le Premier ministre contresigne, également, un grand nombre de décisions présidentielles (art. 19 Const.).
En troisième lieu, le chef du Gouvernement dispose d’un pouvoir de nomination de fonctionnaires. Cependant, si l’ordonnance du 28/11/1958 en fait le principal délégataire des pouvoirs du président de la République en la matière, le Premier ministre ne nomme principalement que les agents de ses propres services.
2 – Les services du Premier ministre
A l’inverse des services de la Présidence, ceux du Premier ministre sont composés de plusieurs milliers de personnes. Trois grands organismes sont intégrés à Matignon, tandis que de multiples services lui sont rattachés.
Le premier est le Cabinet du Premier ministre qui réunit, sous l’autorité d’un directeur, une série de conseillers techniques qui couvrent l’ensemble du champ de l’action gouvernementale. Son rôle est essentiellement d’assister le Premier ministre dans sa tâche de direction et de coordination de l’action du Gouvernement. C’est ici que l’on trouve ses plus proches collaborateurs.
Le second est le Secrétariat général du Gouvernement dont le rôle est moins politique que celui du Cabinet. Cet organisme est chargé de préparer, en liaison avec le Secrétariat général de la présidence de la République, le Conseil des ministres, ainsi que les différents conseils et comités interministériels. Il joue également un rôle majeur dans la production des textes juridiques, à même de mettre en œuvre le programme politique du Gouvernement, de leur préparation jusqu’à leur mise en œuvre.
Le dernier est le Secrétariat général des affaires européennes dont le poids est allé croissant au fur et à mesure des transferts de compétences au profit de l’Union européenne (UE). Son rôle est d’assurer la liaison entre les administrations françaises et les représentants de la France auprès de l’UE : c’est ici que se décide la position qui sera défendue à Bruxelles au nom de la France.
Enfin, une multitude de services sont rattachés au Premier ministre. Divers et variés par leur champ d’intervention, l’on peut noter la Direction des Journaux officiels en matière d’information, le Secrétariat général de la Défense nationale en matière de politique extérieure ou, encore, la Direction générale de l’administration et de la fonction publique en matière de gestion des ressources humaines.
B – Les ministres
Les ministres sont nommés, en vertu de l’article 8 de la Constitution, par décret du président de la République, contresigné par le Premier ministre. Dans l’ordre protocolaire, l’on distingue : les ministres d’Etat (il s’agit des principales personnalités politiques du Gouvernement), les ministres ordinaires, les ministres délégués et les secrétaires d’Etat (ces deux dernières catégories de ministres sont placés auprès d’un ministre pour gérer une partie spécifique de sa mission).
Aucune disposition ne vient réglementer tant le nombre de ministres que la répartition de leurs attributions. Ainsi, le nombre de ministres est généralement d’une vingtaine, auxquels s’ajoutent autant de secrétaires d’Etat. Malgré des discours récurrents, cette situation, qui est le reflet de l’accroissement des tâches de l’Etat, n’a guère évolué sous la V° République. Quant aux attributions fixées par décret délibéré en Conseil des ministres pour les ministres et par décret simple du chef de l’Etat pour les ministres délégués et les secrétaires d’Etat, si certains ministères, comme ceux de l’Intérieur, de la Défense ou, encore, de la Justice, voient leur domaine d’intervention rester assez stable, d’autres ont un champ de compétences qui varie au gré des Gouvernements, tel le ministère de l’Economie et des Finances ou celui de l’Environnement. Cette situation, qui peut être préjudiciable à l’action de l’Etat, semble, cependant, devoir perdurer : en effet, le nombre de ministres et leurs attributions dépendent de facteurs politiques propres à chaque mandature.
Deux points doivent, là encore, retenir l’attention : les prérogatives des ministres (1) et les services dont ils disposent (2).
1 – Les pouvoirs juridiques des ministres
Outre le contreseing de certains actes du chef de l’Etat et des actes du Premier ministre dont l’exécution leur incombe, les ministres exercent deux types de compétences.
Ils sont, d’abord, une autorité administrative. A ce titre, ils ont en charge l’exécution du budget de leur ministère voté par le Parlement. Ils représentent, également, l’Etat dans toutes les actions de niveau national, notamment à l’occasion d’un recours juridictionnel. En matière de décisions individuelles, ils n’interviennent, cependant, que pour des affaires dont la portée nationale justifie qu’elle soit traitée au niveau central : en effet, depuis 1997, la compétence de principe en la matière a été transférée au préfet de département.
