La police administrative est, avec le service public, l'une des deux activités de l'Administration. Elle a pour but la protection de l'ordre public dans le respect des libertés publiques. L'ordre public a essentiellement une dimension matérielle qui comprend la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques. Mais, le juge administratif y a ajouté une dimension morale, avec notamment le principe du respect de la dignité de la personne humaine. Cette dernière notion est au coeur de l'arret étudié.

Dans cette affaire, le préfet de le Somme autorise, par un arreté du 17 Novembre 2004, la société Valnor à exploiter sur le site du Bois des Loges un centre de traitement des déchets. La commune de Fresnières, proche du site concerné, et plusieurs autres requérants sasissent le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il annule cet arreté, ce qu'ils obtiennent le 18 Octobre 2005. Cette décision s'explique par le fait que le site en cause a été le lieu de batailles durant la Premère Guerre mondiale et que, de ce fait, de nombreuses dépouilles de soldats, sont encore présentes. Le juge de premier ressort estime que le préfet a fait une mauvaise conciliation des intérets en présence, en d'autres termes qu'il n'a pas assuré le respect de la dignité de la personne humaine. Par la suite, le cour administrative d'appel de Douai est saisie et casse le jugement de première instance. Mais, elle enjoint le préfet à prendre des mesures complémentaires afin de faire assurer le respect de la dignité de la personne humaine, ce qu'il fait le 28 février 2007. Les opposants au projet saisissent le Conseil d'Etat pour faire annuler le jugement de la cour d'appel. Le 26 novembre 2008, celui-ci valide l'arreté préfectoral en considérant qu'il n' a pas méconnu le principe du respect de la dignité humaine.

Les développements du juge administratif relatif ce principe constitue l'intéret majeur de cet arret. Le respect de la dignité humaine est un principe consacré à de multiples reprises en droit international comme en droit interne. Ainsi, le Conseil constitutionnel en fait un principe à valeur constitutionnelle. Ce principe n'est pas non plus étranger au Conseil d'Etat. Ainsi, en 1995, la Haute juridiction considère que le respect de la dignité humaine est une composante de l'ordre public. Quelques années auparavant, elle avait jugé que ce principe ne s'arretait pas à la mort de la personne. L'arret étudié s'inscrit donc dans la lignée d'une jurisprudence bien établie. Mais, son intéret est de préciser les contours de cette notion. Ainsi, le Conseil d'Etat estime que le respect de la dignité humaine englobe le respect du aux morts, mais refuse de consacrer un devoir de mémoire.

Puis, la Haute juridiction opère un classique controle de proportionnalité en comparant les atteintes, réelles, au respect de la dignité de la personne humaine, aux objectifs poursuivis, environnementaux notamment. Et, le juge estime que compte tenu des mesures prises pour assurer un relèvement et une inhumation décente, le principe du respect de la dignité humaine n'est pas méconnu.

Il convient donc d'étudier, dans une première partie, le principe du respect de le dignité humaine (I), puis d'analyser, dans une seconde partie, la légalité de l'arreté du préfet de la Somme (II).

  • I – Le juge administratif et le respect de la dignité de la personne humaine
    • A – Les précédentes consécrations
    • B- Les contours du principe du respect de la dignité humaine
  • II – La légalité de l'arreté du préfet de la Somme
    • A – La contradiction des intérets
    • B-La conciliation des intérets
  • CE, 26/11/2008, Syndicat mixte de la Vallée de l'Oise

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