Vie et mort de l’acte administratif unilatéral : de son élaboration à sa sortie de vigueur (fiche thématique)

Introduction

L’acte administratif unilatéral (AAU) constitue, avec le contrat, l’une des deux modalités d’action de l’Administration. L’acte administratif unilatéral est propre au droit public. Il traduit l’existence de prérogatives de puissance publique qui, elle, signe l’exorbitance du droit administratif. Cela signifie que l’administration est en mesure d’imposer unilatéralement sa volonté sous la forme d’une norme juridique. Une fois adoptés, les AAU sont exécutoires de plein droit. La sanction de leur méconnaissance peut être le fait de l’administration ou du juge, administratif ou judiciaire, y compris pénal. Cette capacité à mobiliser la violence légitime dont l’État a le monopole invite à très rigoureusement encadrer les pouvoirs de l’administration.  Cet encadrement est double : il est réalisé a priori, par la détermination des règles de droit qui conditionnent, sur la forme et dans son processus d’élaboration, l’acte administratif. C’est ce que l’on nomme la procédure administrative non contentieuse et l’entrée et la sortie de vigueur. Ces normes visent à assurer un certain nombre de garanties aux administrés : garanties que l’acte est adopté compétemment, qu’il respecte les droits de la défense, qu’il présente valablement les motifs qui le fonde etc.  Elles visent également à encadrer la façon dont l’acte peut produire ses effets et les modalités par lesquelles il cesse de les produire. La question de la validité d’un acte est fondamentale dans la mesure où elle informe l’état à un moment donné de l’ordonnancement juridique. Dans la conception de l’État de droit, l’administration est soumise à ces normes. C’est la raison pour laquelle la seconde modalité d’encadrement du pouvoir d’édiction unilatérale des normes est également encadré a posteriori, par le juge, qui peut apprécier et, le cas échéant, sanctionner, les manquements de l’administration à ses obligations procédurales. Cette seconde partie fera l’objet d’autres développements, consacrés uniquement au contrôle juridictionnel de l’administration. Pour le moment seuls nous intéresseront les considérations liées à l’encadrement a priori de la formation des AAU. 

À l’origine, il n’existait pas de textes généraux encadrant les règles de formation des AAU. Au coup par coup, le Conseil d’État a pu découvrir certains principes généraux du droit, à l’instar du respect des droits de la défense (CE, Ass, 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier). Puis, à la fin des années 1970, alors que les exigences démocratiques devenaient de plus en plus qualitatives, il est apparu pressant de systématiser et de développer les garanties procédurales. Certains textes ont été adoptés par le Parlement, comme la loi de 1979 sur la motivation. Puis, au début des années 2000, avec la loi du 21 avril 2000, un nouvel encadrement législatif a été voté. Malgré cela, les principes demeuraient largement soumis à des dérogations ponctuelles, établies dans des lois éparpillées, et sans grande cohérence entre eux. Aussi, le Gouvernement a adopté, par ordonnance, en 2014, un Code des relations du public avec l’administration, qui devient donc LE code d’application général à la procédure administrative non contentieuse.

La question de l'AAU amène à étudier successivement deux problèmes. Ainsi, il s’agit, d’abord, d’analyser les règles applicables à son élaboration : c’est ce que l’on appelle la procédure administrative non contentieuse. (I). En parallèle, les normes relatives aux conditions d’entrée en vigueur et de sortie de vigueur devront être développées (II).

I - La procédure administrative non contentieuse : des exigences démocratiques

Cette partie traitera des aspects liés à la compétence (A), à la forme (B), à la consultation préalable et aux avis (C), au contradictoire (D), au droit à régularisation des erreurs et au droit au contrôle (E), et enfin à la motivation (F). 

A - La compétence de l'auteur de l'acte

La compétence est une notion multidimensionnelle. Cette richesse lui permet de pouvoir être considérée comme fondamentale du droit public. Il en va de la séparation des pouvoirs et du contrôle du souverain. Sur le premier aspect, l’exigence de répartition équilibrée des pouvoirs impose, selon une division horizontale et verticale, de limiter les pouvoirs de chacune des autorités administratives. Il existe un lien plus que naturel avec le problème de la souveraineté, puisque cette dernière peut être définie comme la détention par une personne de la compétence de ses compétences. Cela signifie que le souverain est lui-même en capacité de déterminer l’étendue de sa propre compétence. Or, les autorités administratives ne sont pas souveraines. Elles sont soumises à la volonté du souverain démocratique. C’est la raison pour laquelle leur compétence est nécessairement limitée. 

La compétence s’entend de trois façon : elle peut être temporelle, matérielle et territoriale. 

