Introduction
Initialement posées par le décret du 29 décembre 1962, les procédures d’exécution des recettes et des dépenses publiques sont, aujourd’hui, fixées par le décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. Ces procédures, qui comprennent un schéma de principe assorti de dérogations, font intervenir, en vertu du principe de séparation des ordonnateurs et des comptables publics, successivement l’un et l’autre de ces acteurs. Il en va ainsi tant en recettes qu’en dépenses.
Les ordonnateurs sont, ainsi, chargés systématiquement des trois premières opérations : la constatation des droits, la liquidation et la mise en recouvrement pour les recettes ; l’engagement, la liquidation et l’ordonnancement pour les dépenses. Les comptables interviennent, eux, en bout de chaîne et procèdent soit au recouvrement pour les recettes, soit au paiement pour les dépenses.
A côté de ces procédures de droit commun, existent différentes procédures dérogatoires destinées à faciliter la gestion financière publique dans des hypothèses bien spécifiques.
Enfin, il convient de noter que ces dispositifs de gestion sont de plus en plus impactés par le processus d’informatisation et de dématérialisation qui affecte la gestion financière publique. Destiné à proposer un cadre de gestion commun aux différents acteurs en charge des finances de l’Etat en lieu et place des pratiques hétérogènes des différentes administrations, ce mouvement tend, parfois, à atténuer ou neutraliser certaines jalons, pourtant classiques, de la procédure budgétaire.
Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, la procédure d’exécution des recettes (I) et d’analyser, dans une seconde partie, la procédure d’exécution des dépenses (II).
I - L'exécution des recettes publiques
L’exécution des recettes publiques obéit à une procédure de droit commun (A) et relève, dans certaines hypothèses, de procédures dérogatoires (B).
Il convient de préciser que, lorsque sont en cause des recettes fiscales, le Gouvernement n’a aucune marge de manœuvre : en effet, s’il ne peut percevoir une ressource fiscale sans texte, il doit, par ailleurs, appliquer strictement les règles définies par les lois fiscales, sans tenir compte de l'évaluation faite par la loi de finances qui n'a qu'un caractère évaluatif. En d’autres termes, il ne peut que constater la matérialité et le montant de chaque recette à percevoir.
A - La procédure de droit commun
En vertu du célèbre principe de séparation, il convient de distinguer les opérations réalisées par les ordonnateurs (1) et l’opération effectuée par les comptables publics (2).
1 – Les opérations relevant de l’ordonnateur
Cette phase à la charge des ordonnateurs se décompose en trois parties : la constatation des droits, la liquidation et la mise en recouvrement. Dans les faits, cependant, seule la mise en recouvrement est de leur compétence exclusive. Les opérations de constatation et de liquidation peuvent, en effet, être faites par des fonctionnaires ou des agents publics n’ayant pas la qualité d’ordonnateur (par exemple, les agents de l’administration fiscale pour les impôts).
La constatation des droits est l’opération préalable et fondamentale par laquelle la créance est arrêtée dans son principe. Il s’agit de vérifier l’existence d’une créance au profit de l’Etat, ce qui suppose de s’assurer que l’imposition en cause est bien prévue par les lois fiscales. C’est à ce moment, également, que l’assiette de l’impôt, c’est-à-dire la base imposable, est déterminée matériellement et juridiquement. L’ordonnateur doit, par ailleurs, s’assurer que le fait générateur de l’impôt, tel que, par exemple, la mise à disposition des revenus en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques, s’est bien produit.
L’ordonnateur doit, ensuite, liquider la créance, c’est-à-dire en arrêter le montant. En matière fiscale, la liquidation suppose, la plupart du temps, d’appliquer à la base imposable le taux fixé en loi de finances.
Enfin, intervient l’ordonnancement proprement dit. Cette phase relève du seul ordonnateur qui doit émettre un ordre de recettes en vertu duquel le comptable pourra recouvrer la créance. Ces ordres de recettes peuvent prendre des formes diverses : il s’agit, pour les impôts directs, de rôles qui sont des titres collectifs comportant la liste des contribuables avec pour chacun d’eux la mention de leur dette fiscale, et, pour les impôts indirects, d’avis de mise en recouvrement.
2 – L’opération relevant du comptable public
Dès la prise en charge de l’ordre de recettes, le comptable doit le porter dans ses écritures. Préalablement à la mise en recouvrement proprement dite, il doit procéder au contrôle de la régularité de cet ordre. Il doit, notamment, vérifier que la perception des recettes fiscales et parafiscales a bien été autorisée par la loi de finances de l’année, et que les réductions et annulations de recettes sont valides.
Le comptable doit, ensuite, opérer le recouvrement de la créance. Il est, à ce titre, tenu d’effectuer toutes les diligences nécessaires, notamment en employant toutes les voies d’exécutions forcées à sa disposition. Faute de l’accomplissement de cette obligation, il engage sa responsabilité personnelle et pécuniaire.
B - Les procédures dérogatoires
Trois hypothèses peuvent être évoquées.
La première concerne les perceptions dites au comptant parce que déclarées et établies directement par le débiteur et qui sont encaissées par le comptable sans besoin d’un ordre de recettes : il en va, ainsi, pour la TVA ou bien l’impôt sur les sociétés.
