Le droit au procès équitable et l’immunité parlementaire (CEDH, 3 décembre 2009, Aff. Kart. c/ Turquie, n° 8917/05)

Introduction

Parmi les droits fondamentaux de la Convention, dont la Cour européenne des droits de l’Homme est chargée d’assurer le respect, le droit au procès équitable et au recours effectif est sans doute l’un des plus important et des plus complexe. L’article 6 de la Convention européenne prévoit ainsi que :

« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

  1. Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
  2. Tout accusé a droit notamment à :
  3. a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ;
  4. b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
  5. c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;
  6. d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;
  7. e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »

Dans notre affaire, un parlementaire turc avait saisi la Cour, le 8 février 2005, dans une requête dirigée à l’encontre de la République de Turquie. Il mettait notamment en avant que le refus qui lui avait été opposé de lever son immunité parlementaire faisait obstacle aux poursuites pénales devant être diligentées contre lui – pour deux affaires d’insultes proférées lorsqu’il était avocat et avant de devenir député – et le prive ainsi de son droit à un procès équitable conformément au paragraphe 1 de l’article 6 de la Convention. Pour la Cour, « dans son mémoire, [le requérant souligne] que l’immunité législative n’avait pas été instaurée pour assurer l’irresponsabilité et l’impunité des membres du Parlement, mais pour leur permettre d’exercer leur mission librement, sans crainte et en toute indépendance. Il soutient ainsi que, contrairement à l’irresponsabilité, l’inviolabilité était un privilège par nature relatif et temporaire ». La question du respect du droit au procès équitable des parlementaires, notamment le droit à un procès dans un laps de temps qui ne soit pas anormalement long, apparait finalement incontournable lorsqu’elle s’articule au « privilège » de l’immunité dont ces derniers bénéficient généralement. Dans une décision du 8 juillet 2008, une des chambres de la deuxième section de la Cour conclut, par quatre voix contre trois à la violation des dispositions invoquées. Le Gouvernement turc conteste cette solution quelques semaines plus tard et l’affaire est finalement renvoyée, en date du 1er décembre 2008, à la Grande chambre de la CEDH. Contrairement au premier arrêt de la chambre (CEDH, 8 juill. 2008, Kart c/ Turquie, n° 8917/05), la Grande chambre estime que l'impossibilité – pour un député poursuivi pénalement – de renoncer à son immunité parlementaire n'emporte pas violation du « droit à un tribunal » dans le cadre de l’article 6.

La Grande chambre ne manque pas de rappeler la portée très hétérogène de l’immunité parlementaire dans les États membres, ce qui complexifie la décision de la CEDH dans cette affaire (I). Elle précise également les justifications juridiques de l’impossibilité de renoncer à l’immunité (II).

I - La portée complexe et très hétérogène de l'immunité parlementaire en Europe

Pour rendre sa décision, la Grande chambre mène un débat et un constat important sur le droit applicable en matière d’immunité en Turquie (A) et dans d’autres États membres (B). Un préalable indispensable face à la complexité et à l’hétérogénéité des législations applicables dans ce domaine.

A - L'immunité parlementaire dans le droit turc

En Turquie, l’immunité à destination des parlementaires est bien garantie par différents textes (1) et sa levée demeure particulièrement encadrée (2).

1 - Une immunité parlementaire garantie par la République de Turquie

Comme le rappelle la Cour européenne des droits de l’Homme, la chambre de section ou la Grande chambre d’ailleurs, cette immunité parlementaire est accordée par l’article 83 de la Constitution de la République de Turquie.

Le texte précise ainsi que : « Les membres de la Grande Assemblée nationale de Turquie ne peuvent être tenus responsables ni des votes émis et des paroles prononcées par eux lors des travaux de l’Assemblée, ni des opinions qu’ils professent à l’Assemblée, ni de leur répétition ou diffusion en dehors de l’Assemblée à moins que l’Assemblée n’en ait décidé autrement au cours d’une séance déterminée sur proposition du Bureau présidentiel. Aucun député accusé d’avoir commis un délit avant ou après les élections ne peut être arrêté, interrogé, détenu ou jugé sans décision de l’Assemblée. Les cas de flagrant délit passibles d’une peine lourde et les cas prévus par l’article 14 de la Constitution, à condition que les poursuites y afférentes aient été introduites avant les élections, font exception à cette disposition. Toutefois, l’autorité compétente est tenue en ce cas d’informer la Grande Assemblée nationale de Turquie de la situation, sans délai et de manière directe. L’exécution d’une condamnation pénale prononcée à l’encontre d’un membre de la Grande Assemblée nationale de Turquie avant ou après les élections est reportée jusqu’à ce qu’il perde la qualité de membre ; la prescription ne court pas pendant la durée du mandat ».