La compétence temporelle s’attache à assurer que la personne, physique ou morale ou encore administrative (l’autorité), qui adopte un acte est bien en mesure de le faire au moment précis où elle l’adopte. Plusieurs situations peuvent nécessiter de s’intéresser à cette question. C’est le cas, par exemple, lorsqu’une législation nouvelle attribue à une autre autorité qu’antérieurement l’adoption de certains actes. Les mouvements de décentralisation massive débutés depuis 1982 traduisent concrètement ce problème. Les collectivités se sont vues dévolues de plus en plus de compétences exercées antérieurement par l’État. Ainsi en va-t-il par exemple, de la gestion des collèges par les départements ou des lycées par les régions. La réforme des régions de 2016 a par ailleurs encore renforcé le rôle de ces dernières. Dès lors que la compétence est attribuée à une nouvelle autorité, celle antérieurement investie ne peut bien évidemment plus prendre l’acte. Une deuxième hypothèse peut être trouvée lorsque la loi ou une norme supérieure invite une autorité à agir dans un délai déterminé. Bien qu’un manquement à ce type de règle trouvera sa solution sur le terrain de la violation de la loi, dans le fond, il s’agit encore d’un problème de compétence temporelle : une autorité a été investie d’une capacité d’action jusqu’à un certain point.

La compétence matérielle s’intéresse à la matière qu’entend régir un acte administratif ou dans le cadre de laquelle il a été adopté. La compétence matérielle est de loin la plus importante, d’un point de vue quantitatif dans le contentieux. Elle traduit très exactement la logique de séparation des pouvoirs. Une autorité administrative ne peut agir que dans le champ des pouvoirs dont elle est investie, au risque d’empiéter nécessairement sur le pouvoir d’une autre autorité. Le droit, comme la nature, a horreur du vide : il n’existe pas de compétence non attribuée. Des règles de résolution des lacunes explicites existent. Ainsi, par exemple, l’autorité réglementaire de principe est le Premier ministre, au terme de l’article 21 de la Constitution. Au niveau local, dans les affaires de gestion, c’est le conseil municipal, départemental ou régional. 

Enfin la compétence territoriale régie la répartition géographique et horizontale des pouvoirs. Elle ne vaut a priori, qu’au niveau local, puisque les pouvoirs nationaux ont la capacité d’agir sur tout le territoire de la République. Lorsqu’ils sont limités, ce n’est pas pour une question de compétence territoriale, mais plutôt matérielle. En revanche, sauf exceptions, leurs actes ne sont pas valides sur les territoires étrangers. En revanche, au niveau local, le Maire d’une commune ne peut bien évidemment pas réglementer la vitesse, par exemple, sur le territoire de la commune voisine. 

L’atteinte à ces règles de compétence, lorsqu’elle présente un caractère de violation manifeste, peut amener à considérer l’acte comme nul et non avenue. On dit alors que l’acte est inexistant (CE, 1957, Rosan Girard). 

L’attribution de la compétence peut être aménagée. D’une part, le pouvoir hiérarchique permet au supérieur de substituer sa propre appréciation à celle de son subordonné. Il permet au supérieur d’agir à la place de ce dernier (CE, 1936, Jamart). D’autre part, des délégations peuvent être accordées par l’autorité compétente à une autre autorité. Selon un principe établi du droit public, il ne peut y avoir de délégation sans texte qui l’autorise. Autrement, bien entendu, la séparation des pouvoirs n’aurait plus lieu d’être. Les délégations se divisent en deux grandes catégories : les délégations de signature permettent à une personne autre que le titulaire de la compétence d’agir en lieu et place de ce dernier, mais uniquement en cas d’absence ou d’empêchement. L’exercice de la délégation ne retire pas au titulaire sa signature. La délégation de signature est nominative. Il peut toujours revenir dessus et reste responsable de l’acte pris par son délégataire. Cette technique est utilisée pour pallier les absences et les difficultés de disponibilités des chefs de services importants, comme les préfets ou les ministres (CE, 2 juillet 2010, n°325521).  Les délégations de compétence proprement dites, quant à elle, dessaisissent le titulaire initial de la compétence. Elle n’est pas nominative et peut être exercée par le titulaire de la fonction à laquelle elle a été accordée. Lorsqu’elle est présente, l’autorité initiale ne peut plus revenir sur l’acte adopté par le délégataire. 

Enfin, la règle de compétence, dans tous ses aspects, peut être violée dans le cas des circonstances exceptionnelles. C’est très précisément cette situation qui a donné lieu à l’arrêt CE, 1919, Dames Dol et Laurent. Dans ce cas, pour réagir face à une situation incontrôlable, une autorité peut prescrire des mesures adaptées, même s’il n’est pas le titulaire « normal » de la compétence.  D’autre part, la théorie du fonctionnaire de fait permet de considérer certains actes comme valides lorsqu’une personne n’est pas légalement habilitée à agir, mais agit tout de même pour assurer la continuité du service public. Dans ce cas, le juge considère que pour les besoins de la sécurité juridique des administrés, les actes peuvent légalement avoir été pris par une personne incompétente. Cette théorie a été développée par la Cour de cassation, dans un arrêt du 17 août 1883, Affaire dite des mariages de Montrouge. Le Conseil d’État en fait également application (CE, 11 mai 2001, Préfet de Police c/ Ihsen).

