Introduction
La notion de service public a émergé de manière considérable en droit administratif français dès le début du XXème siècle. Complexe, cette notion reflète une vision politique particulière de la société française et l’une des deux activités principales de l’administration avec la police administrative. Les services publics se développent ainsi de manière considérable et sans précédent dans notre pays, puis la notion de « service public à la française » émerge notamment à l’ère du « socialisme municipal ». Une notion en pleine évolution, mise à l’épreuve tant par les évolutions sociétales que par le droit de l’Union Européenne qui retient davantage le terme de « service d’intérêt général ».
En droit français, deux conceptions doctrinales dissonantes voient le jour au XXème siècle sur la question des services publics. L’école du service public avec Léon Duguit, puis le doyen Maurice Hauriou, soutiennent une définition objective de cette notion. En effet, pour Duguit, le service public correspond à « toute activité dont l’accomplissement doit être assuré, réglé et contrôlé par les gouvernants, parce que l’accomplissement de cette activité est indispensable à la réalisation et au développement de l’interdépendance sociale et qu’elle est de telle nature qu’elle ne peut être réalisée complètement que par l’intervention de la force gouvernementale ». De son côté, Gaston Jèze définira le service public dans une conception plus subjective, considérant qu’il n’existe pas réellement de service public par nature.
La conception subjective, plus réaliste et concrète, est retenue par le juge administratif qui prend en compte plusieurs critères dans la détermination d’une activité de service public. Tout d’abord, le critère finaliste, c’est-à-dire l’existence d’un intérêt général, puis le critère organique qui a été amené à évoluer, à savoir la gestion par une personne publique ou par une personne privée sous le contrôle d’une personne publique (CE Ass. 13 mai 1938, Caisse Primaire Aide et Protection), et enfin le critère matériel, c’est-à-dire l’application de règles exorbitantes du droit commun.
Enfin, une distinction est opérée par les juridictions entre les différents services publics. Ainsi, on retrouve les services publics administratifs (SPA) entièrement soumis au droit public et tournés pleinement vers l’intérêt général, puis les services publics industriels et commerciaux (SPIC), servant l’intérêt général mais dont le fonctionnement permet l’application plus large du droit privé et l’intervention du juge judiciaire (TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’ouest africain).
En l’espèce, le Conseil d’Etat a été amené à se prononcer plus précisément sur les critères permettant d’identifier le caractère de service public d’une activité gérée par une personne privée. L’Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés (APREI) a demandé communication des états du personnel d’un centre d’aide par le travail à l’Association familiale départementale d’aides aux infirmes mentaux de l’Aude (AFDAIM) qui est responsable de sa gestion. Une demande effectuée sur le fondement des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 qui prévoient la communication des documents administratifs « qu’ils émanent des administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d’un service public ». Ici, l’AFDAIM a refusé de communiquer les documents administratifs à l’association APREI qui a donc saisi le tribunal administratif (TA) de Montpellier. Le 27 janvier 1999, le TA a annulé ce refus de communication, enjoignant à l’AFDAIM de communiquer les documents demandés dans un délai de deux mois. L’AFDAIM a fait appel de ce jugement que la cour administrative d’appel de Marseille (CAA) a annulé le 19 décembre 2003. L’association du personnel porte donc l’affaire devant le Conseil d’Etat, qui considère dans l’arrêt du 22 février 2007, qui nous intéresse, que la mission exercée par l’association ne revêt pas le caractère d’un service public, notamment en raison d’une volonté du législateur de l’exclure. L’obligation de communiquer les documents administratifs, conformément à la loi de 1978, ne s’applique donc pas à cette dernière.
Il faut voir dans l’arrêt rendu par le Conseil d’Etat un rappel des critères de détermination antérieurement définis (I), mais aussi l’émergence de nouveaux critères complémentaires permettant de qualifier une activité de service public (II).
I - Un rappel des critères de détermination antérieurement définis
Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord que la détermination d’un service public peut se faire par la loi (A) et retient une nouvelle fois, en matière de gestion d’une mission d’intérêt général par une personne privée, les critères cumulatifs définis précédemment dans la jurisprudence Narcy (B).
A - La détermination d'un service public par le Législateur
Le juge administratif rappelle dans cet arrêt la possible détermination d’une activité de service public par la loi. En effet, il évoque les « (…) cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public ». Il s’agirait finalement d’une première possibilité pour savoir si une activité demeure bien ou non une activité de service public lorsqu’elle est gérée par une personne privée.
