Les lois de financement de la Sécurité sociale (fiche thématique)

Introduction

Jusqu’au milieu des années 1990, il n’existait pas d’outil de pilotage global des finances sociales. La nécessité de se doter d’un tel instrument se faisait, toutefois, pressante en raison de l’accumulation des déficits et des contraintes budgétaires européennes. Ce fut chose faite avec la création des lois de financement de la Sécurité sociale (LFSS) par la révision constitutionnelle du 22 février 1996, lois dont le régime devait être précisé par une loi organique du 2 août 2005 et, plus récemment, par une autre loi organique du 14 mars 2022.

Ces lois, il faut bien le souligner, constituent des lois de financement et non des lois de finances. En d’autres termes, elles n’ont pas de portée budgétaire. Les recettes sont, simplement, prévues quand les objectifs de dépenses, votés par le Parlement, évaluent les dépenses, mais ne les limitent pas.

A l’instar des lois de finances de l’Etat, le Gouvernement dispose du monopole de la présentation des LFSS. Ces dernières ne peuvent donc résulter que de l’adoption d’un projet de loi. Plus précisément, le projet de LFSS, qu’il soit de l’année ou rectificatif, est préparé par le ministre chargé des affaires sociales en liaison avec la direction du budget et la direction de la Sécurité sociale. Le projet doit, ensuite, être voté par le Parlement en respectant des délais très stricts destinés à garantir son adoption avant la fin de l’année.

Du point de vue de leur application, les LFSS sont mises en œuvre, non par l’Etat, mais par les partenaires sociaux en charge de la gestion des régimes de Sécurité sociale. Cette phase fait l’objet d’un contrôle qui a été renforcé par la loi organique du 14 mars 2022 : celui-ci est, notamment, le fait du Parlement et de la Cour des comptes.

Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, l’origine des LFSS (I), d’analyser, dans une deuxième partie, les différentes LFSS (II) et d’examiner, dans une troisième partie, le contrôle de l’application des LFSS (III).

I - L'origine des LFSS

La création des LFSS tient à la volonté du pouvoir constituant d’accorder au Parlement une plus grande place dans la gestion des finances sociales. Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, le budget de la protection sociale a vu son poids s’accroître (il dépasse, de nos jours, celui de l’Etat), ce qui a rendu nécessaire de mieux maîtriser les dépenses sociales dans un contexte où les déficits publics s’accumulaient. D’autre part, le financement de la Sécurité sociale s’est fait, à compter des années 1980 et, notamment, de la mise en place de la CSG (contribution sociale généralisée), de plus en plus à partir de ressources fiscales. Enfin, l’on a assisté à une déconnexion progressive entre versement de prestations et exercice d'une activité professionnelle.

L’ensemble de ces mouvements ont provoqué une « publicisation » des finances sociales qui a justifié la révision constitutionnelle du 22 février 1996. Cette dernière a créé une nouvelle catégorie de loi, les lois de financement de la Sécurité sociale, dont le but est de renforcer les pouvoirs du Parlement en la matière. L’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 est, ainsi, complété : « Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».

Toutefois, cette réforme présentait des limites rendues plus visibles avec la mise en œuvre de la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) applicable en matière de finances de l’Etat. Aussi, la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la Sécurité sociale (LOLFSS) a été adoptée afin d’améliorer le pilotage des finances sociales. Elle est venue modifier la LOLFSS antérieure du 22 juillet 1996.  La nouvelle LOLFSS poursuit trois grands objectifs.

Le premier est le renforcement du rôle du Parlement sur deux points principaux. Celui-ci doit, d’abord, se prononcer sur des prévisions à quatre ans pour les dépenses, les recettes et le solde du régime général des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale et des fonds concourant à leur financement. L’introduction de la dimension pluriannuelle et la présentation des soldes des différentes branches dans les documents du projet de LFSS améliore, ainsi, l’information des parlementaires et renforce la portée de leur vote. Dans le même esprit, la décomposition de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (ONDAM) en « sous-objectifs » (soins de ville, établissements de santé tarifés à l’activité, autres dépenses relatives aux établissements de santé, établissements et services pour personnes âgées, établissements et services pour personnes handicapées et autres modes de prise en charge) permet au Parlement de mieux identifier la répartition des dépenses couvertes par l’ONDAM.