B - La forme de l'acte

La forme n’a jamais constitué un critère de reconnaissance d’un acte administratif unilatéral, le juge s’attachant toujours exclusivement au critère matériel et à l’analyse des effets de droit qu’il a produit. Ainsi, un acte administratif peut prendre à peu près n’importe quelle forme qui permet de transmettre une prescription : un texte solennel (décret, arrêté, délibération, circulaire, etc.), un texte non solennel (communiqué de presse, injonction sur papier libre, etc.), il peut être verbal, la décision peut être annoncée à la télévision, lors d’un message officiel, par voie de presse, ou directement oralement au destinataire de l’acte. Il peut également être implicite, c’est-à-dire non verbalisé, sous une forme ou une autre. Il s’agit d’une différence majeure avec les normes de niveau législatif ou constitutionnel : dans ce domaine, le critère formel est prépondérant. C’est d’ailleurs le seul qui permette de départager une loi ordinaire d’une loi constitutionnelle.

C’est la raison pour laquelle les règles de forme, au sens strict, sont réduites à leur portion congrue. Il peut certes exister des actes solennels qui visent à réglementer la forme des actes futurs à prendre. C’est le cas, par exemple, dans le cadre de l’organisation du travail gouvernemental. C’est le cas également lorsque certains textes prescrivent le respect d’une forme particulière, à peine de nullité de l’acte, comme en matière d’urbanisme. Autrement, d’un point de vue général, les exigences de forme se limitent pour l’essentiel à la prescription, au respect de la signature de l’auteur de l’acte ainsi que de la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (art. L212-1 CRPA). Cependant, en application de la jurisprudence CE, Ass, 2011, Danthony, l’absence de ces mentions ne doit pas conduire à l’annulation de l’acte pour ce seul motif. 

La forme constitue un problème pour les décisions implicites qui, par définition, ne peuvent être signées, ni notifiées, ni même exprimées. La décision implicite relève d’une fiction juridique. C’est le silence gardé par l’administration durant un certain temps qui provoque la naissance de l’acte. Pendant longtemps, le principe a prévalu que le silence gardé par l’administration valait décision de rejet de la demande. Depuis 2014, le principe a été renversé : désormais le principe veut que le silence gardé par l’administration sur la demande d’un administré vaut décision implicite d’acceptation de la demande. Il est désormais établi à l’article L.231-1 CRPA. Mais cette règle est assortie de tant d’exceptions (et d’exceptions aux exceptions qui ne rejoignent pas le principe), qu’il est très difficile de mesurer l’effet concret de cette innovation. 

Enfin, il est exact que le développement de l’administration numérique transforme les formes des actes administratifs ; le CRPA en prend acte. Il adapte les exigences de forme à cette technique de communication (art. L212-1 et 3 du CRPA). 

C - La consultation préalable et les avis

Afin d’assurer que la décision adoptée est prise de façon éclairée et prenne compte de tous les intérêts en présence afin d’en faire, par la décision elle-même, une juste conciliation, l’administration peut être amenée à solliciter l’avis de personnes, d’autorités publiques et administratives, d’organismes, de conseils qui lui sont extérieurs ou intérieurs et ce, avant même d’adopter sa décision. L’avis rendu peut être simple ou conforme, facultatif ou obligatoire. L’avis simple ne lie pas son destinataire, c’est-à-dire l’administration, alors que l’avis conforme lui impose d’agir dans un sens déterminé ou de ne pas agir du tout. L’avis obligatoire impose à l’administration de le solliciter, à défaut de quoi, l’acte peut être annulé, mais l’administration dispose toujours de la faculté de solliciter d’elle-même un avis. Dans ce cas, elle doit se conformer aux règles qui régissent la procédure de demande d’avis. L’administration peut également être tenue ou peut décider d’elle-même, selon les cas, de solliciter l’avis du public le plus large. C’est le cas s’agissant des opérations d’urbanisme les plus importantes ou lorsque des considérations écologiques sont en cause. 

Le respect des règles gouvernant les avis est important dans la mesure où ils ne constituent pas des actes administratifs unilatéraux et ne peuvent pas être attaqués, en eux-mêmes, devant le juge. On ne peut exciper de leur illégalité, et du fait qu’ils ont influencé le sens de la décision prise sur leur visa, uniquement en attaquant la décision finale. 

Longtemps les décisions administratives ont été́ prises dans le plus grand secret. Mais, face à l’évolution des mentalités et suite à la prise de conscience de l’intérêt de décisions acceptées plutôt qu’imposées, différentes exigences allant dans le sens d’une meilleure garantie des droits des administrés ont progressivement infiltré la procédure administrative non contentieuse : ainsi, en va- t-il de l’information et de la concertation, et, dans une moindre mesure, de la participation. Tels furent les objectifs du décret du 28 Novembre 1983 sur les relations entre l’Administration et les usagers, et de la loi du 12 Avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’Administration. L’ensemble des ces étapes doit, enfin, être suivi avec le souci constant d’accessibilité́ et d’intelligibilité́ de la décision prise. 

