Introduction
Pour nombre d’auteurs, tels qu’Olivier Costa dans son article « La Cour de justice et le contrôle démocratique de l’Union européenne », « la Cour de justice est l’une des clés du fonctionnement de la Communauté, non seulement pour garantir le respect de son droit, mais aussi pour assurer la limitation mutuelle des activités de ses acteurs, qu’il s’agisse des institutions de l’Union, des États-membres ou des particuliers ». Le contrôle de la base juridique en matière de compétences internes se trouve à ce sujet au premier plan du contrôle par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) à la fois du respect des principes du droit de l’Union ainsi que du rôle, des droits et des pouvoirs des institutions comme des États membres.
La compétence est un titre juridique habilitant un sujet de droit à exercer un pouvoir. Concernant l’Union européenne, il s’agirait d’une aptitude reconnue à l’Union par les traités en vue d’édicter et mettre en œuvre des règles de droit européen. La compétence de l’Union lui est attribuée par les traités européens. Celle-ci n’a dès lors pas la compétence de sa compétence, c’est à dire le pouvoir d’édicter les règles lui permettant d’exercer son pouvoir. Un acte de droit dérivé ne peut en principe pas conférer à l’Union la capacité d’exercer un pouvoir. La compétence de l’Union peut à la fois être interne, c’est à dire s’exercer au sein même de l’Union européenne, par un acte produisant des effets juridiques au sein de l’ordre juridique européen, et externe, pas le biais d’accords internationaux conclus entre l’Union et des États tiers. La compétence interne, intéressant la présente dissertation, s’exerce, comme toute compétence de l’Union, selon le principe d’attribution. Selon ce principe, chaque acte de l’Union doit être adopté en vertu d’une disposition des traités. Cette disposition sur laquelle se fonde l’exercice d’une compétence est appelée la base juridique de l’acte de l’Union. La CJUE est en charge de contrôler la base juridique sur laquelle se fonde un acte pour éviter tout contournement de la part des institutions européennes. En cas de mauvais usage d’une base juridique par les institutions, l’acte est invalide et peut être annulé par la Cour de justice.
À l’origine, les compétences de la CEE étaient bien plus réduites, celle-ci étant uniquement une union économique. Une distinction claire entre les compétences de la communauté et ses pouvoirs n’était pas réellement opérée. Aujourd’hui, tant la doctrine que les traités, depuis le traité de Maastricht notamment, une distinction claire est opérée entre compétences et pouvoirs. Le traité de Lisbonne vient clarifier encore davantage les compétences de l’Union en les organisant et en lui attribuant de nouvelles compétences, notamment partagées. Le TFUE (Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) clarifie et précise tant les domaines que l’étendue des compétences de l’Union européenne (UE). Le traité CEE ne mentionnait pas de nombreux domaines qui sont aujourd’hui devenus des compétences fondamentales de l’Union suite aux élargissements successifs et au cours du processus d’intégration. Des bases juridiques spécifiques sont aujourd’hui consacrées pour tous les domaines de l’Union avec une clause de flexibilité prévue à l’article 352 TFUE pour les actes de l’Union qui n’entreraient dans aucune catégorie et dont l’application est contrôlée à la fois par une procédure spécifique de mise en œuvre et par le contrôle de la CJUE.
Au vu de ces éléments, il convient de se demander dans quelle mesure l’Union contrôle-t-elle l’obligation de l’Union de fonder l’exercice de ses compétences sur une base juridique adéquate ?
Afin de répondre à ce questionnement, il convient de se pencher dans un premier temps sur l’obligation même pour l’Union de fonder l’exercice d’une compétence sur une base juridique et le rôle de la CJUE comme organe de contrôle de la base juridique (I) pour analyser dans un second temps les caractéristiques et l’étendue du contrôle de la CJUE (II).
I - Une obligation de fonder l'exercice d'une compétence sur une base juridique contrôlée par la CJUE
L’obligation de l’Union d’appuyer ses actes sur une base juridique est une application du principe d’attribution défini au sein du TUE – Traité sur l’Union européenne (A) et est contrôlée par la Cour de justice (B).
