Les provisions correspondent aux sommes déduites des résultats d’un exercice en prévision d’une perte ou d’une charge qui, d’une part, n’est pas encore effective à la clôture dudit exercice, mais que des évènements en cours rendent probable et, d’autre part, présente un caractère non irréversible. Outre les provisions règlementées régies par des dispositions particulières (qui ne seront pas ici étudiées), il existe deux grandes catégories de provisions.
La première concerne les provisions pour dépréciation qui sont constituées en vue de couvrir la perte de valeur non irréversible d’éléments d’actif. Ces provisions peuvent viser les immobilisations, les stocks ou bien les créances.
La seconde concerne les provisions constituées en vue de faire face ultérieurement à des risques ou des charges non encore effectifs à la clôture de l’exercice, mais que des évènements en cours rendent probables : par exemple, les provisions pour impôts, pour dépenses de personnel ou, encore, pour litiges.
Pour être déductibles, ces provisions doivent respecter un certain nombre de conditions, de fond et de forme. La déduction des provisions étant, par définition, provisoire, il convient, par ailleurs, d’en opérer la surveillance sur la durée afin de s’assurer du maintien de leur bien-fondé.
Il convient donc d’étudier, dans une première partie, les conditions de déduction des provisions (I), d’analyser, dans une seconde partie, les différentes catégories de provisions (II) et d’examiner, dans une troisième partie, le sort des provisions (III).
La déduction des provisions est soumise au respect de conditions de fond (A) et de conditions de forme (B).
Pour être admises en déduction du résultat imposable, les provisions doivent respecter quatre grandes conditions générales posées par l’article 39 – 1 – 5° du CGI. Des conditions spécifiques à certaines catégories de provisions sont, également, susceptibles de s’appliquer (voir II).
a / La provision doit être destinée à faire face à une perte ou charge déductible, ce qui implique que la perte ou la charge envisagée doit :
b / La perte ou la charge doit être nettement précisée :
c / La perte ou la charge doit être probable : la probabilité doit être établie à partir de circonstances particulières propres à l’entreprise ; ne peut, en revanche, faire l’objet d’une provision les pertes ou les charges simplement éventuelles c’est-à-dire appréciées à partir de risques d’ordre général.
d / La probabilité de la perte ou de la charge doit résulter d’évènements en cours : la perte ou la charge doit, ainsi, trouver son origine dans des faits survenus au cours de l’exercice ; une provision fondée sur un évènement ayant pris naissance après la clôture de l’exercice n’est pas déductible.
Celles-ci sont de deux ordres, mais n’entraînent pas les mêmes conséquences.
a / La provision doit être effectivement enregistrée dans les écritures comptables : l’article 39 – 1 – 5° du CGI pose que, pour être admises en déduction du résultat, les provisions doivent, d’une part, avoir été inscrites dans les écritures comptables de l’exercice et, d’autre part, avoir été comptabilisées en tant que telles ; de ce principe découlent deux grandes conséquences :
b / Les provisions doivent figurer sur le tableau spécial des provisions à joindre à la déclaration de résultat : il s’agit du tableau n° 2056 pour les entreprises soumises au régime réel normal et du tableau n° 2033D pour celles relevant du régime réel simplifié ; le manquement à cette obligation est sanctionné par une amende fixée à 5 % des sommes non déclarées (ramenée à 1 % si les provisions sont déductibles).
Deux grandes catégories de provisions existent : les provisions pour dépréciation (A) et les provisions pour risques et charges (B).
Les provisions pour dépréciation ont pour objet de couvrir la perte de valeur non irréversible d’éléments d’actif. L’on trouve les provisions pour dépréciation des immobilisations (1), des stocks (2) et des créances douteuses et litigieuses (3).
Ces provisions ont pour objet de constater un amoindrissement de la valeur des immobilisations lorsque celui-ci n’est pas irréversible. Elles peuvent viser tant des immobilisations amortissables que des immobilisations non amortissables (terrains, fonds de commerce, notamment). Un telle dépréciation peut être constatée au terme du processus qui suit.