1 - Lorsque l’on parle de l’information, il s’agit de faire droit à l’exigence de transparence de la décision. C’est chose fait avec l’application du principe des droits de la défense : il ne s’agit pas seulement, comme en 1945 avec l’arrêt Aramu, d’imposer la communication à un administré, faisant l’objet d’une décision défavorable, des motifs de cette dernière, mais bien plutôt d’appliquer cette règle quel que soit l’acte administratif. D’ailleurs, fréquemment, l’administré n’a pas à réclamer cette information, celle-ci doit lui être donnée automatiquement. 

Toujours dans le même esprit, la loi du 17 Juillet 1978 fait de la communication au public des documents administratifs la règle, et du secret administratif l’exception, comme, par exemple, en matière de secret de la vie privée ou encore de secret médical. Pour faire respecter cette exigence, le législateur a créée une nouvelle autorité administrative indépendante, la CADA (commission d’accès aux documents administratifs), qui doit être saisie par les administrés pour obtenir la communication de leur dossier avant de s’adresser au juge. 

Notons, enfin, l’obligation de publier les instructions, directives ou circulaires, et le droit pour les administrés d’obtenir la communication des informations nominatives figurant dans les fichiers informatisés, de même que le droit de les contester en saisissant la Commission nationale informatique et libertés. 

2 - La concertation, deuxième étape de la procédure d’élaboration de l’acte administratif, se caractérise par l’organisation d’un débat ouvert aux citoyens et aux différentes administrations concernées afin que chacun puisse exposer ses arguments sur les projets publics en préparation. Il s’agit ici de faire en sorte que les décideurs soient les plus éclairés possibles. Les domaines d’élection privilégiés de la concertation sont les questions d’aménagement et d’environnement : ainsi, les communes doivent, avant tout projet d’aménagement, organiser une concertation ; aussi, un débat public doit être organisé par la Commission nationale du débat public sur tout projet d’aménagement ou d’équipement susceptible de porter atteinte à l’environnement. 

3 - Si les deux précédentes étapes sont très largement répandues, en revanche, la participation, c’est-à-dire le fait d’associer les citoyens à la prise de la décision, est elle peu fréquente. Cette situation s’explique par le fait qu’il ne s’agit plus simplement de recueillir les avis des citoyens, mais bien au contraire de donner une portée effective à leurs opinions. D’où les craintes des autorités administratives de se voir dépossédées d’une partie de leurs attributions. Cet argument, bien que contestable, peut se comprendre si l’on se rappelle que les décideurs publics sont soit élus par le peuple, soit placés sous l’autorité d’un élu : dès lors, permettre à un groupe d’individus, pas forcément représentatif de la collectivité du simple fait que seule une minorité de citoyens interviennent lors de ce type de procédures, d’aller à l’encontre des décisions d’une autorité légitimement élue peut poser des problèmes du point de vue de la démocratie représentative. Pour trouver trace d’une véritable participation des citoyens à la prise des décisions administratives, il faut se tourner vers le droit de l’environnement. En effet, l’article 7 de la Charte de l’Environnement, texte constitutionnalisé, prévoit le droit de toute personne à participer aux décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. 

4 - Ces différentes étapes doivent être suivies avec le souci constant d’accessibilité et d’intelligibilité du droit, et par suite de toute décision publique, qui est, depuis 1999, un objectif de valeur constitutionnelle. Cette exigence est intimement liée au principe de sécurité juridique qui a été consacré par le Conseil d’Etat en 2005 dans son arrêt KPMG. A l’inverse, le principe de confiance légitime, jugée plus subjectif, n’est appliquée par le Conseil d’Etat que lorsque la situation juridique litigieuse est régie par le droit communautaire. Cet effort d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme peut aussi être rapproché des différentes tentatives faites pour simplifier tant les procédures administratives que le langage administratif : ainsi, en va-t-il de la Charte Marianne qui impose aux Administrations de respecter les exigences d’équité, de transparence et d’accessibilité, ou encore des maisons du service public qui regroupent en un guichet unique différents services publics. Notons, enfin, la possibilité offerte par la loi du 17 Mai 2011 dite de simplification et d’amélioration de la qualité du droit d’organiser des consultations ouvertes permettant de recueillir sur un site internet les observations des citoyens, ce type de consultations pouvant se substituer à certaines consultations obligatoires jugées trop coûteuses et trop formalistes. 