Dans le cas présent, le Conseil d’Etat revient sur les missions des associations en question, évoquant notamment les compétences sociales et médico-sociales dont ils ont la charge. Il précise cependant « que si l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées constitue une mission d'intérêt général, il résulte toutefois des dispositions de la loi du 30 juin 1975, éclairées par leurs travaux préparatoires, que le législateur a entendu exclure que la mission assurée par les organismes privés gestionnaires de centres d'aide par le travail revête le caractère d'une mission de service public ». Cette loi relative à l’orientation des personnes handicapées (JORF du 1er juillet 1965, p. 6596) exclue bien la qualification de service public pour les activités assurées en la matière par des organismes privés tels que les associations. Il faut également relever la prise en compte par le juge administratif des travaux préparatoires du Législateur afin de déterminer l’intention de celui-ci quant à la détermination du service public. Les débats, rapports et autres travaux du Sénat et de l’Assemblée nationale viennent ainsi éclairer les dispositions de la loi. Cette volonté du législateur prime, dans le raisonnement du Conseil d’Etat concernant l’affaire APREI, sur les critères jurisprudentiels y compris les critères nouveaux qu’il dégage pourtant.
Pour évoquer d’autres exemples, il est possible de citer les missions postales confirmées comme un service public par la loi du 9 février 2010, même après la transformation de La Poste en société anonyme. La loi sur l’hôpital adoptée en 2009 a, de son côté, supprimé la notion de « service public hospitalier », tout en conservant dans le Code de la santé publique le caractère de service public d’un certain nombre de missions dans les hôpitaux et établissements privés de santé.
Même si les missions en question, dans l’arrêt qui nous intéresse, ne sont pas considérées comme un service public, le Conseil d’Etat évoque une nouvelle fois les critères cumulatifs définis dans la jurisprudence Narcy, avant de faire émerger de nouvelles possibilités pour qualifier une activité de service public.
B - Les critères cumulatifs définis dans la jurisprudence Narcy
Dans l’arrêt APREI, le Conseil d’Etat rappelle « qu’une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public ».
Trois critères déjà développés par le Conseil d’Etat, des années auparavant, dans l’arrêt Narcy (CE Sect. 28 juin 1963, Narcy). En effet, dans cet arrêt historique, le Conseil d’Etat assurait qu’en « (…) vue de les mettre à même d’exécuter la mission d’intérêt général qui leur est ainsi confiée et d’assurer à l’administration un droit de regard sur les modalités d’accomplissement de cette mission, le législateur a conféré aux centres techniques industriels certaines prérogatives de puissance publique et les a soumis à divers contrôles de l’autorité de tutelle ». Il en déduisait qu’ainsi le législateur avait souhaité « charger lesdits centres de la gestion d’un véritable service public ».
Le juge administratif apporte finalement plusieurs conditions pour qu’une activité exercée par une personne privée soit considérée comme une activité de service public. Il évoque évidemment l’existence d’un intérêt général, condition traditionnelle pour un service public mais qui demeure un concept assez large recouvrant de nombreuses activités de nos jours. Il conditionne également l’existence d’un service public à la présence de prérogatives de puissance publique (PPP) octroyées à la personne privée, à savoir des moyens exorbitants du droit commun qui lui permettent d’agir plus simplement, comme une personne publique. Enfin, un contrôle de l’administration publique qui a confié les missions en question est nécessaire, par divers moyens.
Depuis quelques dizaines d’années, le critère des prérogatives de puissance publique n’est plus toujours cohérent et tend à s’effacer progressivement. Le Conseil d’Etat se prononce donc, notamment à travers l’arrêt APREI, en faveur de critères complémentaires qui permettront de qualifier, de manière nouvelle, des activités de service public.
II - Des critères complémentaires nouveaux pour qualifier une activité de service public
Parmi ces critères nouveaux, la haute-juridiction retient l’intention de l’administration en l’absence de prérogatives de puissance publique (A), avec la méthode du faisceau d’indices qui sera retenue durablement par la jurisprudence (B).