A - Le principe d'attribution comme fondement de l'obligation de l'Union d'appuyer ses actes sur une base juridique
Le principe d’attribution est consacré normativement par l’article 5§1 TUE et contraint l’Union à n’exercer ses compétences que dans les limites de ce que les traités prévoient (1). À cet égard, le contrôle de la CJUE de l’exercice par l’Union de ses compétences s’est illustré par sa souplesse et son dynamisme (2).
1 - Un principe normativement défini par les traités européens
Le principe d’attribution est défini à l’article 5§1 TUE qui prévoit que celui-ci « régit la délimitation des compétences de l’Union ». Aux termes de ce principe, selon l’article 5§2 TUE, « l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent. Toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres ». Les traités européens listent la nomenclature des compétences de l’Union. L’article 2 TFUE liste cinq domaines de compétences. Les trois domaines que l’on pourrait qualifier de principaux sont les compétences exclusives, les compétences partagées et les compétences d’appui, de coordination et de complément.
Ces domaines de compétence sont précisés aux articles 3 à 6 TFUE. Toutefois, ces articles ne délimitent pas la compétence matérielle de l’Union. Le contenu des différents domaines de compétences listés par le TFUE se retrouve au sein de la troisième partie du traité. Le traité fixe ainsi d’une part la nature de la compétence de l’Union selon le domaine envisagé en première partie et le contenu de ces domaines en troisième partie. Plusieurs remarques peuvent être soulevées à ce stade. Tout d’abord le principe d’attribution a pour objectif, au sens des traités, de délimiter les compétences de l’Union et d’éviter toute extension de ses compétences au-delà de la seule lettre des textes fondateurs et de protéger les compétences souveraines des États. Ceux-ci sont en effets, par principe, les détenteurs de toutes les compétences qui ne sont pas attribuées à l’Union. Toutefois, cela serait sans compter la vision assez largement supranationale et l’indépendance marquée de la Cour de justice. Par son interprétation des compétences de l’Union en fonction des objectifs qui lui sont attribués, la Cour de justice a eu tendance à interpréter de manière extensive les compétences de l’Union, rendant son rôle particulièrement important dans l’attribution des compétences internes de l’Union.
2 - Le dynamisme de l’interprétation par la Cour de justice du texte des traités fondateurs
La CJUE est en charge d’interpréter à la fois le contenu matériel de la compétence en fonction des objectifs de l’Union et l’étendue de la compétence de l’Union selon les actes pouvant être adoptés par l’institution concernée. La Cour possède ainsi un pouvoir extensif, pouvant interpréter le contenu d’une compétence en fonction de sa lecture du traité au regard du domaine de compétences retenu, de la nature de cette compétence et des actes pouvant être adoptés par les institutions.
Il est à noter que la tendance de la CJUE de ne pas interpréter les traités de manière rigide mais à la lumière des objectifs qu’ils déterminent constituent une des principales avancées dans sa jurisprudence. Ce principe conduit à une grande souplesse dans la législation, l’Union pouvant adopter des actes dans des domaines qui ne sont pas prévus par les traités. À titre d’exemple, dans l’affaire présentée à la Cour le 13 septembre 2005 Commission c/ Conseil, la Cour a permis la prise de mesures par l’Union en matière de droit pénal, qui ne fait pas partie de ses compétences, pour accomplir ses objectifs en matière de protection de l’environnement. La disposition sur laquelle se fonde l’Union pour adopter des actes dans un domaine donné constitue la base juridique de l’acte et est soumis au contrôle de la Cour.
B - La CJUE comme organe de contrôle de l'application de la base juridique des actes de l'Union
La Cour de justice a effectué un contrôle particulièrement dynamique de la base juridique des actes de l’Union, interprétant les compétences de l’Union à la lumière des objectifs des traités (2), tout en soulignant l’importance fondamentale du choix d’une base juridique appropriée, qu’elle considère comme étant de nature constitutionnelle (1).