D - La contradiction

La contradiction est issue d’un principe général des droits de la défense. Il s’appliquait, à l’origine, uniquement dans les cas où l’administration s’apprête à prendre une sanction contre un administré et lui impose d’entendre ses éléments de défense (CE, 1944, Dame Veuve Trompier Gravier). La loi est intervenue aujourd’hui pour étendre le champ d’application de cette exigence. L’article L.121-1 du CRPA dispose que « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ». Outre les décisions prises en considération de la personne, qui sont relativement nombreuses, toutes les décisions qui doivent être motivées doivent être précédées d’une audition du destinataire. Aux termes de l’article L. 211-2 CRPA, il s’agit des décisions qui : « 
1° Restreignent l’exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ;     
2° Infligent une sanction ; 
3° Subordonnent l’octroi d’une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; 
4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; 
5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ;     
6° Refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir ;     
7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l’un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l’article L. 311-5 ; 
8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d’une disposition législative ou réglementaire.
».

L’exigence de contradiction préalable s’applique donc à toutes les décisions défavorables, sauf lorsqu’elles constituent une réponse à une demande de l’administré. Ainsi, toutes les décisions susceptibles de modifier de façon négative la situation juridique des administrés sont concernées. En revanche, afin de préserver l’efficacité de l’action administrative, l’obligation de contradiction n’est pas applicable aux actes suivants, en application de l’article L.121-1 CRPA : 
« 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 
2° Lorsque leur mise en œuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ;     
3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ;     
4° Aux décisions prises par les organismes de sécurité sociale et par l'institution visée à l'article L. 5312-1 du code du travail, sauf lorsqu'ils prennent des mesures à caractère de sanction
. ». 

Elle n’est pas non plus applicable aux relations entre agents et administration employeur, du moins par sur ce fondement.

Concrètement, l’exigence de contradiction impose d’écouter la personne destinataire de l’acte à intervenir, qui peut toujours se faire assister de la personne de son choix. Dans le cas précis des sanctions, les griefs formulés contre l’administré doivent être communiqués préalablement et celui-ci doit pouvoir consulter son dossier. 

La contradiction dépasse donc bien le seul cadre des droits de la défense, en réponse à une accusation. Elle vise à permettre à l’administré de protéger ses intérêts juridiques. Les décisions de sanction doivent également être motivées. 

E - Le droit à régularisation des erreurs et le droit au contrôle

La loi du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance a institué au profit des administrés deux nouveaux droits.

Le premier est le droit à la régularisation des erreurs (art. L 123-1 et L 123-2 du CRPA). L’idée qui sous-tend ce nouveau droit est que l’administré qui commet une erreur appelant normalement une sanction administrative doit être présumé de bonne foi, sans qu’il faille a priori souspçonner, derrière son erreur, l’intention d’échapper à ses obligations. Aussi, s’il corrige son erreur, il a droit à ne pas être sanctionné.  En d’autres termes, l’administré échappera à la santion s’il corrige l’irrégularité ou l’erreur soit de sa propre initiative, soit après y avoir été invité par l’administration. Ce droit ne s’applique, toutefois, qu’en cas de première erreur. Ce régime s’inspire grandement de ce qui existait en matière fiscale.

Le second est le droit au contrôle (art. L 124-1 et L 124-2 du CRPA). En principe, c’est à l’administration qu’il incombe de décider d’exercer ou non les prérogatives de contrôle dont elle est investie pour la protection de tel ou tel intérêt public. Or, avec cette nouvelle procédure, toute personne peut demander à faire l’objet d’un contrôle prévu par les dispositions législatives et règlementaires en vigieur (sans bien sûr que cette demande l’exonère du respect de ses obligations). La demande doit mentionner les points sur lesquels le contrôle est sollicité. L’administration doit, alors, procéder au contrôle de ces points dans un délai raisonnable. Elle peut, toutefois, rejeter cette demande de contrôle dans certains cas : mauvaise foi du demandeur, demande abusive, demande qui a manifestement pour effet de compromettre le bon fonctionnement du service ou de mettre l’administration dans l’impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle. Si le contrôle débouche sur le constat du respect par l’administré de ses obligations, celui-ci peut, ensuite, opposer les conclusions du contrôle ainsi faites dans le cadre de contrôles ultérieurs. Dans le cas contraire, l’administré peut user de son droit à régularisation.

F - La motivation

Parce que l’exigence de contradiction renvoi, pour son champ d’application, aux règles régissant la motivation, les deux principes entretiennent des liens privilégiés. La motivation constitue une exigence de forme, mais qui conditionne la légalité de l’acte. On dit souvent qu’il s’agit du fond qui rejaillit sur la forme. La motivation entretient, par définition, des liens étroits avec le sens de la décision, son dispositif. Mais il ne faut pas s’y tromper : la motivation sert simplement à expliquer et expliciter les raisons qui ont conduit l’administration à adopter tel acte. La réalité des faits mentionnés, de même que la justesse de la qualification opérée ou la validité de la décision adoptée doivent être abordées sous l’angle de la légalité interne et non de la légalité externe. 