Il est clair que les députés bénéficient, en Turquie, à la fois de l’immunité en ce que le parlementaire est irresponsable, le soustrayant à toute poursuite pour les votes ou opinions émis dans le cadre de ses fonctions, mais aussi d’une plus large inviolabilité, c’est-à-dire qu’il est mis à l’abri de toute arrestation, détention ou autre procédure judiciaire.

2 - Une levée encadrée de l’immunité parlementaire en Turquie

Comme nous l’avons précisé, l’article 83 de la Constitution turque permet à l’Assemblée de lever l’immunité parlementaire « au cours d’une séance déterminée sur proposition du Bureau présidentiel ». De la même façon, un autre alinéa du même article précise qu’en « cas de réélection d’un membre, l’enquête et les poursuites dont il fait l’objet sont subordonnées à une nouvelle levée de son immunité par l’Assemblée ». Par ailleurs, le règlement de la Grande Assemblée nationale (parlement turc) ne manque pas d’encadrer la procédure de levée de l’immunité parlementaire en ses articles 131 à 134 notamment. Il permet notamment au député dont la levée est réclamée de se défendre en produisant un certain nombre de pièces et d’observations en ce sens.

Enfin, l’article 85 de la Constitution prévoit également la possibilité d’un recours à l’encontre d’une telle décision : « Dans les cas où l’immunité parlementaire d’un député a été levée (...), le député concerné ou un autre député peut former un recours en annulation de cette décision devant la Cour constitutionnelle, en invoquant sa contradiction avec la Constitution, la loi ou le Règlement intérieur, dans un délai de sept jours prenant cours à la date de la décision prise en assemblée plénière. La Cour constitutionnelle statue à titre définitif sur la demande en annulation dans les quinze jours ». Dans ce cadre, la Cour constitutionnelle turque a pu préciser à plusieurs reprises, comme ne manque pas de l’indiquer la Grande chambre de la CEDH, que « lors du contrôle d’une décision de la Grande Assemblée nationale de Turquie en la matière, il convient de s’arrêter sur [la question] du sérieux de l’imputation et [le point de savoir si] elle repose ou non sur des intentions politiques. En outre, pareille décision doit être conforme aux raisons d’être de l’immunité en tant qu’institution constitutionnelle » (Cour constitutionnelle turque, 21 mars 1994, not. N° 1994/11). La Cour fait également remarquer que le nombre de levées de l’immunité parlementaire reste faible selon un décompte mené sur les 30 dernières années.

B - L'exemple d'autres États membres

La CEDH ne manque pas, pour conforter sa décision, d’étudier le droit et les pratiques d’autres États membres, voire même des institutions européennes, en matière d’immunité. Il en ressort, une portée hétérogène de l’immunité (1) et des procédures de levée et de renonciation (2).

1 - Une portée hétérogène de l’immunité parlementaire en Europe

Comme nous l’avons vu, l’immunité des parlementaires comprend le plus souvent l’irresponsabilité, le soustrayant à toute poursuite pour les votes ou opinions émis dans le cadre de ses fonctions, mais aussi l’inviolabilité du parlementaire, c’est-à-dire qu’il est mis à l’abri de toute arrestation, détention ou autre procédure judiciaire. Mais de ce point de vue, il apparait que l’immunité parlementaire et sa portée demeurent extrêmement hétérogènes dans les différents États membres. Dans plusieurs États, l’inviolabilité n’existe pas ; c’est notamment le cas aux Pays-Bas ou à Saint-Martin. Dans d’autres, l’inviolabilité est relativement limitée, à l’image du Royaume-Uni qui l’applique uniquement dans les affaires à caractère civil.

Le reste des États l’accordent assez largement dans leur majorité, même si des pays comme la France ou l’Italie sont venus limiter plus récemment sa portée. Dans ces deux derniers cas, l’autorisation de la chambre n’apparait plus nécessaire pour déclencher des poursuites pénales à l’encontre d’un député, alors qu’elle est requise pour l’arrestation ou la détention par exemple. Enfin, l’étendue de l’immunité dans le temps est amenée à varier d’un État à un autre. Ainsi, si des États l’étendent à l’ensemble des procédures engagées dans la période qui précède l’élection, d’autres la limitent à la durée exclusive du mandat parlementaire.