A - L'intention de l'administration en l'absence de PPP
Déjà en 1990, le Conseil d’Etat retenait l’existence d’un service public malgré l’absence de prérogatives de puissance publique octroyées à une personne privée. En effet, dans l’arrêt concernant une association de la Ville de Melun (CE, 20 juillet 1990, Ville de Melun), la haute-juridiction retient simplement la nécessité d’un intérêt général et d’un contrôle accru de l’administration publique sur l’association concernée pour déterminer qu’elle exerce en réalité des missions de service public. Cette association constituait ce qu’on appelle en droit public des affaires une « association transparente ». En effet, l’association, gérant des missions en lien avec des compétences communales en matière socio-éducative, avait été créée par la collectivité territoriale elle-même et une part très importante de son budget était constituée de subventions communales. Ces conditions laissaient ainsi assez facilement à la collectivité une certaine maitrise de l’action associative dans les missions exercées, sans pour autant que la personne privée soit dotée de PPP.
Ainsi, dans l’affaire APREI, le juge administratif considère que « même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission ».
Le Conseil d’Etat met donc en avant, au-delà du traditionnel intérêt général, l’intention nécessaire de l’administration de confier des missions de service public à une personne ou un organisme privé. Cette intention doit être analysée par la juridiction administrative et son existence déterminée par plusieurs points clés. Il s’agit de la méthode dite « du faisceau d’indices », qui est ici retenue par le juge administratif. Ce dernier va instruire l’affaire en se penchant notamment sur les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement de ce service par rapport à la collectivité, c’est-à-dire à l’administration publique. Il veillera aussi aux obligations que la collectivité fait peser sur le gestionnaire privé de ces missions, ainsi qu’aux mesures et objectifs mis en place par l’administration. Cette méthode n’exige pas un respect strict de l’ensemble de ces critères, le juge doit simplement pouvoir déduire l’intention de l’administration en se fondant d’une manière générale sur ces différents points dans le cas qui lui est présenté. Pour autant, dans l’affaire en présence, la « parole » de la loi, excluant l’existence d’une activité de service public, demeure plus forte que ces critères jurisprudentiels.
Cette méthode du faisceau d’indices deviendra, par la suite et encore aujourd’hui, une conception durablement retenue par la jurisprudence administrative.
B - La méthode du faisceau d'indices : une conception jurisprudentielle durable
Le juge administratif va généralement utiliser désormais cette méthode du faisceau d’indices pour déterminer l’existence d’une activité de service public dès lors que ces missions sont exercées par une personne privée. Le Conseil d’Etat le confirmera notamment à travers l’arrêt CE, 05 juillet 2008, Commissariat à l’énergie atomique.
Dans cette affaire finalement assez similaire à l’affaire APREI, puisqu’il est aussi question d’une communication de documents émanant d’un service public, le Conseil d’Etat considère que « le Centre d'études sur l'évaluation de la protection dans le domaine nucléaire est une association qui a pour objet « l'étude, dans le domaine nucléaire, de l'évaluation, de la protection de l'homme sous ses aspects techniques, biologiques, économiques et sociaux » ; (…) que cette association a été créée par Electricité de France, alors établissement public, et par le Commissariat à l’énergie atomique, pour le compte desquels elle est chargée des évaluations précitées et dont elle perçoit des subventions ; que par suite, en jugeant que le Centre d'études sur l'évaluation de la protection dans le domaine nucléaire était un organisme privé chargé d'une mission de service public au sens de la loi du 17 juillet 1978, le tribunal administratif, qui a mentionné tant l'objet que les conditions de création et de fonctionnement de l'association, n'a pas commis d'erreur de droit ».
Ici, l’organisme de droit privé chargé d’exercer différentes missions d’intérêt général est suffisamment contrôlé par la personne publique, puisque deux entités de droit public ont participé à sa création et ont une influence importante dans son fonctionnement. L’utilisation de la méthode du faisceau d’indices permet bien ici de déterminer que l’organisme est chargé de mener à bien des activités de service public.
Il faut bien noter qu’aux côtés de cette méthode déterminant le contrôle et l’intention de l’administration, le juge administratif conserve bien évidemment la notion de « missions d’intérêt général », traditionnellement nécessaire à l’existence d’un service public. Un intérêt général qui demeure particulièrement difficile à appréhender tant cette notion est évolutive au fil des décennies dans le droit français. Le juge administratif a entendu élargir et adapter cette notion, au cœur de ses décisions (Rapport public du Conseil d’Etat, Réflexions sur l’intérêt général, 1999).
L’évolution de la notion d’intérêt général et l’utilisation de la méthode du faisceau d’indices permettent d’élargir de manière non négligeable le nombre d’activités érigées comme de véritables services publics alors même qu’elles sont exercées par une personne privée.