L’exigence de motivation impose à l’auteur d’une décision d’exposer les raisons de fait et de droit qui l’ont poussé à agir ainsi, le but étant d’informer les destinataires de la décision et de faciliter le contrôle du juge. Longtemps, la plupart des décisions n’ont pas été motivées ; elles ne l’étaient que si un texte l’imposait en vertu du principe « pas de motivation sans texte ». Si en 1954, par son arrêt Barrel, le Conseil d’Etat a imposé à l’Administration de lui communiquer les raisons de ses décisions, le principe de non-motivation demeurait à l’égard des administrés. La loi du 11 Juillet 1979 met fin à cet état des choses en imposant la motivation dans de nombreuses hypothèses : décisions individuelles défavorables à leur destinataire, décisions individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par les lois et les règlements, les décisions qui restreignent l’exercice d’une liberté publique, les décisions qui infligent une sanction, les décisions qui restreignent ou abrogent une décision créatrice de droits, et celles refusant une autorisation. Concrètement, la loi précise que la motivation doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision ; autrement dit, une motivation stéréotypée entraînera l’illégalité de l’acte pour vice de forme. En revanche, il est possible de motiver par référence à un autre texte. Précisons, cependant, pour conclure, qu’en cas d’urgence absolue ou quand la question touche au secret médical ou à la défense nationale, l’Administration est déliée du respect de cette exigence. Ces règles sont reprises aujourd’hui aux articles L.211-1 et s. CRPA. 

II – L'entrée et la sortie de vigueur de l'acte

L’acte administratif unilatéral n’est opposable aux administrés et invocables par eux que lorsque ceux-ci en ont eu connaissance : l’acte ne produit, ainsi, d’effets juridiques qu’à partir de ce moment (A). Aussi, une décision administrative ne peut, en principe, avoir un effet rétroactif (B). Par ailleurs, le foisonnement de mesures réglementaires et individuelles peut être de nature à nuire à la sécurité juridique, le juge a donc prévu la possibilité d’imposer à l’Administration la prise de mesures transitoires (C). Une fois édicté, l’acte administratif unilatéral doit être exécuté, ce qui pose la question des moyens à la disposition des autorités publiques pour assurer l’exécution de ses actes (D).  Enfin, les modalités de sortie de vigueur doivent être maîtrisées pour comprendre à partir de quel moment l’acte cesse de produire des effets (E). 

A - Publication et notification de l'acte

En la matière, il importe de distinguer le cas des actes réglementaires de celui des décisions individuelles. S’agissant des premiers, l’information des administrés se fait par publication ou affichage. Ainsi, les lois, traités internationaux et décrets doivent être publiés au Journal Officiel, tandis que les arrêtés ministériels et certaines circulaires sont publiés dans un Bulletin Officiel propre à chaque ministère. Au niveau départemental, il existe un Recueil des actes administratifs dans chaque préfecture. Au niveau communal, l’information se fait généralement par affichage sur des panneaux spécifiques. S’agissant des actes individuels, l’administré est informé par la notification de la décision prise à son encontre. Dans l’hypothèse ou cette mesure a aussi des effets à l’égard des tiers, une mesure de publicité supplémentaire doit être prévue : ainsi, en matière de permis de construire, en plus de la notification, un double affichage en mairie et sur le terrain doit être opéré. Quoiqu’il en soit, une fois notifié ou publié, l’acte administratif unilatéral a force obligatoire : en effet, l’Administration dispose du privilège du préalable qui implique que toute décision administrative a, dès son entrée en vigueur, une autorité immédiate, sans avoir besoin d’une vérification juridictionnelle préalable de sa régularité. La décision est donc, à ce moment là, invocable par les administrés et leurs est opposable. Les articles L. 221-9 à R.221-16 et L.221-17 CRPA prévoient les modalités concrètes de publication au Journal officiel et dans les bulletins officiels des ministères. 

Toutefois, les actes des collectivités territoriales doivent également être transmis à l’autorité préfectorale pour l’exercice du contrôle de légalité, lorsqu’ils y sont soumis. Avant 1982 et la première grande loi de décentralisation, les actes des collectivités n’étaient exécutoires qu’une fois approuvés par l’autorité de tutelle que constitue le Préfet. Ce rôle lui est attribué par la Constitution, dans la mesure où il revient à l’État de s’assurer du respect de la loi sur l’ensemble du territoire national. Le contrôle de légalité ne permet plus au Préfet de suspendre ou d’annuler un acte d’une collectivité. En revanche, il a toujours la possibilité de saisir le juge administratif par la voie du déféré préfectoral en vue de faire annuler l’acte litigieux. Ce déféré s’apparente dans ses grands traits au REP, mais il bénéficie de dérogations importantes quant aux conditions pour agir. 

L’article L.221-2 CRPA dispose que « Un acte réglementaire entre en vigueur le lendemain du jour de l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa, sauf à ce qu'il en soit disposé autrement par la loi, par l'acte réglementaire lui-même ou par un autre règlement. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de ses dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures. ».