1 - La nature constitutionnelle du choix de la base juridique appropriée
La Cour de justice est l’organe en charge du contrôle de la base juridique et ce depuis l’arrêt du 26 mars 1987, Commission c/ Conseil, dit « Préférences tarifaires généralisées ». La choix de la base juridique d’une législation européenne est d’une importance toute particulière en droit de l’Union. Si l’acte se fonde sur une base juridique inappropriée, celui-ci est invalide et pourra être annulé par la Cour de justice. La base juridique est la matérialisation du principe d’attribution et le fondement même de la compétence de l’Union. Elle détermine, la nature de la compétence, que celle-ci soit exclusive, partagée, ou simplement de coordination, l’étendue de la compétence et la forme que peuvent prendre les actes de droit dérivé de l’Union selon l’institution compétente.
La Cour a, au sein de sa jurisprudence, souligné l’importance majeure pour l’Union de fonder chacun de ses actes sur une base juridique appropriée et a défini les contours de ce choix. Pour la Cour de justice, en son arrêt du 6 décembre 2001, Protocole de Cartagena, ce choix revêt une importance de nature constitutionnelle. De plus le choix de la base juridique de l’acte en cause ne doit pas résulter de la conviction de l’institution ou de l’auteur de l’acte mais doit être fondé sur des éléments objectifs pouvant donner matière à un contrôle juridictionnel. Ils doivent prendre en compte le but de l’acte et son contenu relativement aux dispositions du traité sur la base juridique concernée (CJUE, 4 mai 2012, In ’t Veld c/ Conseil).
2 - La nature extensive du contrôle juridictionnel de la base juridique
Le caractère dynamique du contrôle effectué par la Cour de justice, interprétant avec souplesse les compétences de l’Union à la lumière des objectifs fixés par les traités conduit à un double constat. Si le principe d’attribution a pour conséquence de délimiter les compétences de l’Union pour en éviter l’extension au détriment des États membres, l’article 5§2 TUE précise d’ailleurs que « Toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres », la lecture téléologique des compétences de l’Union par la Cour tend à étendre ces compétences et le système constitutionnellement intégré de l’Union conduit quant à lui à un fort encadrement de l’exercice par les États de leurs compétences réservées et à un débordement de l’Union sur le droit national.
En effet, l’Union bénéficie d’une double dynamique conduisant à une certaine extension de ses compétences. D’une part le contrôle de la CJUE conduit à assouplir le principe d’attribution et à relativiser la disposition des articles 4 §1 et 5§2 selon laquelle les compétences non attribuées à l’Union reviendraient par principe aux États. D’autre part, les principes de l’effet direct et de la primauté du droit de l’Union conduisent à deux remarques.
D’un côté, ces principes permettent à l’Union d’étendre ses compétences partagées par la préemption de certains domaines. Les États membres étant soumis au principe de primauté du droit de l’Union, reconnu par la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt Costa c/ Enel, ceux-ci ne peuvent prendre de dispositions législatives enfreignant le droit de l’Union. En vertu de ce principe, dans le cadre d’une compétence partagée, « les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne ». De ce fait, la compétence partagée peut être extrêmement réduite, voire devenir exclusive si l’Union a exercé de manière très large son pouvoir législatif.
De l’autre, même dans le cadre d’une compétence réservée, les États ne peuvent s’exonérer du respect du droit de l’Union. Un justiciable peut faire un recours devant la CJUE tant pour un exercice indu d’une compétence étatique là où la compétence a été soit préemptée par l’Union, soit lui est exclusive, que pour l’exercice par l’État d’une compétence qui lui est réservée si elle enfreint le droit de l’Union. Le droit de l’Union vient dès lors très largement empiéter sur le droit national, tant par l’extension de son empreinte dans les domaines où elle a compétence que par son impact sur les domaines où la compétence est réservée aux États membres.
II - Le dynamisme d'un contrôle de la CJUE reposant sur la protection des principes juridiques du droit de l'Union
La CJUE, dans son contrôle de la base juridique d’un acte juridiquement contraignant de l’Union va rechercher si la base juridique employée est la plus adéquate et spécifique (A). En l’absence de base juridique possible, celle-ci va permettre l’application de la clause de flexibilité prévue à l’article 352 TFUE (B).