a / Indice de perte de valeur d’une immobilisation : à la clôture des comptes, les entreprises doivent apprécier s’il existe un tel indice qui peut être :
b / Test de dépréciation : s’il existe un indice de perte de valeur, les entreprises doivent réaliser un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette comptable de l’immobilisation à sa valeur actuelle, celle-ci étant la valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d’usage,
c / Conséquences :
a / Principe :
b / Montant de la dépréciation :
a / Principe : de telles provisions sont constatées lorsque des créances, sans être irrecouvrables et définitivement perdues, apparaissent compromises en raison de la mauvaise situation du débiteur (créances douteuses) ou de l’existence d’un désaccord non encore tranché portant sur le principe ou la quotité des créances (créances litigieuses) ; par exemple, le débiteur est en situation de redressement ou de liquidation judiciaire, le débiteur est en situation notoirement difficile au moment de l’établissement du bilan, le client est parti sans laisser d’adresse, …
b / Conditions de déduction : outre les conditions générales de déduction, les entreprises peuvent constater de telles provisions si :
c / Montant de la dépréciation : le risque de non-recouvrement doit, en principe, être justifié créance par créance ; mais, la jurisprudence admet le calcul statistique des provisions pour créances douteuses lorsque cette méthode est appropriée à la situation et aux données propres à l’entreprise ; en revanche, les provisions ne peuvent être déterminées par un mode de calcul global et forfaitaire.
De telles provisions ont pour objet de faire face ultérieurement à des risques ou des charges non encore effectifs à la clôture de l’exercice, mais que des évènement en cours rendent probables. Ces provisions doivent être distinguées des charges à payer qui sont des passifs certains pour lesquels il existe une incertitude sur le montant exact et / ou la date d’échéance. A l’inverse, les provisions sont des passifs probables.
Plusieurs provisions pour risques et charges peuvent être évoquées : les provisions pour impôts (1), les provisions pour dépenses de personnel (2), les provisions pour travaux (3), les provisions pour litiges (4) et les provisions pour garanties données aux clients (5).
Les entreprises peuvent constituer des provisions pour des impôts qui ne sont pas encore exigibles à la clôture d’un exercice si trois conditions sont réunies :
Plusieurs cas de figure peuvent être envisagés.
a / Provision pour rémunérations, gratifications, cotisations : les dépenses de personnel restant dues à la clôture d’un exercice, telles que les gratifications, primes et participations contractuelles aux bénéfices, peuvent être déduites du résultat dudit exercice à la condition que l’entreprise ait pris, à l’égard des salariés, des engagements fermes quant au principe et au mode de calcul des sommes dues et que l’obligation de payer ultérieurement celles-ci soit certaine ; cette déduction peut revêtir deux formes :
b / Provisions pour licenciement : les provisions constituées en vue de faire face aux charges liées à des licenciements qui peuvent être tenus pour probables à la clôture de l’exercice sont déductibles ; tel est le cas des indemnités versées lors d’un licenciement pour motif personnel, ou dans le cadre d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire ; en revanche, les provisions destinées à faire face à des indemnités de licenciement pour motif économique ne sont pas déductibles.
c / Provisions pour charges de retraite : les provisions constituées en vue de faire face au versement d’allocations en raison du départ à la retraite ou préretraite de membres ou anciens membres du personnel ne sont pas déductibles.
Les dépenses d’entretien et de réparation constituent, en règle générale, des charges annuelles et normales de l’entreprise. Ces dépenses doivent être déduites des résultats de l’exercice au cours duquel elles sont engagées.
Toutefois et à titre exceptionnel, les entreprises peuvent constater des provisions, fiscalement déductibles, à raison des travaux d’entretien, de réparation ou de remise en état qui revêtent une importance telle que les dépenses correspondantes ne peuvent normalement être imputées sur les résultats d’un seul exercice, mais doivent, en bonne administration, être réparties sur plusieurs exercices.
Les entreprises engagées dans un litige peuvent constituer une provision afin de faire face à la charge probable qui en résultera. Pour que cette provision soit fiscalement déductible, il convient :
Les entreprises peuvent déduire fiscalement, au titre d’un exercice, des provisions pour garantie lorsque la charge prévisionnelle entraînée par le jeu de la garantie se rattache par un lien de probabilité indiscutable à des évènements survenus pendant cet exercice. Ces provisions ne sont, ainsi, déductibles que si la charge est, d’une part, nettement précisée et, d’autre part, évaluée avec une approximation suffisante.
Les provisions présentent, par définition, un caractère provisoire. Il y a, alors, lieu de s’assurer, dans le temps, du maintien de leur bien-fondé. Deux grandes hypothèses doivent, ainsi, être distinguées.
a / Provisions régulièrement constituées : ces provisions, qui respectaient les conditions de déduction lors de leur constatation, peuvent faire l’objet de trois types de « destinée » :
b / Provisions irrégulièrement constituées : il s’agit de l’hypothèse où une provision ne satisfait pas, dès l’origine, aux conditions de déduction ; l’entreprise doit réintégrer au tableau n° 2058A la provision lors de sa constitution et la déduire au même tableau lors de sa reprise ; à défaut de régularisation opérée par l’entreprise, l’administration doit procéder à une rectification au titre de l’exercice de constitution de la provision ; si cet exercice est prescrit, la provision doit être rapportée au résultat fiscal du plus ancien des exercices soumis au contrôle.