Le second est la généralisation, à l’instar des finances de l’Etat, de la démarche de performance au niveau des services de la Sécurité sociale. Cette démarche se décline, d’abord, à travers les conventions d’objectifs et de gestion (COG). Ces conventions sont conclues entre l'État et les caisses nationales des principaux régimes de Sécurité sociale. Identiques dans leurs principes généraux, elles diffèrent, néanmoins, selon chaque branche ou régime en fonction des axes stratégiques qui lui sont propres. Elles formalisent, dans un document contractuel, la délégation de gestion du service public de la Sécurité sociale aux organismes gestionnaires et sont signées, pour une durée de quatre ans, par le président et le directeur de la caisse concernée, ainsi que par les ministres de tutelle. Elles sont ensuite déclinées en contrats pluriannuels de gestion (CPG) entre la caisse nationale et les caisses locales. La démarche de performance se formalise, également, au travers de six programmes de qualité et d’efficience (PQE) relatifs aux dépenses et aux recettes de chaque branche de la Sécurité sociale. Ces programmes comportent un diagnostic de la situation, un récapitulatif des objectifs explicités au moyen d’indicateurs, ainsi que les moyens mis en œuvre pour atteindre ces objectifs et enfin les résultats atteints. L’on ne peut éviter de faire le lien avec les projets annuels de performance (PAP) et les rapports annuels de performance (RAP) en matière de finances de l’Etat.

Le troisième objectif vise à mieux articuler les projets de loi de finances (PLF) et les projets de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Le rapport du Gouvernement relatif aux orientations des finances sociales peut, ainsi, faire l’objet d’un débat conjoint au Parlement avec le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques. Par ailleurs, l’élaboration du PLFSS se fait en étroite collaboration entre la direction du Budget et la direction de la Sécurité sociale. Enfin, la mise en place d’une perspective pluriannuelle des PLFSS rapproche les finances sociales de celles de l’État.

Ce régime a été complété par la loi organique relative aux lois de financement de la Sécurité sociale du 14 mars 2022. Cette loi prévoit d'améliorer l'information des parlementaires au travers d’un article liminaire présentant les trajectoires financières des administrations de Sécurité sociale, ainsi que d’annexes rationalisées et enrichies.

Sur le plan procédural, la date de dépôt du projet de LFSS de l’année est alignée sur celle du projet de loi de finances de l’Etat, à savoir le 1° mardi d'octobre, pour permettre aux parlementaires de disposer d’une semaine supplémentaire pour déposer des amendements. Et, sur le modèle des lois de règlement de l'État, une loi d'approbation des comptes de la Sécurité sociale est créée afin de renforcer la qualité de l’examen de l’application de la LFSS de l’année passée.

II – Les différentes LFSS

La loi organique du 14 mars 2022 reconnaît le caractère de loi de financement de la Sécurité sociale à trois types de lois : la LFSS de l’année (A), la LFSS rectificative (B) et la loi d’approbation des comptes de la Sécurité sociale dont l’étude sera faite dans la troisième partie de ce propos.

Ces différentes lois sont des lois de financement et non des lois de finances. En d’autres termes, elles n’ont pas de portée budgétaire. Il faut comprendre, par-là, que les LFSS n’autorisent pas la perception des recettes ; elles ne font que les prévoir. De même, les objectifs de dépenses, votés par le Parlement, évaluent les dépenses, mais ne les limitent pas. Il ne s’agit donc pas d’une enveloppe budgétaire limitative (dont on comprend aisément l’impossibilité, puisqu'elle impliquerait de cesser les remboursements aux assurés une fois le plafond de l’enveloppe atteint).