A - La recherche par la CJUE de la base juridique la plus adéquate dans un objectif de respect des principes du droit de l'Union
Si l’obligation fondamentale de l’Union de faire reposer chacun de ses actes juridiques sur une base juridique adéquate est une matérialisation des principes d’attribution et de sécurité juridique (1), le contrôle de la Cour de justice n’en garde pas moins une certaine souplesse en admettant dans certaines conditions la possibilité de fonder un acte sur plusieurs bases juridiques (2).
1 - Une obligation reposant sur les principes d’attribution et de sécurité juridique
L’obligation pour l’Union de fonder chacun de ses actes juridiquement contraignants résulte des principes d’attribution et de sécurité juridique. Pour être claire et prévisible, la législation de l’Union doit se fonder sur une disposition du droit primaire de l’Union, c’est à dire des traités fondateurs. À défaut, l’acte pourra être annulé par la Cour de justice. Si en pratique une disposition de droit dérivé peut constituer une base juridique pour un acte, cela doit toutefois être prévu par les traités. Cela ne doit toutefois pas permettre à l’Union d’avoir la compétence de sa compétence et celle-ci ne peut sortir du cadre juridique prévu par les traités dans l’appui d’un acte sur une disposition de droit dérivé.
Ce choix fonde la forme juridique de l’acte, encadre la compétence de l’Union et garantit le respect des principes du droit européen. Il garantit à la fois la répartition des compétences entre l’Union et les États membres (et par conséquent l’application du principe d’attribution) mais également entre les institutions de l’Union telles que celles-ci sont prévues par les traités. Concrètement, chaque acte est soumis à une obligation de visa faisant apparaître la base juridique au début du texte législatif. Ce choix doit se fonder sur des éléments objectifs, tels que le but et le contenu de l’acte pour permettre tout contrôle juridictionnel. La seule conviction ou interprétation de l’institution autrice du texte ne peut suffire.
2 - La possible admission d’une multiplicité de bases juridiques par la CJUE
Dans le choix de la base juridique la plus appropriée, l’institution européenne émettrice de l’acte doit choisir la base juridique la plus spécifiquement applicable à l’acte. Il est toutefois admis par la jurisprudence de la Cour qu’un acte puisse présenter plusieurs bases juridiques. Ce type de situation entraîne plusieurs considérations juridiques. Tout d’abord, la Cour a pu déterminer que si une des bases constitue la base juridique principale et l’autre n’est qu’accessoire, alors l’acte doit se fonder sur une seule base juridique principale (CJCE, 17 mars 1993, Commission c/ Conseil). En cas d’incompatibilité également entre deux bases juridiques destinées à fonder un acte, la procédure laissant le plus d’importance au Parlement européen est à privilégier (CJCE, 6 novembre 2008, Parlement c/ Conseil).
Il est toutefois possible, bien que cela soit rare, que les deux bases juridiques puissent être reconnues comme étant d’égale importance et que, si celles-ci ne sont pas incompatibles, les deux procédures législatives soient dès lors appliquées. L’application d’une double base juridique est en effet exclue si l’action de l’Union ou les procédures législatives sont incompatibles entre les deux bases juridiques. Si en revanche aucune base juridique prévue par le traité n’est applicable, il est possible sous certaines conditions d’invoquer la clause de flexibilité prévue à l’article 352 TFUE.
B - La clause de flexibilité : une disposition destinée à pallier les lacunes des traités fondateurs
La clause de flexibilité est une disposition permettant de pallier les vides des traités concernant les pouvoirs de l’Union pour atteindre certains objectifs. Celle-ci repose sur une procédure législative spéciale (1) dont les lourdeurs et les freins à la mise en place conduisent, dans une certaine mesure, à en relativiser la flexibilité (2).