2 - Des procédures variées de levée et de remise en cause de l’immunité en Europe

La plupart des États européens permettent que l’assemblée parlementaire vienne lever l’immunité de l’un de ses membres. La possibilité d’un recours à l’encontre de la décision parlementaire de levée est relativement limitée, puisqu’elle est prévue en Turquie, en Allemagne ou encore en Autriche. En France, la décision de l’assemblée dans ce domaine relève comme d’autres décisions, d’actes parlementaires insusceptibles de recours devant le juge administratif. Aucune autre procédure de recours ou d’appel de la décision prise n’est par ailleurs prévue. De la même façon, un parlementaire français ne peut pas renoncer au bénéfice global de l’immunité parlementaire, cette perspective n’étant pas prévue en droit interne. A contrario, renoncer à son immunité est possible pour un parlementaire dans peu d’États membres, à l’image de la Pologne ou de la Suisse. La Hongrie et le Royaume-Uni offrent cette possibilité pour les uniques infractions mineures ou spécifiquement mentionnées par la loi.

Comme le rappelle la CEDH, « dans la plupart des États parties, l’impossibilité de renoncer volontairement à l’immunité procède de l’idée que celle-ci n’est pas un privilège accordé aux parlementaires à titre individuel, mais un privilège attribué au Parlement pour garantir son bon fonctionnement ».

II - Les raisons justifiant l'impossible renoncement à l'immunité parlementaire

La Grande Chambre justifie notamment l’impossibilité de renoncer à l’immunité parlementaire par l’absence de réel préjudice pour le parlementaire turc (A), mais aussi par l’absence d’atteinte aux droits prévus par l’article 6 (B).

A - L'absence de préjudice pour le parlementaire requérant

Le parlementaire turc met en avant les conséquences, selon lui, des accusations portées à son encontre et de l’absence d’un procès dans un délai raisonnable du fait de son immunité (1). Mais la Grande chambre de la CEDH rejette ses arguments en considérant qu’il ne subissait aucun préjudice réel (2).

1 - Les arguments invoqués par le parlementaire

Pour le requérant, « les accusations portées contre lui sont de nature à entacher sa personne, sa carrière professionnelle d’avocat ainsi que sa carrière parlementaire. De même, la suspension des poursuites à son encontre et l’incertitude en résultant sont à son avis de nature à susciter des interrogations au sein de l’opinion publique. À cet égard, il précise que la presse diffuse régulièrement la liste des parlementaires faisant l’objet de demandes de levée d’immunité et que son nom y figure, associé à celui de personnes coupables, selon lui, de corruption ». Il précise également que « depuis son élection, sa cause est en effet pendante sans qu’aucune décision définitive n’ait été adoptée, et dès lors il est privé du droit d’être jugé dans un délai raisonnable. Le fait que ces procédures demeurent pendantes depuis son élection, pour une durée qui sera portée à neuf ans à la fin de son mandat, constitue une atteinte à ses droits de la personnalité et à sa carrière politique ».

Ces arguments avaient été précédemment entendus par la chambre de section qui y avait fait droit et considérait qu’un préjudice en résultait. Il apparait assez logique que la situation d’une personne soit affectée par une trop longue période de « péripéties » judiciaires ou d’accusation pénale en suspens. Sans contester l’existence de l’immunité parlementaire, le requérant et la chambre avaient mis en avant la nécessité de pouvoir, de manière volontaire en renonçant à son inviolabilité, accéder à une procédure rapidement et de mettre fin à une procédure, quelle que soit l’issue finale.

2 - Des arguments rejetés par la Grande chambre

Pour la Cour, il apparait clairement dans notre affaire que la protection de l'honneur et de la réputation du parlementaire sont suffisamment assurées, en particulier par le respect du principe de la présomption d'innocence dans le cadre du droit interne des États membres, en particulier en l’espèce par le droit turc en la matière. En ce sens, pour le gouvernement turc, les droits civils du requérant n’ont pas été lésés par la suspension des poursuites pénales et il n’en apporterait pas des preuves suffisantes. Il apparait d’ailleurs assez clairement que le refus de levée de l’immunité parlementaire répond à un objectif de protection des députés et non de leur apporter une quelconque nuisance. Elle n’a pas non plus d’incidence sur la décision de la juridiction pénale par la suite si les poursuites sont reprises à l’issue du mandat. Enfin, il faut souligner que la procédure suivie n’a pas été discriminatoire ou arbitraire.