Les ministres sont, par ailleurs, des chefs de service. Ils disposent, ainsi, du pouvoir hiérarchique sur les agents à qui ils peuvent adresser des ordres ou des instructions. Ce pouvoir vaut également en termes de recrutement et de carrière, bien que, du fait des politiques de déconcentration, il ait été confié en partie aux préfets notamment. Enfin, en tant que chefs de service, ils disposent, à défaut d’une pouvoir règlementaire général, d’un pouvoir règlementaire d’organisation des services : en effet, le Conseil d’Etat a reconnu qu’il leurs appartient « de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de l’administration placée sous leur autorité » (CE, sect., 07/02/1936, Jamart).
2 – Les services des ministères
Ces services sont, ici, pour exécuter les décisions des ministres, en d’autres termes pour mettre en œuvre l’action de l’Etat. L’on retrouve, ici aussi, la distinction entre service à dimension politique et services à dimension technique.
Le service dont le rôle est essentiellement politique est le Cabinet. Composé des plus proches collaborateurs du ministre que ce dernier choisit discrétionnairement, en général parmi les plus grands corps administratifs ou techniques de l’Etat (ENA, Polytechnique, …), il est chargé des affaires politiques du ministre, mais aussi des rapports avec le Parlement et la presse, ainsi que du lien avec une circonscription électorale dans la mesure où le ministre est généralement un élu local. Le poids de ces conseillers est allé croissant avec le temps, laissant entrevoir des risques de dérive. La plus importante reste celle où le Cabinet fait écran entre le ministre et les administrations placées sous son autorité. C’est pour cette raison qu’un décret du 18/05/2017 est venu poser certaines règles : limitation du nombre de membres du Cabinet, obligation pour l’arrêté de nomination de préciser les titres des personnes concernées et l’emploi auquel elles sont appelées, …
Sur le plan technique, l’on trouve les administrations centrales. A l’inverse du Cabinet ces structures se caractérisent par leur permanence. Chargés de la gestion d’une politique publique donnée du ministère ou d’une fonction transversale (affaires financières, gestion des ressources humaines, …), ces services ont été, depuis le début des années 2000, profondément réorganisés. En effet, dans un souci d’une plus grande performance des services de l’Etat, diverses réformes sont intervenues pour en fusionner ou supprimer certains : l’une des plus emblématiques est la fusion entre la Direction générale des impôts et la Direction générale de la comptabilité publique au sein d’une structure unique, la Direction générale des finances publiques. Ces services sont toujours organisés selon une structure type : direction, sous-directions et bureaux.
Bien que jouant toujours un rôle majeur dans la mise en œuvre de l’action administrative, les administrations centrales ont vu leur poids fortement diminué du fait de l’application du principe de subsidiarité. En effet, depuis la loi du 06/02/1992 relative à l’administration territoriale de la République, dont les règles ont été reprises par le décret du 07/05/2015 portant Charte de la déconcentration, ne leurs sont, désormais, plus confiées que « les seules missions qui présentent un caractère national ou dont l’exécution en vertu de la loi ne peut être déléguée à un échelon territorial ». Il s’agit, notamment, des missions de conception, d’animation, d’appui des services déconcentrés, d’orientation, d’évaluation et de contrôle. Sur cette base, les administrations centrales participent à l’élaboration des projets de loi et de décret, préparent et mettent en œuvre les décisions du ministre et adressent aux services déconcentrés des directives pluriannuelles pour encadrer leur action.
Enfin, à côté des administrations centrales, il faut noter l’existence de services à compétence nationale chargés de missions spécifiques devant toujours être, en raison de leur importance ou de leur champ d’intervention, accomplies au niveau national, ainsi que celle d’un secrétaire général à qui revient la tâche d’assurer, notamment, la coordination des services du ministère, sa bonne insertion dans le travail interministériel et la qualité des relations entre l’administration centrale et les services déconcentrés.
III – Les organismes consultatifs et de contrôle
A côté des autorités administratives stricto sensu, il existe des organismes consultatifs (A) et des corps d’inspection et de contrôle (B) dont la mission est d’éclairer, chacun à leur façon, les décideurs publics.
A - Les organismes consultatifs
De nombreux organismes consultatifs entourent les autorités administratives françaises. Les avis qu’ils rendent peuvent être de trois types. Ils peuvent être consultatifs, ce qui signifie que l’administration n’est tenue ni de solliciter l’avis, ni de la suivre. Ils peuvent, ensuite, être obligatoires : en pareille hypothèse, l’autorité administrative est tenue de solliciter l’avis, mais peut ne pas le suivre. Ils peuvent, enfin, être conformes : ici, l’administration doit demander l’avis et le suivre.
Ces organismes ont connu un essor remarquable ces dernières décennies (1). Deux jouent un rôle fondamental (2).