Leur objet fait, par ailleurs, l’objet d’une protection stricte. Seules des LFSS peuvent, en effet, modifier les dispositions relatives aux prévisions de recettes et aux objectifs de dépenses de la Sécurité sociale, ainsi que décider de mesures de réduction ou d'exonération de cotisations sociales pérennes. Quant aux dispositions introduites par voie d'amendement, elles ne sont recevables que si elles ont un effet direct sur l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou si elles améliorent le contrôle sur l'application des LFSS. Autrement dit, les cavaliers sociaux sont interdits.

Enfin, les LFSS n’encadrent pas toutes les finances sociales. Elles ne régissent, en effet, que les régimes obligatoires de base, ainsi que les organismes concourant à leur financement. En sont, en revanche, exclus les régimes obligatoires complémentaires et l’assurance chômage.

A – La LFSS de l'année

La LFSS de l’année, dont la structure a été modifiée en 2022 (1), est préparée par le ministre chargé des affaires sociales (2) et votée par le Parlement selon une procédure définie par la Constitution (3).

1 – La structure de la LFSS de l’année

La LFSS de l’année comprend un article liminaire et trois parties. Elle est, également, accompagnée de différentes annexes.

L’article liminaire, qui est une nouveauté instaurée par la loi organique de 2022, propose un état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour l’exercice en cours et pour l’année à venir.

La première partie est consacrée aux dispositions relatives à l’année en cours. Il s’agit, ici, de rectifier les données arrêtées dans la précédente LFSS, tant en recettes qu’en dépenses.

Les deux autres parties concernent l’année à venir. La deuxième partie détermine, ainsi, les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale et prévoit les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que celles des organismes concourant au financement de ces régimes. La troisième partie fixe les objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que, le cas échéant, leurs sous-objectifs et fixe l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de l'ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs.

Le projet de LFSS est, également, accompagné d’un certain nombre d’annexes dont l’objet est de donner au Parlement une information supplémentaire. La plus importante est le rapport décrivant, pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’ONDAM. A cette occasion, le Gouvernement doit présenter une comparaison entre les dépenses prévues lors de la loi de programmation des finances publiques et les objectifs de dépenses au sein du projet de LFSS, justifier, le cas échéant, les écarts et présenter les mesures qu’il envisage pour de les résorber.

Les autres annexes ont un objet plus spécifique : l’un présente la liste des régimes des obligatoires de base de sécurité sociale et précise le nombre de leurs cotisants actifs et retraités titulaires de droits propres, un autre fait le point sur les exonérations de cotisations et de contributions sociales et le montant de la compensation financière versée par l’État à la Sécurité sociale, …

2 – La préparation du projet de LFSS de l’année

Le projet de LFSS est préparé par le ministre chargé des affaires sociales. Celui-ci s’appuie, principalement, sur la direction du budget et sur la direction de la Sécurité sociale. D’autres directions du ministère des affaires sociales et du travail sont, également, impliquées dans les domaines relevant de leur compétence. Quant aux organismes de Sécurité sociale, ils transmettent leurs propositions et apportent leur expertise technique.

Lors de ces travaux préparatoires, la direction du budget s’attache à concilier les impératifs de maîtrise des déficits sociaux et de redressement des comptes publics avec le besoin de justice sociale et le maintien de la qualité du système de protection sociale français. Cette phase s'étend sur la période d’avril à octobre.

Enfin, depuis la loi organique du 2 août 2005, le Parlement est associé à la préparation du projet de LFSS grâce à la tenue, au printemps, d’un débat d’orientation des finances publiques, qui concerne le budget de l’État, mais aussi les finances sociales et locales. Ce débat s’engage sur la base d’un rapport présenté par le Gouvernement.