La Grande chambre de la CEDH rejette, en conséquence, « les allégations du requérant selon lesquelles les poursuites diligentées à son encontre ont pour effet de ternir sa réputation ». Elle souligne notamment « qu’il est dans la nature même de cette forme de préjudice de prendre naissance dès qu’une accusation officielle est portée ».

B - L'absence d'atteinte à la substance même des droits garantis par l'article 6

La CEDH rejette ainsi, fidèle à sa jurisprudence, l’existence d’un droit absolu à obtenir un jugement dans le cadre des dispositions de l’article 6 (1), tout en concluant que le retard procédural engendré par l’immunité n’avait pas engendré d’atteinte substantielle aux droits du requérant (2).

1 - Le rejet d’un droit absolu dans le cadre de l’article 6

Il est clair, dans la jurisprudence de la Cour, que le droit d’obtenir un jugement face à des accusations pénales, dans le cadre des dispositions de l’article 6, n’apparait pas absolu. Elle rappelait déjà dans l’affaire Withey c./ Royaume-Uni, qu’à aucun moment la Convention ne consacre un droit à l’obtention d’un résultat déterminé à l’issue d’un procès pénal, ni d’une décision expresse de condamnation ou d’acquittement (CEDH, Withey c. Royaume-Uni, n° 59493/00). Elle reconnait, par ailleurs, que ce droit se prête volontiers à des limitations précises, même si la question du délai raisonnable apparait centrale une fois le processus judiciaire enclenché.

La question de l’intérêt général de l’immunité parlementaire permet donc indéniablement, pour la CEDH, de déroger à ce droit ou, en tout cas, d’en limiter le bénéfice pour le requérant. La Grande chambre arrive à cette conclusion, et ce malgré l’opinion dissidente du juge Bonello, particulièrement opposé à ce raisonnement : « il n’existe pas de considérations d’intérêt général suffisamment impérieuses pour priver le requérant de son droit fondamental d’accès à un tribunal ; deuxièmement, la Cour aurait dû requalifier le grief en déni de procès équitable dans un délai raisonnable, eu égard au fait que la modeste procédure pour insulte qui vise le requérant durera au moins neuf ans, voire bien davantage », a-t-il pu préciser.

2 - Pas d’atteinte substantielle pour le retard engendré par l’immunité

Pour la Grande chambre de la CEDH, il convient « d’apprécier in concreto l’incidence de l’application des dispositions constitutionnelles sur le droit du requérant à un tribunal, tel que garanti à l’article 6 § 1 de la Convention ». De ce point de vue, la CEDH a déjà eu l’occasion d’affirmer dans sa jurisprudence, que l’application d’une règle concernant une immunité parlementaire largement appliquée ne saurait être considérée en soi comme excédant la marge d’appréciation des États dans la limitation du droit d’accès d’une personne à un tribunal (CEDH, A. c/ Royaume-Uni, n° 35373/97). Ensuite, la Grande chambre fait remarquer que la Cour « se doit de vérifier que les limitations mises en œuvre ne restreignent pas le droit de l’individu d’une manière ou à un point tel qu’il s’en trouve atteint dans sa substance même ». Là encore, la jurisprudence des juges de Strasbourg affirme de longue date que la substance d’un droit est atteinte quand les objectifs de sécurité juridique, de bonne administration de la justice et d’intérêt général se trouvent malmenés (CEDH, 15 novembre 2006, Tsalkitzis c./ Grèce, n° 11801/04).

Au-delà de l’intérêt général et de la poursuite de buts légitimes dont fait part le droit turc en la matière, la Cour relève que le contrôle de proportionnalité qu’elle est amenée à effectuer dans de pareils cas ne démontre pas un quelconque déni de justice. Au contraire, la procédure d’immunité parlementaire témoigne simplement d’un obstacle temporaire au dénouement des poursuites pénales, auquel le requérant savait parfaitement qu’il s’exposait puisque les poursuites ont débuté avant son élection et que la profession d’avocat qu’il exerçait lui donnait une certaine compétence d’appréhension du droit applicable.

CEDH, 3 décembre 2009, Aff. Kart. c/ Turquie, n° 8917/05

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