La seconde vise les régies de recettes dans lesquelles un régisseur effectue toutes les opérations, de la constatation jusqu’au recouvrement. Ce système vise à faciliter le fonctionnement des services publics. Le régisseur reste, cependant, sous le contrôle du comptable qui doit lui donner son agrément lors de sa nomination.
La troisième a trait aux recettes non définitives, telles que les avances ou les acomptes sur travaux : ces recettes peuvent être encaissées sans liquidation préalable, celle-ci n’intervenant qu’ultérieurement.
II - L'exécution des dépenses publiques
Comme pour les recettes, l’exécution des dépenses s’effectue selon une procédure générale (A), et, parfois, selon des procédures dérogatoires (B). En revanche, à l’inverse de celles-ci, l’autorisation budgétaire n’ouvre qu’une simple faculté de dépenser, sauf dans les cas où une dette existe préalablement.
A - La procédure de droit commun
Conformément au principe de séparation des ordonnateurs et des comptables publics, cette procédure suit quatre étapes : les trois premières relèvent de l’ordonnateur (1), la quatrième du comptable public (2).
1 – Les opérations relevant de l’ordonnateur
Cette phase comporte, traditionnellement, trois types d’opérations : l’engagement, la liquidation et l’ordonnancement.
L’engagement peut se définir comme l’acte juridique par lequel une personne morale crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle il résultera une charge. En d’autres termes, il peut s'agir du fait générateur de la dette ou de la simple constatation de l'existence d'une dette née par ailleurs. Dans l’accomplissement de cette opération, l’ordonnateur doit respecter les principes budgétaires, notamment la nécessité d’un acte d’autorisation préalable, ainsi que la spécialité et la limitation des crédits. De ce point de vue, l’on distingue, habituellement, l’engagement juridique qui résulte de l’acte ou des faits, tel qu’un contrat de marché public, par lequel une obligation est mise à la charge de l’Etat et qui peut résulter d’autres personnes que l’ordonnateur, de l’engagement comptable par lequel l’ordonnateur affecte des crédits budgétaires à la réalisation d’une dépense particulière et qui relève du seul ordonnateur.
La liquidation a pour effet de rendre les dettes certaines dans leur principe et dans leur montant. Elle suit deux étapes. La première consiste à constater la réalité de la dette en s’assurant que le service a bien été matériellement exécuté : il s’agit, là, de l’application de la règle ancienne du service fait. La seconde a pour objet de calculer et de vérifier le montant de la dette. Ces opérations peuvent être réalisées matériellement par des agents publics qui ne sont pas des ordonnateurs.
Enfin, l’ordonnancement est l'acte administratif par lequel l’ordonnateur donne au comptable l'ordre de payer la dette. Il relève du seul ordonnateur.
2 – L’opération relevant du comptable public
Cette phase commence par le contrôle de la régularité de l'ordre de paiement et des pièces justificatives règlementaires qui l’accompagnent. Plusieurs éléments sont, ainsi, examinés : qualité de l’ordonnateur, bonne imputation budgétaire de la dépense, disponibilité des crédits, validité de la créance (notamment, au regard de la règle du service fait) ou, encore, caractère libératoire du paiement. Au contrôle exhaustif traditionnel, s’est, cependant, substitué, depuis le décret du 7 novembre 2012, un contrôle hiérarchisé et partenarial destiné à permettre aux services comptables de se concentrer sur les dépenses importantes et à risques : il s’agit d’un contrôle qui n’est plus systématique, mais qui est, au contraire, modulé selon une évaluation des risques et fondé sur des sondages.
Une fois ce contrôle effectué, deux hypothèses peuvent se présenter. Aucune anomalie n’est décelée : le comptable peut procéder au paiement proprement dit. Lorsqu’une irrégularité est détectée, en revanche, le comptable doit notifier à l’ordonnateur un refus de payer. A défaut de régularisation par ce dernier, le comptable doit maintenir son refus de payer, ce que l’ordonnateur peut outrepasser en procédant à une réquisition du comptable et qui a pour effet de transférer la responsabilité de la dépense sur la personne de l’ordonnateur. Le comptable requis doit, ensuite, procéder au paiement, sauf dans certaines hypothèses (indisponibilité des crédits, absence de service fait, caractère non libératoire du paiement).
B - Les procédures dérogatoires
Trois procédés peuvent être relevés.
Le premier concerne les dépenses payables provisoirement sans liquidation ou ordonnancement préalable : ainsi, les dépenses non définitives (avances, acomptes sur travaux) sont payables sans liquidation, tandis que les dépenses présentant un caractère urgent peuvent être payées par le comptable sans ordonnancement immédiat, mais sous réserve d'un ordonnancement ultérieur.
Le second vise ce que l’on nomme les régies d’avances dans lesquelles des régisseurs sont autorisés à payer des dépenses pour le compte et sous le contrôle des comptables qui leurs consentent à cet effet des avances de trésorerie.
Le troisième concerne les fonds spéciaux et les fonds alloués aux pouvoirs publics constitutionnels : les services concernés gèrent eux-mêmes toute la procédure de dépense.