1 – L’essor des organismes consultatifs
La présence d’organismes auprès du pouvoir exécutif pour le conseiller n’est pas nouvelle. Déjà, sous l’Ancien Régime, le Roi tentait de légitimer ses décisions autoritaires en y associant l’intervention de différents conseils. La période récente a, cependant, vu ces organismes proliférer. Qualifiés de comités, de conseils ou, encore, de commissions, ils sont, actuellement, au nombre de 5 000 environ : l’on peut citer le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, le Conseil supérieur de la fonction publique de l’Etat et celui de la fonction publique territoriale, la commission supérieure des monuments historiques, …
Ce développement peut s’expliquer par différents facteurs. Il y a, d’abord, l’intervention de l’Etat dans des secteurs toujours plus diversifiés et complexes, laquelle requiert l’avis de personnalités techniquement compétentes. Le second est lié au renforcement des exigences de concertation, d’information et de participation des citoyens : d’où la volonté d’associer à la prise de décision des représentants d’organisations syndicales ou d’associations représentatives.
Si l’intervention de ces organismes est de nature à renforcer les exigences de transparence, de concertation et de démocratisation, elle présente, cependant, certains inconvénients : ralentissement de la prise de décision, coût disproportionné au regard de l’apport de la consultation, excès de formalisme. Plus grave est le risque de dilution des responsabilités : en effet, en associant, juridiquement ou symboliquement, différents comités à la prise des décisions, ces procédures rendent difficile l’identification du véritable décideur, alors que c’est, pourtant, là, une exigence démocratique fondamentale.
2 – Deux organismes consultatifs majeurs
Parmi tous les organismes consultatifs existants, deux se détachent particulièrement des autres.
Le premier est le Conseil d’Etat qui, outre son pouvoir juridictionnel, exerce auprès du Gouvernement une fonction de conseiller. Cette compétence, qui est historiquement la première dont il fut doté, se manifeste au travers de six sections administratives : Finances, Travaux publics, Intérieur, Social, Administration et Rapport et études. Le Conseil d’Etat est saisi pour avis soit de manière obligatoire, soit de manière facultative. La première hypothèse concerne les projets de lois, les projets d’ordonnances et certains projets de décrets (notamment, les décrets en Conseil d’Etat auxquels une loi renvoie). Si le Gouvernement n’est pas obligé de suivre l’avis rendu, il se voit, néanmoins, enserré dans certaines limites : en effet, il ne peut que reprendre son texte initial, y renoncer ou le modifier pour tenir compte de l’avis. A côté de ces consultations obligatoires, le Gouvernement peut, de manière facultative, solliciter pour avis le Conseil d’Etat sur un projet de texte ou lui demander de réaliser des missions de réflexion sur certains thèmes : ainsi, en est-il allé, récemment, à propos des conséquences juridiques d’internet, de la sécurité juridique ou, encore, de la complexité du droit. Enfin, il faut noter que cette mission de consultation facultative a été étendue par la loi constitutionnelle du 23/07/2008 de modernisation des institutions de la V° république : celle-ci a, en effet, ouvert au président de chaque assemblée parlementaire la possibilité de le saisir pour avis d’une proposition de loi déposée par un membre de son assemblée.
Le second est le Conseil économique, social et environnemental prévu par la Constitution de 1958. Son rôle est de rédiger des rapports, études et avis à la demande du Gouvernement et des assemblées parlementaires. Composé de représentants des groupes socioprofessionnels, ses prérogatives ont été renforcées à la suite de la révision constitutionnelle de 2008. Celle-ci a, en effet étendu son champ de compétence aux questions environnementales et a introduit la possibilité pour les citoyens de le saisir sur des questions touchant à l’intérêt général, dès lors que la pétition regroupe au moins 500 000 signatures.
B – Les corps d'inspection et de contrôle
Outre le contrôle du supérieur hiérarchique sur ses subordonnés et le contrôle opéré par le juge, le système administratif français prévoit un contrôle interne à l’administration dans le cadre duquel des fonctionnaires indépendants sont appelés à contrôler l’activité d’autres fonctionnaires et à s’assurer de la bonne marche des services publics.
Le plus ancien de ces corps est l’Inspection générale de l’administration dont la première mission fut de proposer des solutions pour lutter contre la misère dans les hôpitaux. Actuellement, l’on en dénombre 22 parmi lesquels l’Inspection générale des finances, l’Inspection générale de l’Education nationale ou le Contrôle général des armées.
Ces différents corps de contrôle présentent deux caractéristiques. Ils disposent, d’abord, d’une grande autonomie et indépendance au sein de leur ministère de rattachement. Leurs membres sont, par ailleurs, la plupart du temps, de hauts fonctionnaires disposant d’une longue et riche expérience au sein de l’administration active.