3 – Le vote du projet de LFSS de l’année

Les règles encadrant la procédure d’examen du projet de LFSS sont posées par l’article 47 – 1 de la Constitution de 1958.  Comme pour les projets de lois de finances, les projets de LFSS doivent être soumis en premier lieu à l’Assemblée nationale (art. 39 de la Constitution). Le projet doit être déposé sur son bureau au plus tard le 1° mardi d’octobre depuis la loi organique de 2022 (et non plus avant le 15 octobre) : il s'agit de permettre aux parlementaires de disposer d’une semaine supplémentaire pour déposer des amendements (au lieu de deux jours jusqu’à présent). Il ne peut être mis en discussion devant une assemblée avant l'adoption de la loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale afférente à l'année qui précède celle de la discussion dudit projet.

Contrairement aux projets de lois de finances qui, en application d’une disposition organique, sont renvoyés aux commissions chargées des finances, il n’existe pas de renvoi automatique du projet de LFSSS aux commissions parlementaires chargées des affaires sociales. Cependant, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, la commission des affaires sociales est traditionnellement chargée de l’examen au fond desdits projets. La commission des finances s'en saisit, quant à elle, pour avis.

L’examen en séance publique du projet de LFSS s’engage sur la base du texte présenté par le Gouvernement. Le Parlement dispose, navettes comprises, d’un délai maximum de 50 jours pour se prononcer. Si ce délai n’est pas respecté, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance.

L'Assemblée nationale doit se prononcer, en première lecture, dans le délai de 20 jours après le dépôt du projet, le Sénat, dans un délai de 15 jours après avoir été saisi.

Si l'Assemblée nationale n'a pas émis un vote en première lecture sur l'ensemble du projet dans le délai de 20 jours, le Gouvernement saisit le Sénat du texte qu'il a initialement présenté, modifié, le cas échéant, par les amendements votés par l'Assemblée nationale et acceptés par lui. Le Sénat doit alors se prononcer dans un délai de 15 jours après avoir été saisi.

Si le Sénat n'a pas émis un vote en première lecture sur l'ensemble du projet dans le délai de 15 jours, le Gouvernement saisit à nouveau l'Assemblée nationale du texte soumis au Sénat, modifié, le cas échéant, par les amendements votés par le Sénat et acceptés par lui.

En cas de désaccord entre les deux chambres, la procédure accélérée, qui fait intervenir une commission mixte paritaire, est de droit après une seule lecture pour les projets de LFSS (art. 45 de la Constitution). Cette commission est chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion. Si la commission parvient à un accord, le texte qu'elle a adopté est soumis au vote, en séance plénière, de chacune des deux assemblées. Dans le cas contraire ou si le texte de la commission mixte paritaire est rejeté, le projet de loi est examiné en nouvelle lecture, d'abord à l'Assemblée nationale, puis au Sénat. En cas de désaccord persistant, le Gouvernement a alors la faculté de donner le dernier mot à l'Assemblée nationale.

Enfin, la possibilité pour le Gouvernement d’engager, en vertu de l’article 49-3 de la Constitution, sa responsabilité sur le vote du projet de LFSS a été maintenue par la révision constitutionnelle de 2008.

B – La LFSS rectificative

Les projets de LFSS rectificatives sont préparés et votés dans les mêmes conditions que le projet de LFSS de l’année. Ces LFSS rectificatives ont pour objet de modifier, en cours d'année, les dispositions de la LFSS de l'année précédente. Elles sont les seules à pouvoir le faire, avec la première partie de la LFSS de l'année suivante. A ce titre, elles rectifient, d’une part, les prévisions de recettes et les tableaux d'équilibre des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que des organismes concourant au financement de ces régimes, et, d’autre part, les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, l’ONDAM de l'ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que leurs sous-objectifs

Cette fonction se retrouve s’agissant de leur structure. En effet, les LFSS rectificatives comprennent, outre le même article liminaire que la LFSS de l’année, deux parties : l’une concerne les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général, l’autre les dépenses.