B - La non-rétroactivité de l'acte

Le principe posé par le Conseil d’Etat est qu’un acte administratif unilatéral ne saurait avoir d’effet rétroactif (CE, 25/06/1948, Société du Journal L’Aurore), ce principe n’excluant pas l’application des règlements de manière immédiate, c’est-à-dire dès leur entrée en vigueur aux situations en cours. Il faut, cependant, noter qu’il existe des exceptions à ce principe : ce peut être le cas lorsque la loi ou une convention internationale le prévoit de manière expresse. D’autres exceptions consistent dans les mesures de retrait et les actes tirant les conséquences d’une annulation contentieuse : cette dernière hypothèse trouve, par exemple, à s’illustrer en matière de reconstitution fictive de la carrière des fonctionnaires suite à l’annulation d’un tableau d’avancement ; ici, l’Administration doit reconstituer rétroactivement la carrière des personnels touchés par la mesure irrégulière comme si aucune irrégularité n’avait été commise (CE, 26/12/1925, Rodière). 

L’article L. 221-4 CRPA entend protéger les situations juridiques acquises au moment de l’entrée en vigueur d’un acte. Ainsi, il dispose « Sauf s'il en est disposé autrement par la loi, une nouvelle réglementation ne s'applique pas aux situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur ou aux contrats formés avant cette date. ».

La dernière exception réside dans les lois de validation. Ici, le Gouvernement fait intervenir le législateur pour neutraliser les effets d’une annulation contentieuse ou pour éviter celle-ci. Cette technique est strictement encadrée par les différentes juridictions. Ainsi, le Conseil constitutionnel, par une décision du 22 Juillet 1980, a admis le principe des validations législatives, mais a posé le principe selon lequel le législateur ne peut jamais valider un acte annulé. Dès lors, la technique des validations législatives ne peut concerner que deux hypothèses. Il est, ainsi, d’abord possible de valider des actes pris sur la base d’un acte annulé, afin de donner à ses derniers une base légale : c’est, par exemple, l’hypothèse des validations des nominations de fonctionnaires suite à l’annulation de la délibération du jury ; on comprend ici l’utilité d’une telle validation. Ensuite, il est possible d’intervenir de manière préventive en modifiant rétroactivement un acte irrégulier afin d’éviter une annulation contentieuse. Dans la mesure où ces validations législatives portent atteinte à l’exercice de la fonction juridictionnelle, des conditions strictes sont posées à leur validité. Ainsi, pour le Conseil constitutionnel, la validation doit être justifiée par un intérêt général suffisant et le législateur doit déterminer très précisément les actes validés ainsi que la portée exacte de la validation. La Cour européenne des droits de l’Homme est, elle, plus restrictive : ainsi, au nom du droit à un procès équitable, la Cour n’admet les validations législatives qu’en cas d’impérieux motifs d’intérêt général (CEDH, 28/10/1999, Zielinski). C’est cette exigence qu’a reprise le Conseil d’Etat. 

C - Entrée en vigueur et mesures transitoires

Il s’agit ici de faire droit aux exigences du principe de sécurité juridique, car, si « nul n’a le droit au maintien d’un règlement », les administrés ont le droit à être protégés contre l’instabilité des normes. Ce principe a d’abord été consacré par la Cour de justice des communautés européennes et la Cour européenne des droits de l’Homme. En droit interne, il a fallu attendre l’arrêt KMPG du Conseil d’Etat rendu le 24 Mars 2006 pour que ce principe soit consacré. Ainsi, dans cet arrêt, la Haute juridiction impose à l’Administration la prise de mesures transitoires qu’implique une réglementation nouvelle. Concrètement, l’autorité administrative peut être conduite à reporter dans le temps l’entrée en vigueur de l’acte et à aménager des mesures susceptibles de faciliter l’adaptation des règles nouvelles aux situations en cours. L’Administration peut aussi devoir accorder aux administrés des délais pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation. 

Le CRPA a toutefois admis plus largement la nécessité d’adopter des mesures transitoires. L’article L. 221-5 dispose que « L'autorité administrative investie du pouvoir réglementaire est tenue, dans la limite de ses compétences, d'édicter des mesures transitoires dans les conditions prévues à l'article L. 221-6 lorsque l'application immédiate d'une nouvelle réglementation est impossible ou qu'elle entraîne, au regard de l'objet et des effets de ses dispositions, une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause. Elle peut également y avoir recours, sous les mêmes réserves et dans les mêmes conditions, afin d'accompagner un changement de réglementation. ». On le voit, l’administration se trouve soit en compétence liée soit dispose d’une option. Dans le premier cas, l’adoption de mesures transitoires est rendue obligatoire lorsque l’application immédiate de la nouvelle réglementation est impossible. Cela peut se produire lorsque, concrètement, les services administratifs ne sont pas en mesure de l’assurer ou qu’il convient de laisser du temps aux administrés. Un exemple parlant peut être trouvé dans l’obligation qui avait été faite, par règlement, pour tout conducteur de disposer dans le véhicule d’un éthylotest. Face à cette nouvelle obligation, les producteurs n’ont pas été en mesure d’approvisionner les revendeurs. La demande s’est trouvée d’un coup trop importante. La mesure à donc été repoussée (puis abandonnée ?). En outre, lorsqu’elle porte une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés, l’administration doit là encore adopter des mesures transitoires. Cette définition est vague, et il reviendra à la jurisprudence de cerner exactement le contours de ces critères. La nature des mesures transitoires est détaillée à l’article L.221-6. Elles peuvent consister dans le fait de 
« 1° Prévoir une date d'entrée en vigueur différée des règles édictées ; 
2° Préciser, pour les situations en cours, les conditions d'application de la nouvelle réglementation ; 
3° Enoncer des règles particulières pour régir la transition entre l'ancienne et la nouvelle réglementation
. ».