1 - La mise en place d’une procédure législative spéciale par l’article 352 TFUE
L’article 352 TFUE introduit une clause de flexibilité destinée à pallier l’absence d’une base juridique adéquate pour un acte de l’Union qui serait nécessaire pour atteindre un objectif défini par les traités. Cette clause permet de compenser les carences du traité lorsque celui-ci aurait omis les pouvoirs nécessaires à l’accomplissement d’un objectif. Cet article n’est pas destiné à donner une nouvelle compétence à l’Union et de ce fait à contourner le traité, il permet simplement d’en combler les vides afin d’atteindre les objectifs des traités dans le cadre des politiques qu’ils définissent.
La mise en œuvre de la clause de flexibilité nécessite une procédure législative spéciale prévue à l’article 352 TFUE. Celui-ci dispose en effet que « le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après approbation du Parlement européen, adopte les dispositions appropriées. Lorsque les dispositions en question sont adoptées par le Conseil conformément à une procédure législative spéciale, il statue également à l’unanimité, sur proposition de la Commission et après approbation du Parlement européen ».
Plusieurs éléments sont à relever de cette disposition. Tout d’abord, il à noter que celle-ci laisse une importante marge d’appréciation à l’Union. L’expression « les dispositions appropriées » laisse libre cours à l’Union de choisir l’acte de droit dérivé qu’elle estime le meilleur. De plus, l’article 352 TFUE prévoit que celui-ci s’applique « dans le cadre des politiques définies par les traités », qui peut comprendre toutes les actions de l’Union pour accomplir tous les objectifs prévus par le TFUE et le TUE. Ensuite, il convient de remarquer les institutions en jeu dans le cadre de cette procédure législative spéciale. Celle-ci est conçue de manière à inclure les États membres, en prévoyant l’unanimité du Conseil, ainsi que les institutions supranationales en préservant l’initiative de la Commission et l’approbation du Parlement européen. Cette procédure n’est toutefois pas sans présenter des lourdeurs et freins restreignant son emploi.
2 - La nécessaire relativisation de la flexibilité de l’article 352 TFUE
L’effet de la clause de flexibilité, malgré l’importante marge d’action qu’elle laisse de prime abord à l’Union, est à relativiser. Tout d’abord, il convient de noter que les élargissements successifs des traités ont très largement comblé les lacunes des traités CEE. Le TFUE couvre désormais de manière bien plus exhaustive les compétences de l’Union, restreignant l’utilité de la clause de flexibilité. L’article 352 ne se trouve plus utilisé qu’en situation d’urgence à l’instar du Brexit ou de la crise du Covid 19. En outre, la lourdeur de la procédure législative spéciale, notamment en ce qui concerne l’unanimité du Conseil, constitue un frein procédural à l’invocation cet article en nécessitant un consensus très large parmi les États membres. La mise en œuvre de cette procédure, si elle laisse une certaine marge d’interprétation aux institutions de l’Union, n’est également pas sans bornes. Aux termes de l’article 352 TFUE pris en ses deuxième, troisième et quatrième paragraphes, cette procédure doit respecter le principe de subsidiarité et ne peut être utilisée pour adopter une mesure d’harmonisation si les traités ne le prévoient pas ni être invoquée pour atteindre un objectif relevant de la PESC.
En sus de ces limites inhérentes au texte des traités européens, une autre limite à l’utilisation de l’article 352 TFUE relève du contrôle de la CJUE. En effet, l’article 352 n’échappe en rien au contrôle de la Cour de justice qui n’hésite pas à en bloquer l’utilisation. La Cour appréhende l’article 352 TFUE comme une disposition de nature supplétive. Son utilisation est rendue impossible si toute autre disposition spécifique du traité donne à l’Union des pouvoirs pour accomplir un objectif donné. Si une autre base juridique peut être employée dans le traité, l’acte est considéré comme invalide et la Cour peut l’annuler (par exemple CJCE, 3 septembre 2009, Parlement c/ Conseil). Ce contrôle est destiné à éviter tout contournement de la procédure législative normale et toute modification des pouvoirs de l’Union qui ne serait pas prévue par les traités.