Afin d’informer les parlementaires sur les causes de ces modifications, le Gouvernement doit présenter, à l’occasion du dépôt de tels projets, plusieurs annexes. La plus importante est le rapport décrivant, pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’ONDAM. D’autres annexes sont, également, prévues : certaines visent à donner différentes informations sur les finances sociales, une autre doit préciser si le projet de LFSS rectificative prévoit une modification de l’ONDAM, …

III – Le contrôle de l'application des LFSS

La mise en œuvre des LFSS relève d’un cadre beaucoup plus souple que l’exécution du budget de l’État. La gestion des régimes de Sécurité sociale est, en effet, confiée aux partenaires sociaux. Ces derniers doivent s’efforcer de respecter les objectifs de dépenses contenus dans la LFSS, sous le contrôle du ministre chargé des affaires sociales. A cette fin, des conventions d’objectifs et de gestion pluriannuelles sont signées entre l’État et les principales caisses nationales, ces conventions se déclinant, ensuite, en contrats pluriannuels de gestion entre caisse nationales et locales.

Plusieurs types de contrôles s’exercent sur l’application qui est ainsi faite des LFSS. Le premier est le fait du Parlement (A) le deuxième de la Cour des comptes (B) et le troisième de la Mission nationale de contrôle (C).

A – Le contrôle du Parlement

Le contrôle du Parlement de l’application de la LFSS s’effectue au travers du vote de la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (1) et du travail des commissions parlementaires (2).

1 – La loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale

Jusqu’à aujourd'hui, la situation financière passée des administrations de sécurité sociale était rapidement discutée lors de l'examen de la première partie du projet LFSS de l’année portant sur l’approbation et la clôture des comptes de l’exercice N-1. Aussi, la loi organique de 2022 a créé la loi d'approbation des comptes de la Sécurité sociale (LACSS) dont l’objet est d’assurer un contrôle plus poussé de l’application des LFSS de l’année et rectificative. Ce nouveau dispositif s’inspire des lois de règlement du budget de l'État (devenues lois relatives aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année), ainsi que du « printemps de l'évaluation » mis en place en 2019 par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Le projet de LACSS doit être déposé avant le 1° juin de l'année suivant celle de l'exercice auquel il se rapporte. Ce texte est composé, principalement, de deux types de dispositions. Il comprend, d’abord, un article liminaire présentant un tableau de synthèse retraçant les recettes, les dépenses et le solde des administrations de sécurité sociale. Il approuve, ensuite, les tableaux d'équilibre du dernier exercice clos des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par branche, et des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que les dépenses relevant du champ de l’ONDAM constatées lors de cet exercice.

Afin de permettre aux parlementaires d’exercer leur contrôle, la LACSS est accompagnée de différentes annexes, telles que des rapports d'évaluation des politiques de sécurité sociale relatifs à chaque branche de la sécurité sociale, un rapport fournissant des éléments précis sur l'exécution de l’ONDAM au cours de l'exercice clos ou, encore, un rapport décrivant les mesures que le Gouvernement a prises ou compte prendre pour l'affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés à l'occasion de l'approbation des tableaux d'équilibre relatifs au dernier exercice clos. Enfin, le dépôt de la LACSS doit être accompagné du dépôt par la Cour des comptes du rapport d’application des LFSS de l’année précédente.

2 – Le contrôle des commissions parlementaires

Les autres contrôles exercés par les assemblées parlementaires s’effectuent principalement par l’intermédiaire de leurs commissions des affaires sociales. Leurs rapporteurs disposent, ainsi, des mêmes pouvoirs d’investigation que les rapporteurs spéciaux du budget de l’État pour contrôler, sur pièces et sur place, l’application des LFSS. À ce titre, ils peuvent se faire communiquer tous renseignements et documents d’ordre administratif et financier qu’ils estiment nécessaires pour remplir leur mission, sous réserve qu’il ne soit pas porté atteinte au secret médical ou au secret de la défense nationale.

Par ailleurs, depuis la loi organique du 2 août 2005, les commissions saisies au fond disposent de nouvelles prérogatives. Elles doivent, ainsi, être obligatoirement consultées par le Gouvernement sur la déclinaison envisagée des objectifs de dépenses en sous-objectifs. Elles doivent, également, être informées préalablement à tout relèvement des plafonds d’avances de trésorerie des régimes de Sécurité sociale, lequel prend la forme d’un décret en Conseil des ministres et en Conseil d’État dont la ratification doit être opérée en loi de financement. Elles doivent, enfin, être destinataires, chaque semestre, d’un état des créances et des dettes réciproques entre l’État et la Sécurité sociale.

La commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a, en outre, créé en son sein, en 2004, la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) dont le rôle est de suivre de manière permanente l’application de ces lois. Elle est co-présidée par un député de la majorité et un député de l’opposition et sa composition politique est plus paritaire que proportionnelle. La mission procède pour l’essentiel à des auditions publiques pour élaborer des rapports d’information publiés avec l’autorisation de la commission. La commission des affaires sociales du Sénat a, elle aussi, créé une MECSS en son sein en 2006.

Enfin, des parlementaires sont membres de nombreux organismes et instances qui leur permettent d’être informés des enjeux sociaux et de la mise en œuvre des LFSS. Il s’agit soit de conseils consultatifs (Commission des comptes de la sécurité sociale, Conseil d’orientation des retraites, Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, …), soit de conseils ou comités de surveillance placés auprès des caisses nationales de Sécurité sociale et de leurs fonds de financement (Fonds de réserve pour les retraites, Caisse d’amortissement de la dette sociale, …).

B - Le contrôle exercé par la Cour des comptes

L’article 47-2 de la Constitution prévoit que la Cour des comptes « assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle … de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ».

A ce titre, la Cour publie chaque année au début du mois de septembre un Rapport sur la Sécurité sociale dans lequel elle analyse l’ensemble des comptes des organismes de Sécurité sociale, rend compte de l’exécution de la loi de financement de l’année précédente et présente les résultats d’enquêtes thématiques. L’objectif de ce rapport consiste à apporter des éléments d’information au Parlement pour éclairer ses débats et à formuler des recommandations destinées aux administrations de tutelle et aux organismes de Sécurité sociale.

De manière plus ponctuelle, les commissions parlementaires compétentes et les MECSS peuvent saisir la Cour de toute question relative à l’application des LFSS. Dans ce cadre, la Cour est amenée à procéder à des enquêtes sur les organismes soumis à son contrôle. Ces demandes d’enquête peuvent être intégrées dans le programme de travail de la Cour et faire l’objet de développements dans son rapport annuel. Pour des enquêtes précises, la Cour doit communiquer directement à la commission le résultat de ces vérifications, mais elle n’est tenue par aucun délai. Des magistrats de la Cour participent également aux auditions de la MECSS.

Enfin, la loi organique du 2 août 2005 a transposé au champ des LFSS la mission de certification des comptes de l’État attribuée à la Cour par l’article 58 de la LOLF. La Haute juridiction financière doit, ainsi, rendre un avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre de la Sécurité sociale relatifs au dernier exercice clos. La Cour doit, également, certifier les comptes du régime général. Le champ de la certification est limité à ce régime (qui est le principal régime de Sécurité sociale) en raison des nombreuses difficultés techniques et organisationnelles qui se seraient posées si la Cour avait eu à certifier les comptes de tous les régimes.

C - Le contrôle exercé par la Mission nationale de contrôle

La Mission nationale de contrôle (MNC) est un service à compétence nationale rattaché au directeur de la Sécurité sociale qui est chargée de contrôler l’action des organismes locaux de Sécurité sociale, puisque ce sont eux qui délivrent localement les prestations sociales. Ce contrôle se justifie par le fait qu’il s’agit d’organismes de droit privé, donc extérieurs à l’Etat, et par les enjeux financiers importants qui caractérisent les finances sociales.

La MNC doit vérifier la légalité des actes pris par les organismes locaux de Sécurité sociale. Elle doit s’assurer du bon fonctionnement du service public de la Sécurité sociale par la réalisation d’audits : les contrôles portent, notamment, sur l’évaluation des objectifs assignés aux organismes dans le cadre des Conventions d’objectifs et de gestion. Elle doit, enfin, évaluer les agents de direction des organismes nationaux et locaux de Sécurité sociale.