D - L'exécution de l'acte

Une fois la décision prise, il faut l’exécuter. Des problèmes se posent lorsque l’Administration est confrontée à des administrés récalcitrants, celle-ci ne pouvant, en principe, recourir, sans l’autorisation préalable du juge, à la force pour faire exécuter ses décisions. La jurisprudence admet, cependant, trois hypothèses dans lesquelles l’autorité administrative peut exécuter d’office ses décisions, c’est-à-dire peut recourir à la force pour faire exécuter ses décisions sans autorisation du juge. Il en va, ainsi, lorsque la loi l’autorise ou en cas d’urgence. C’est aussi le cas lorsqu’aucune autre voie de droit n’existe, notamment en cas d’absence de sanction pénale (TC, 2/12/1902, Société Immobilière de Saint-Just). Dans ces trois cas de figure, l’exécution forcée doit être proportionnée et l’exécution doit se limiter à ce qui est nécessaire à la bonne exécution de la décision. En cas d’exécution forcée irrégulière, celle-ci constitue une voie de fait relevant de la compétence du juge judiciaire (TC, 08/04/1935, Action française). 

Deux autres possibilités existent pour faire exécuter les décisions de l’Administration. D’abord, le recours à l’action pénale en cas de non-respect des mesures de police administrative est possible. Surtout, l’autorité administrative peut prononcer des sanctions administratives. Ces sanctions se sont considérablement développées depuis quelques années, notamment dans le domaine économique. A la différence des sanctions pénales qui ne peuvent être prononcées que par le juge judiciaire, les sanctions administratives sont prononcées par une autorité administrative et peuvent ensuite faire l’objet d’un recours devant le juge administratif. Le Conseil constitutionnel a posé des conditions à la validité de telles sanctions : ainsi, seule une loi peut les instituer ; par ailleurs, elles ne peuvent être privatives de liberté ; elles doivent, enfin, respecter le principe de nécessité des peines, celui du contradictoire, celui d’impartialité et les droits de la défense. 

E - La sortie de vigueur

La sortie de vigueur correspond à la mort d’un acte administratif. Elle correspond à la sortie des dispositions de l’acte de l’ordonnancement juridique. La sortie de vigueur peut être « naturelle ». En principe, un acte réglementaire (ou législatif) est adopté sans limite de temps. Mais, parfois, l’acte peut prévoir des conditions d’extinction. C’est le cas par exemple, des mesures transitoires, qui, par définition … sont transitoires. Ce peut être aussi le cas lorsque l’acte a épuisé tous ses effets juridiques. Il cesse d’être applicable. Ce peut être enfin le cas lorsqu’il est frappé de caducité ou que des conditions tenant à sa validité disparaissent.

Mais l’administration peut également vouloir décider de retirer (pour le passé et l’avenir) ou d’abroger (uniquement pour l’avenir) un acte qu’elle a adopté. Or, dans certaines situations, lorsque l’acte a créé des droits au profit de son ou ses destinataires, il faut pouvoir concilier le retrait ou l’abrogation avec la sécurité et la stabilité des situations juridiques. Un long développement jurisprudentiel a été introduit dans le CRPA, qui traite de l’ensemble de ces aspects en ses articles L. 240-2 et s.

Le Code aligne les conditions de l’abrogation sur celles du retrait. Pour les décisions créatrices de droit illégales, quelle que soit leur forme, le délai est limité à quatre mois à compter de l’adoption de l’acte. Ce délai ne s’applique pas aux actes obtenus par fraude. Dans certains cas, comme sur demande du bénéficiaire, une décision peut être retirée ou abrogée sans conditions de délai, pour autant que la nouvelle décision soit plus favorable à ce bénéficiaire et que le retrait ou l’abrogation ne porte pas atteinte au droit des tiers. S’agissant des décisions non créatrices de droit, le délais pour le retrait est également de 4 moins, uniquement si elle est illégale. En revanche, l’abrogation est beaucoup plus libre. Dans certains cas, l’administration n’a pas d’autre choix que d’abroger l’acte, notamment lorsqu’il est illégal, dépourvu d’objet. L’illégalité s’entend ab initio ou en cours d’exécution pour les actes réglementaires et uniquement en cas de changement de circonstances pour les actes non réglementaires non créateurs de droit.