CE, sect., 22/02/2007, A.P.R.E.I.
Vu la requête sommaire et les observations complémentaires, enregistrées les 13 février et 2 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentées pour l'ASSOCIATION DU PERSONNEL RELEVANT DES ETABLISSEMENTS POUR INADAPTES (A.P.R.E.I.), dont le siège est 2 A, boulevard 1848 à Narbonne (11100), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION DU PERSONNEL RELEVANT DES ETABLISSEMENTS POUR INADAPTES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 19 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel formé par l'Association familiale départementale d'aide aux infirmes mentaux de l'Aude (A.F.D.A.I.M.), a d'une part annulé le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier en date du 27 janvier 1999 en tant que ce jugement a annulé le refus de l'A.F.D.A.I.M. de communiquer à l'A.P.R.E.I. les états du personnel du centre d'aide par le travail La Clape, d'autre part a rejeté la demande présentée par l'A.F.D.A.I.M. comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
2°) statuant au fond, d'annuler le refus de communication qui lui a été opposé par l'A.F.D.A.I.M. ;
3°) de mettre le versement à la SCP BOULLEZ de la somme de 2 000 euros à la charge de l'A.F.D.A.I.M. au titre de l'article L. 761-1 du code de juridiction administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boullez, avocat de l'ASSOCIATION DU PERSONNEL RELEVANT DES ETABLISSEMENTS POUR INADAPTES et de Me Le Prado, avocat de l'A.F.D.A.I.M.,
- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'ASSOCIATION DU PERSONNEL RELEVANT DES ETABLISSEMENTS POUR INADAPTES (A.P.R.E.I.) a demandé communication des états du personnel d'un centre d'aide par le travail géré par l'Association familiale départementale d'aide aux infirmes mentaux de l'Aude (A.F.D.A.I.M.) ; que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a, par un jugement du 27 janvier 1999, annulé le refus de communication opposé par l'A.F.D.A.I.M et enjoint à cette dernière de communiquer les documents demandés dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement ; que l'A.P.R.E.I. demande la cassation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 19 décembre 2003 en tant que la cour a d'une part annulé le jugement du 27 janvier 1999 en tant que ce jugement est relatif au refus de communication opposé par l'A.F.D.A.I.M., d'autre part rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, dans sa rédaction alors en vigueur : « sous réserve des dispositions de l'article 6 les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public » ;
Considérant qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public ; que, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission ;
Considérant qu'aux termes de l'article 167 du code de la famille et de l'aide sociale alors en vigueur : « les centres d'aide par le travail, comportant ou non un foyer d'hébergement, offrent aux adolescents et adultes handicapés, qui ne peuvent, momentanément ou durablement, travailler ni dans les entreprises ordinaires ni dans un atelier protégé ou pour le compte d'un centre de distribution de travail à domicile ni exercer une activité professionnelle indépendante, des possibilités d'activités diverses à caractère professionnel, un soutien médico-social et éducatif et un milieu de vie favorisant leur épanouissement personnel et leur intégration sociale./ … » ; que les centres d'aide par le travail sont au nombre des institutions sociales et médico-sociales dont la création, la transformation ou l'extension sont subordonnées, par la loi du 30 juin 1975 alors en vigueur, à une autorisation délivrée, selon le cas, par le président du conseil général ou par le représentant de l'Etat ; que ces autorisations sont accordées en fonction des « besoins quantitatifs et qualitatifs de la population » tels qu'ils sont appréciés par la collectivité publique compétente ; que les centres d'aide par le travail sont tenus d'accueillir les adultes handicapés qui leur sont adressés par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel créée dans chaque département ;
Considérant que si l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées constitue une mission d'intérêt général, il résulte toutefois des dispositions de la loi du 30 juin 1975, éclairées par leurs travaux préparatoires, que le législateur a entendu exclure que la mission assurée par les organismes privés gestionnaires de centres d'aide par le travail revête le caractère d'une mission de service public ; que, par suite, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que l'A.P.R.E.I. n'est pas chargée de la gestion d'un service public ; qu'ainsi l'A.P.R.E.I. n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé ; que ses conclusions tendant à la prescription d'une mesure d'exécution et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de l'A.P.R.E.I. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DU PERSONNEL RELEVANT DES ETABLISSEMENTS POUR INADAPTES, à l'A.F.D.A.I.M. et au ministre de la santé et des solidarités.
